Bonjour à tous,
Je profite d’un peu de temps libre pour reproduire ici mes notes d’un voyage d’une dizaine de jours en camping-car dans le sud de l’Allemagne (Bade-Wurtemberg et Bavière), en septembre et octobre 2019. J’espère que mes impressions seront utiles à quelques routards de passage sur ce forum. Mes visites préférées ont été Fribourg-en-Brisgau, Rothenburg ob der Tauber, Schwäbisch Hall, Nuremberg, Ratisbonne, le Walhalla, les églises de Spire (Rhénanie-Palatinat) et Birnau, le musée des Palafittes et les cascades de la Ravenna. J’ai souvent eu le sentiment d’être en Alsace, bien que les richesses du Bade-Wurtemberg et de la Bavière soient peu connues en France.
Baden Baden : ville thermale chic, tranquille et rangée (le lit de la rivière a été pavé !), sans être sensationnelle. Les bâtiments sont assez modernes, à part quelques façades de style dans le centre ou des maisons à pan de bois rutilantes. Les thermes de Caracalla et le palais des Congrès apparaissent un peu froids, avec leurs baies vitrées. Le parc de la Lichtentaler Allee offre en revanche un joli concentré de la ville, avec le casino et surtout la Trinkhalle, une galerie d’imitation antique du XIXe siècle, couverte de fresques liserées d’or à la sauce Forêt-Noire. Vestiges de bains romains, de plus de deux mille ans, dans le sous-sol de la ville haute.
Bad Wimpfen : le long de pavés tordus, les maisons à colombages imposantes, à la façade parfois penchée, semblent prêtes à tomber. D’autres, nichées à l’ombre de leurs grandes sœurs, aux toits tout aussi pentus, divisent la rue en deux étroits passages. Le nombre réduit de boutiques de souvenirs et de touristique rend le petit centre, bordé de remparts, assez magique.
Birnau (église) : monument rose bonbon à l’extérieur, ruisselant de décorations rococos, telles de la chantilly, à l’intérieur. Sur le parvis, belle vue sur le lac de Constance, qui ressemble à une mer intérieure, d’un bleu azur, doux, nimbé au petit matin d’une petite brume se mirant dans l’eau.
Cham : cette ville de Bavière contraste avec celles de la Bohême tchèque voisine par son architecture globalement sobre et harmonieuse ainsi que son dallage large et gris. Intérieur raffiné de l’église paroissiale Saint-Jean : peintures et stucs baroques, retable et chaire croulant sous les dorures. Près de l’hôtel de ville et du pilori, une statue de chien qui se soulage rappelle l’emplacement d’une fontaine ! La Marseillaise est sonnée tous les jours à 12h05 au carillon, en hommage au comte Luckner, natif de la ville et maréchal de France. La porte du château, trapue et en bon état, est appelée de la bière à cause de la présence passée d’une brasserie.
Fribourg-en-Brisgau (Freiburg*-*im-Breisgau) : ville allemande de l’autre côté du Rhin, en face de Colmar en France. Le centre, très vivant grâce aux étudiants, donne envie de s’y attarder : beffrois marron et blanc, cathédrale aux minutieux vitraux, maisons pittoresques, mini-canaux proprets… Panorama sympathique sur la ville et la Forêt-Noire du mont Schlossberg (456 mètres), accessible en funiculaire, où se dresse une tour métallique de 176 marches.
Heidelberg (photo) : une ville à la beauté un peu convenue à mon goût. Les bâtiments, à part quelques pépites comme la maison du chevalier Saint-Georges (haus zum Ritter) en grès rouge, sont globalement communs. La rue du centre ancien, coincée entre la colline et le cours d’eau, très animée et commerçante, est très longue mais finalement assez banale. L’église protestante, malgré d’élégantes colonnes et voûtes blanche et saumon, reste attendue. Plus insolite est la petite prison des étudiants, aux murs couverts d’étonnants graffitis. Mais ce sont surtout le vieux pont et les ruines du château, en grès rouge, qui justifient le statut de capitale romantique allemande d’Heidelberg. Il faut venir au petit matin, quand les foules sont encore absentes, pour rencontrer une ville plus intime. Beaux panoramas du château et du passage des Philosophes, chemin en partie pavé au-dessus de la ville, dans sa partie sud. C’est d’en haut que la cité est la plus charmante.
Karlsruhe : ville nouvelle du XVIIIe siècle qui respire la verdure. Le château, à la façade jaune et baroque, est le centre de la ville. Les rues s’articulent autour de l’édifice. Le nord de l’agglomération est un immense parc arboré, où les pistes cyclables font des kilomètres en ligne droite. La partie sud tombe malheureusement dans les travers de l’urbanisme, avec des immeubles vite faits et grisâtres.
Meersburg : cité médiévale propice à la flânerie, au bord du lac de Constance. Belle carte postale constituée de maisons à pan de bois aux couleurs prononcées, d’une nuée de restaurants et de commerces. Sympathique, mais un peu trop fréquentée et surfaite à mon goût.
Nuremberg (photo) : ce n’est pas la ville sombre, grise, reconstruite à la hâte après les bombardements de la Seconde Guerre mondiale et après le procès dans la ville de hauts responsables nazis (voir le Mémorial) que l’on peut s’imaginer. Pas tout à fait. Dans le centre historique à taille humaine, le promeneur sera surpris par le mélange incongru des immeubles contemporains et la reconstruction à l’identique des maisons médiévales en grès rouge ou à pan de bois. Flânerie agréable d’une rive à l’autre, en passant par des petites îles, grâce à des ponts suspendus, couverts, en pierre ou en bois. Les vendeurs de bretzels, de saucisses de Nuremberg et d’autres spécialités locales égrènent leurs stands dans les rues. A midi, les visiteurs se massent devant l’église Notre-Dame, dont les personnages de l’horloge mécanique, les sept électeurs du Saint-Empire, tournent trois fois autour de l’empereur. Les remparts aux épaisses pierres sont assez impressionnants, romantiques parfois au pied de la Frauentor, où la cour des artisans semble un petit village dans la ville. Château impérial, longue forteresse en grès rouge hérissée de tours, avec belle vue sur le centre. Églises gothiques hautes mais dépouillées à l’intérieur. Petit air de Strasbourg, même si Nuremberg est moins homogène et plus épurée architecturalement.
Palafittes d’Unteruhldingen (musée, photo) : maisons en bois sur pilotis, à fleur de lac (de Constance), qui semblent sorties d’un paysage polynésien. Pourtant, ces 23 habitations ont été reconstituées, à partir des années 1920, telles que les hommes et femmes préhistoriques des âges de pierre et de bronze (-4000 à -800) ont pu les concevoir. L’entrée sur le site est précédée d’une immersion d’une dizaine de minutes dans trois salles multimédia évoquant les fouilles et leur cadre sous-marin. Les sites palafittiques préhistoriques autour des Alpes figurent à l’Unesco depuis 2011.
Rastatt : petit Versailles baroque en pierre rose. Pièces soignées et richement ornées qui valent le coup d’œil, comme la haute salle des ancêtres ou le cabinet de la princesse. La présentation de la porcelaine peinte par Dali est surprenante. Quant au musée militaire, il s’adresse à un public plus averti (et les commentaires ne sont qu’en allemand).
Ratisbonne (Regensburg, photo) : en arrivant par le vieux pont, quelques tours dépassent de l’horizon de la vieille ville (inscrite à l’Unesco en 2006), dont les deux de la cathédrale Saint-Pierre. Autour de ce monument, les rues, avec quelques maisons à colombages, sont pittoresques, pleines de couleurs, de fresques, de fenêtres à meneaux, de bow windows sculptés. La cathédrale gothique, mastodonte de grès rouge, austère à l’intérieur, possède à l’extérieur un fin portail sculpté et des dimensions aériennes. On admire les bâtisseurs, qui ont élevé la nef à 32 mètres. L’église romane Niedermünster force aussi le respect par sa nef sombre portée par d’épaisses colonnes (et ses fresques estompées bien conservées). Mon coup de cœur se porte sur l’Ancienne chapelle, d’extérieur simple, mais à l’intérieur rococo couvert de stucs dorés sur fond blanc. Le décor est déjà très beau dans la chapelle latérale mais il explose dans le chœur avec le retable et les deux oratoires.
Ravenna (cascades) : trésor caché dans le massif de la Forêt-Noire, où le trafic routier est dense. La rivière décrit un défilé de chutes d’eau en aval de la commune de Breitnau. La balade, qui peut se programmer en une demi-journée, est ponctuée de ponts de bois et de passerelles métalliques.
Rothenburg ob der Tauber (photo) : ville médiévale qui semble sortie d’un conte de fées. Affluence touristique importante, mais supportable (en octobre). Les remparts, qui ceignent la cité sur plusieurs centaines de mètres, ont été admirablement restaurés grâce à des dizaines de mécènes, dont les plaques rappellent la générosité sur le parcours. 42 tours et portes sont debout aujourd’hui, malgré la destruction à 40 % de la ville lors des bombardements de 1945. La reconstruction après-guerre livre une ville à la partition harmonieuse, remplie de maisons à colombages, d’un hôtel de ville richement sculpté, d’un musée du Crime médiéval et de la justice (avec à l’entrée une cage suspendue pour les artisans ayant mal travaillé). Dans le ravissant parc du château, on prend la mesure de la situation de Rothenburg au bord d’un plateau. Le petit jardin baroque en proie aux herbes folles, la vue sur le vignoble et les tours en forme de poivrières ajoutent au romantisme du lieu, malgré le pogrom de 450 juifs en 1298. En contrebas de l’impressionnant bastion de l’Hôpital, un ancien hôtel thermal démesuré du XIXe siècle s’accroche à la colline, aujourd’hui centre de conférences évangéliques et hôtel.
Schwäbisch Hall : l’ancienne ville médiévale du pays de Bade (Bade-Wurtemberg), développée autour du commerce du sel, a de beaux restes de sa splendeur. Moins flamboyante que sa consœur Rothenburg, en Bavière, la cité est aussi moins touristique, ce qui permet d’apprécier davantage le charme des maisons à colombages, mais aussi de la place où trône l’église protestante Saint-Michel, desservie par une volée de marches. Des ponts enjambent la rivière au milieu de mignonnes habitations. Beaux tableaux (Cranach l’Ancien) dans l’église catholique Saint-Joseph.
Spire (Speyer, Rhénanie-Palatinat**) :** pour sa cathédrale romane (inscrite à l’Unesco depuis 1981), presque millénaire. Des églises romanes de cette ampleur, avec un autel dominant littéralement la haute nef, sont rares. Vieux beffroi de plus de 50 mètres de haut dans la rue commerçante face à la cathédrale.
Titisee : ville cossue au bord de lac Titisee, au charme artificiel. Rue principale tout entière dédiée au tourisme, dans une atmosphère de cité balnéaire.
Walhalla : on imagine mal un Panthéon d’une nation aussi puissante que l’Allemagne dans les marges du pays, dans les environs d’une ville de 160 000 habitants (Ratisbonne). Le Walhalla, du nom du paradis des guerriers dans la mythologie germanique, se situe pourtant bien dans le creux d’une colline bavaroise, dominant de sa masse de béton le Danube, à Donaustauf. Vaste salle aux murs intérieurs couverts de marbre rose, ponctués de bustes en marbre rappelant les grands hommes et femmes de langue allemande : compositeurs (Mozart, Strauss, Beethoven), hommes politiques (Bismarck, Konrad Adenauer), résistante (Sophie Scholl). Belle vue sur le Walhalla des ruines du château fort de Donaustauf.