Des animaux et des hommes

Comment ne pas être surpris, quand on a marché depuis l’aube dans l’immensité rocailleuse de ce paysage de western qu’est le Hoggar, par les nombreuses gueltas qui le narguent çà et là ? Gorgées de têtards et bordées d’herbes drues, ces petites oasis, que renflouent plus ou moins généreusement les orages de fin d’été, et dont les pluies découlent de l’Atakor, sont une aubaine pour les animaux et les hommes.

Des kilomètres à la ronde, de minuscules oiseaux noirs et blancs annoncent en tournoyant ces points d’eau et de vie, d’où leur nom, moula-moula, qui signifie porte-bonheur. Mais le désert reste le désert. La plupart du temps, nous longeons des creux d’oueds asséchés, des plateaux volcaniques rugueux ou encore des steppes clairsemées : autant de paysages très variés, mais tous marqués par l’aridité. En grimpant à la guelta d’Afilal, un étrange dessin géométrique retient l’attention : cette étendue quadrillée de roches noires témoigne encore des efforts de l’armée qui, installée ici quelques années durant, aura vainement essayé d’y planter une forêt. Car, hormis les Touaregs nomades, en communion avec leur environnement, il est bien difficile de rivaliser avec les véritables habitants de ce no man’s land rocailleux : une faune à la fois discrète et omniprésente, composée de souris sauteuses et agitatrices nocturnes, de scorpions au venin redouté, de lézards inlassablement chassés à coups de pierre, de vipères se prélassant sur les roches chaudes – ce matin, Khemiss en a décapité une dans son sommeil – de gazelles farouches dont les empreintes laissées dans le sol évoquent deux minuscules pétales de marguerite. Sans oublier les araignées clandestines qui se faufilent dans le sac, ou les tiques, chaudement dissimulées dans le poil dru des dromadaires.

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