La Savoie, française depuis 150 ans
C’est au son du chant des Allobroges - l’hymne savoyard - que la Savoie célèbre le 150e anniversaire de son rattachement à la France. Les Pays de Savoie, fiers de leur héritage culturel, ont créé un nouveau label : « 150 ans d’histoire française en pays de Savoie », véritable griffe qui accompagne les manifestations. Cet été, la Savoie se met en quatre pour commémorer son union à la France, mais aussi la première ascension de la Grande Casse, le plus haut sommet de la région.
Préparez votre voyage avec nos partenairesPetite histoire de la Savoie
Les premiers chrétiens arrivés au « pays des sapins » baptisent l’actuelle Savoie Sapaudia au IIe s. Du XIIe au XVIe s, les territoires de la maison de Savoie s’étendent et, de comté, deviennent duché indépendant au XVe s., sous Amédée VIII qui assoit sa puissance. C’est l’âge d’or de Chambéry, qui rayonne et devient une véritable capitale. Pendant la Révolution, la République annexe la Savoie pour former les départements du Mont-Blanc et du Léman. Les Cent Jours nous la font perdre et elle retombe en 1815 dans le giron des rois sardes, pour moins d’un demi-siècle. Un effet yoyo qui met la Savoie au cœur des enjeux politiques. Les comtes de Savoie, coincés entre leurs grands voisins que sont l’Autriche-Hongrie, l’Espagne et la France, ont toujours essayé de constituer des alliances leur permettant de garder leur indépendance.
Les négociations en vue du rattachement à la France débutent en 1858 quand le comte de Cavour, président du conseil du royaume de Piémont-Sardaigne rencontre l’empereur Napoléon III à Plombières. Un premier pas avant que Victor-Emmanuel II, nouveau roi de Piémont-Sardaigne, ne renonce à la Savoie. En échange de son aide militaire auprès de l’Italie pour lutter contre l’Autriche et de son renfort pour appuyer l’unité italienne, la France récupère les duchés de Savoie et de Nice, derniers territoires attachés à la France.
L’accord est officialisé par la signature du traité de Turin, le 24 mars 1860. Ratifié à 98% des suffrages, le plébiscite populaire d’avril 1860 étouffe les voix des détracteurs de l’annexion, qui crient au démantèlement de la Savoie. La division du territoire en deux départements : la Savoie et la Haute-Savoie se fait dans la foulée. Depuis, l’actuelle Savoie Mont Blanc n’a pas changé de main, même en 1944, grâce aux rudes combats menés par les résistants du plateau des Glières.
Le calendrier des festivités
Il y a un siècle et demi, la Savoie s’unissait à la France, événement que le département ne fête pas… à demi. C’est aussi et surtout la fierté des Savoyards et l’appartenance à une identité forte qui sont aujourd’hui fêtées. La visite présidentielle le 22 avril à Chambéry, date anniversaire du plébiscite, a lancé les festivités.
Jusqu’au 29 juillet, dans la cour d’honneur du château des ducs de Savoie à Chambéry, la 7e édition des Estivales du Château rassemble quelques bonnes pointures de la scène musicale, dont Murray Head, Hocus Pocus… A Chambéry, un colloque permet de se pencher sur « l’Annexion de la Savoie à la France : une question européenne » du 22 au 26 novembre.
A Paris, pendant deux journées commémoratives, le drapeau à la croix blanche sur fond rouge a flotté les 9 et 10 juin dans les jardins du Luxembourg. La cloche, coulée sur place par la célèbre fonderie Paccard et offerte au Sénat, est une réplique de « la Savoyarde ». Cette cloche, la plus grosse de France, résonne depuis le sommet de la butte Montmartre, au Sacré-Cœur.
Sur la rive ouest du lac du Bourget, sur le site grandiose de l’abbaye de Hautecombe, jusqu’ au 19 septembre, l’exposition de photos « Nice et Savoie, un regard contemporain » est sous le feu des projecteurs.
Pralognan, la Vanoise et la Grande Casse
C’est décidément l’année des célébrations en Savoie. Porte d’entrée du parc national de la Vanoise, Pralognan fête en 2010 le 150e anniversaire de l’ascension de la Grande Casse (3 855m), concomitant à celui de l’annexion de la Savoie à la France. Mais il semble que, dans ce bout du monde au paysage grandiose, l’expédition entreprise le 8 août 1860 par William Matthews, guidée par Michel Croz et Etienne Favre ait davantage marqué les esprits. Pour rendre hommage à ce pionnier britannique parti conquérir le plus haut sommet de la Vanoise, laissant derrière lui des habitants éberlués, Pralognan a lancé une « cordée historique » à l’assaut de la Grande Casse.
Ce 24 juin 2010, j’emboîte le pas de cette cordée peu conventionnelle : trois guides en pantalon de velours, veste, cravate et chapeaux, font fi de l’équipement moderne et taillent des marches dans la neige à la force de leur piolet. Pour la néophyte que je suis, une excitation mêlée d’anxiété me fait oublier la nuit blanche. Mes voisins de dortoir, au pédigrée plus prestigieux, membres du sélect Alpin club ou du club alpin français, arborent le flegme des alpinistes chevronnés. Des boutades fusent, histoire de se rassurer, mais quelques lacets plus loin, alors qu’on se sent de plus en plus humble au pied du prestigieux sommet, on n’entend plus que les crampons crisser sur la neige.
Les conditions sont optimales et la voie des Grands Couloirs, la plus pratiquée et la plus facile, ne présente aucune difficulté technique, lancent les deux gendarmes du PGHM qui me cornaquent pour l’occasion. Je garde mes appréhensions pour moi quand nous devons garder la distance, au passage d’un de ces ponts de neige qui masquent une crevasse. Mais déjà, le jour se lève sur les dômes de la Vanoise et en parcourant l’arête sommitale, on a juste l’impression de marcher sur un fil entre Tarentaise et Maurienne. Un paysage saisissant, avec le Mont Blanc juste devant, qui ne semble plus si loin dans cette nouvelle dimension !
C’est grisant, vertigineux, mais sur une pente à près de 45°, je dois vite me ressaisir, me cramponner à nouveau pour assurer les derniers pas jusqu’au sommet. Là haut, sur le toit de la Savoie, dans une nouvelle complicité de cordée née d’un effort commun, on s’embrasse comme le veut la coutume, un sourire réjoui aux lèvres, en pensant aux alpinistes qui nous ont précédés sur la traditionnelle « route du sel et des tommes ».
Pour en savoir plus
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Comment y aller ?
Pralognan est relié à la gare TGV/SNCF de Moutiers-Salins par les autocars Altibus.
Se loger
À Pralognan
- Hôtel de La Vanoise : chemin du Dou-des-Ponts. Tél 04-79-08-70-34. Doubles avec sdb 70-80€ en été.. Une enseigne sous laquelle on accueillait déjà les voyageurs en 1875. C’est aujourd’hui un grand chalet aux chambres spacieuses dans l’ensemble, à la déco plutôt agréables, et avec balcon pour la plupart.
En altitude
- Refuge du col de la Vanoise (Félix Faure) : tél : 04-79-08-25-23. Accès : 2h de marche depuis le télésiège du Génépi en traversant le lac aux Vaches.. A 2500m d’altitude, ce refuge créé en 1902 est géré par le club alpin français. 150 places en dortoirs de 12 personnes. C’est le point de départ pour partir à l’assaut de la Grande Casse.
Liens utiles
Site du 150e anniversaire du rattachement de la Savoie à la France
Tourisme en Savoie Mont Blanc
Les Estivales du Château
Fondation pour l’action culturelle en montagne
Office de tourisme de Pralognan
Bureau des guides de Pralognan
A lire
- Nice et Savoie, un regard contemporain : Maryline Desbiolles, Hervé Gaymard et Bruno Berthier, photos François Deladerrière ; éd. Actes Sud. Des paysages emblématiques de la Savoie et des Alpes-Martitimes mis en perspective grâce à l’éclairage de la photographie contemporaine en vis-à-vis des gravures du XIXe s.
Texte : Marie Burin des Roziers
Mise en ligne :