Canada : l'Acadie, une Amérique française
Île-du-Prince-Édouard : incursion en Inglaterra
On l’appelait jadis île Saint-Jean. Jacques Cartier, en son temps, avait remarqué sa verdeur prometteuse. Les Anglais en ont fait l’île-du-Prince-Édouard. Ils y ont tracé des champs, planté des patates, puis l’ont finalement arrimée au continent — par un pont impressionnant, long de treize kilomètres. Au gré des chemins, ils ont semé des noms comme autant de fanions : d’Albion à Cambridge, de Victoria Cross à New London, de Southampton à Kensington, l’empreinte british est omniprésente.
Bordée par une palissade de courtes falaises, la côte nord est entrecoupée de caps, de plages sauvages et de dunes corpulentes, sans cesse remodelées par les vents. Tout le secteur fait partie d’un parc national, aux portes duquel prospèrent les cottages.
Au sud-ouest, la région Évangéline se souvient de ses racines acadiennes. Ils ne sont guère que 6 000 (4 % de la population) de langue maternelle française — et moitié moins à le parler au quotidien. Une goutte d’eau dans une mer anglo.
Mais à Abram-Village, la goutte d’eau semble intarissable. Au théâtre communautaire, certains soirs d’été, la langue joue des pièges du français et des tentations de l’anglais dans une envolée de rires partagés. Un spectacle bon enfant, comme l’Acadie tout entière : entre chaque acte, les acteurs descendent de scène, servent un verre aux spectateurs, trinquent avec eux. « À l’Acadie ! » Et comme de coutume, tout se termine en chanson.
Viens voir l’Acadie
Deux cents ans ont passé
On a fait qu’exister
Perdus dans le silence
Si tu regardes au loin
Tu verras qu’on revient
On remonte la pente
(Donat Lacroix, pêcheur et auteur-compositeur de Caraquet)
Texte : Claude Hervé-Bazin
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