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Géographie et paysages Canaries

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Au large de l’Afrique, entre dorsale médio-Atlantique et sud de l’Europe, flotte un monde disparate d’archipels : la Macaronésie. Le terme, assez peu utilisé, sert à unifier ces bouquets d’îles sortis des eaux au gré d’éruptions volcaniques : les Canaries bien sûr, mais aussi les Açores, Madère et le Cap-Vert. Outre leur héritage géologique et leur fond culturel méditerranéen, tous partagent une flore et une faune analogues.

Un archipel éparpillé

Mais revenons à notre sujet : les Canaries. L’archipel compte 11 îles et îlots principaux : les 7 îles majeures, bien sûr, ainsi que Los Lobos, située entre Fuerteventura et Lanzarote et, au nord de cette dernière, La Graciosa, Alegranza et Montaña Clara. L’archipel s’étend sur près de 500 km d’est en ouest. L’île de Fuerteventura est ainsi 3,5 fois plus proche des côtes africaines (97 km) que d’El Hierro, à l’extrémité ouest des Canaries !

Les disparités entre les îles sont grandes. Fuerteventura est ainsi assez plate et aride, Lanzarote davantage marquée par le volcanisme, la grande Tenerife coiffée par le volcan du Teide culminant à 3 715 m, Gran Canaria très escarpée, La Palma plus encore, La Gomera ciselée de vallées encaissées et El Hierro austère et rocailleuse...

Des îles nées de l’océan

À jeter un coup d’œil à la carte, on s'aperçoit que les îles sont plus ou moins alignées d’est en ouest. Comment expliquer ce phénomène ? Par le volcanisme ! Chaque île des Canaries constitue le sommet d’un volcan immergé géant, apparu sur le plancher océanique, qui a peu à peu grossi au gré des éruptions.
Durant plusieurs millions d’années, la lave, coagulée en « coussins » (ou « boudins ») au contact de l’eau froide, s’est entassée comme une gigantesque pile jusqu’à, un jour, percer la surface et donner naissance à une île.

Pourquoi cet alignement ? Tout repose sur le mouvement des plaques continentales. Les Canaries sont apparues près de la ligne de fracture formée par la divergence des plaques africaine et atlantique. La 1re glisse vers l’est au rythme moyen de 2 cm par an, tandis que la 2de file vers l’ouest à un rythme similaire.
Résultat ? L’océan Atlantique s’agrandit, tandis que les continents s’éloignent et que les îles Canaries, arrimées à la plaque africaine, dérivent avec elle vers l’est, comme sur un tapis roulant... Ceci explique pourquoi Fuerteventura, la plus âgée de l’archipel (environ 20 millions d’années), se trouve le plus à l’est et que la plus jeune, El Hierro (environ 1,1 million d’années) se trouve tout à l’ouest.
Chaque île montre ainsi un état plus ou moins avancé d’un même phénomène volcanique – différentes en apparence aujourd’hui, mais semblables à un moment de leur vie...

Le lent travail de sape de l’érosion

Depuis les 1ers conquistadors, l’archipel a connu une bonne vingtaine d’éruptions, à Tenerife, Lanzarote, La Palma et El Hierro. Certaines ont permis aux îles de s’agrandir en gagnant sur la mer – comme, en 1971, l’éruption du Teneguía, au sud de La Palma. Tous ces soubresauts et bien d’autres auparavant ont contribué à modeler et remodeler indéfiniment les Canaries.
Les glissements de terrain, l’érosion quotidienne qui entaille patiemment les pentes tendres des montagnes, les explosions, tout concourt à faire des paysages des îles un catalogue des différents phénomènes liés au volcanisme. La taille des calderas du Teide à Tenerife (la 2e plus grande au monde !), de Taburiente (à La Palma) et de Tejeda (à Gran Canaria) témoignent bien des forces colossales à l’œuvre.

D’une île à l’autre, vous verrez une multitude de cônes, amas de lave coagulée et de scories (bombes et cendres accumulées) qui présentent des pentes très raides. Le festival de couleurs qui les caractérise parfois s’explique par la grande variété de composants chimiques des matériaux expulsés.

Des cratères se creusent, bien sûr, formés tantôt par les éruptions elles-mêmes (la lave expulsée en fontaines s’est figée autour de la bouche), tantôt par une explosion, tantôt par l’effondrement de la poche de magma nourricière une fois vidée. Sur les pentes extérieures, de véritables torrents de lave aujourd’hui figée se sont souvent déversés, les dévalant parfois à grande vitesse, parfois au pas de l’escargot. La teneur en gaz de la coulée détermine non seulement son allure, mais aussi son apparence.

Lorsque la coulée commence à refroidir en surface, le magma continue néanmoins de circuler en dessous. C’est ainsi que se sont formés les nombreux « tunnels de lave » de l’archipel, dont certains mesurent plusieurs kilomètres de long !
Ne manquez pas non plus à cet égard le malpaís de la côte nord-est de Lanzarote, avec les extraordinaires sites de los Jameos de Agua et de la Cueva de los Verdes, tous 2 partie intégrante du tunnel de lave du volcan La Corona...
Sinon, 3 lieux de choix permettent aussi d’en apprendre plus sur ces étonnants phénomènes volcanologiques : le parc national de Timanfaya à Lanzarote, avec son Centro de visitantes y interpretación riche en infos, son parcours en bus ou par ses 2 sentiers de randonnée pédestre ; et le Centro de visitantes y Volcán San Antonio à La Palma ; ainsi que le Centro de Interpretacíon del Geoparque Volcanológica d’El Hierro, près du village de La Restinga.

Les volcans sont-ils vraiment endormis ?

Quand on regarde l’archipel au niveau de la mer, la hauteur des îles diminue globalement d’ouest en est. Les vulcanologues calculent que Fuerteventura et Lanzarote, mangées par l’érosion, disparaîtront un jour (10 millions d’années ?) dans les eaux tandis que La Palma croîtra encore ! Déjà, Fuerteventura et La Gomera sont considérées comme éteintes, tandis que Gran Canaria et Lanzarote semblent assagies pour longtemps.

Plus à l’ouest, à Tenerife, les regards se tournent encore, inquiets, vers le Teide. Si l’île n’a pas été l’objet d’une actualité récente (la dernière éruption remonte à 1909), le volcan, au flanc nord très instable, fait craindre un réveil aussi subit que cataclysmique. Le site est donc surveillé étroitement.

El Hierro a surpris les vulcanologues, qui n’avaient pas anticipé l’éruption sous-marine de La Restinga, en 2011-2012, qui a duré près... de 6 mois ! Le cône, immergé à 120 m de profondeur, mesurait 800 m de diamètre à la base pour 200 m de haut. Il s’est arrêté de grandir à 80 m sous la surface des eaux, mais il n’a pas manqué de provoquer des bouillonnements dantesques. Il a rejeté une importante quantité de matière – d’étranges bombes flottantes (mélange de gaz et de cendres) au cœur blanc et à la carapace noire, baptisées « restingolite » (pour près de 145 millions de mètres cubes). Au plus fort de cette éruption sous-marine, on compta jusqu’à 7 bouches éruptives, dont la plus proche n’était qu’à 1,5 km du port de La Restinga !
La plus turbulente, l’île de La Palma a subi les 2 dernières éruptions terrestres des Canaries. L’une en 1971 au Teneguía, la plus récente sur le flanc ouest de la Cumbre Vieja à... l’automne 2021. Cette dernière a provoqué la destruction de 150 ha de bananeraies, d’un millier d’édifices et obligé 7 000 personnes à être évacuées (sans faire aucune victime). Bref, les stations sismiques de la Red de Vigilancia Volcánica de Canarias restent à l’écoute des entrailles de la Terre !

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