Shanghai : dans la gueule du dragon chinois
La Tour Bionique ou la folie des grandeurs
La preuve : le boom immobilier et le nombre de chantiers. Ne dit-on pas que la Chine est le chantier du monde ? Rien que dans la région de Shanghai, près de treize projets de villes nouvelles (Anting, Pujiang, Fenjing, Chenjia…), tous présentés au musée de l’Urbanisme, sont déjà réalisés ou en cours de construction, pour être officiellement achevés en 2010. Un bel exemple de cette frénésie de travaux publics : la ville nouvelle de Luchao (Luchao New Harbour City), à 55 km au sud-est de Shanghai, dans le district Nanhui, a jailli de terre sur les rives basses et humides de la mer de Chine. De forme circulaire, étendue autour d’un grand lac de 2,5 km de diamètre, cette « cité moderne et écologique » a été conçue par un cabinet d’architecte allemand (Hambourg) et devrait abriter près de 100 000 habitants.
Tout près de Luchao, le pont Dong Hai, long de 31 km, relie la terre ferme au nouveau port en eau profonde de Yangshan. Créé de toutes pièces en pleine mer, il est adossé à un groupe d’îlots montagneux. Une fois complètement achevé en 2020, ce sera le plus grand port de Chine et d’Asie, capable d’accueillir les plus imposants porte-conteneurs du monde.
Ainsi les chantiers du futur éclosent-ils un à un, mais le projet le plus fou de Chine (et sans doute du monde) réside dans cette Bionic Tower que deux architectes espagnols, Maria Rosa Cervera et Javier Pioz, ont proposé aux autorités de Shanghai. La tour bionique ne mesurera pas moins de 1 228 m de hauteur et comptera 300 étages capables d’abriter près de 100 000 personnes ! La plus haute tour du monde actuellement ne mesure « que » 500 mètres et des poussières. Imaginez une tour de plus d’un kilomètre ! Une ville verticale en somme, une cité utopique du troisième millénaire, dont l’architecture torsadée évoque une plante tropicale ; le concept de l’architecture bionique étant de s’inspirer à grande échelle de formes existant à petite échelle dans la nature (arbre, plantes, fleurs, feuilles, racines, ailes d’oiseau…).
À voir cette hallucinante silhouette sur Internet, on se dit que Shanghai est bel et bien la gueule du dragon chinois, et que ce monstre du XXIe siècle en est la corne. Folie des grandeurs ? Devant la tour bionique, on est loin, très loin du tic-tac des horloges de Monsieur Liu et des petits souliers de Monsieur Rong. Mais c’est pourtant la même ville…
Texte : Olivier Page avec l’aide de Marie Page
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