Le Naadam en Mongolie

Le Naadam en Mongolie
© Marc Alaux

Du 11 au 13 juillet à Oulan-Bator, un peu avant ou un peu après dans le reste du pays, la Mongolie tout entière se met sur son trente et un pour célébrer le Naadam, la fête nationale. Cet événement, célébré depuis plusieurs siècles, voit se mesurer les meilleurs athlètes des trois sports traditionnels mongols : courses de chevaux à travers la steppe, combats de lutte et concours d’archers. Le Naadam est aussi l’occasion pour les Mongols de se retrouver dans une ambiance festive, et pour le routard, de découvrir ce pays sous l’une de ses plus belles facettes.

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Le Naadam, une célébration ancestrale

Le Naadam (en mongol, " naadam " signifie joute, compétition) trouve ses origines dans l’Antiquité, à une époque où, pour se mesurer entre elles, les tribus nomades d’Asie centrale envoyaient leurs plus valeureux guerriers s’affronter lors de tournois assez virils. Chez les Mongols, ces joutes étaient devenues courantes sous Gengis Khan (XII-XIIIe siècles). Elles s’organisaient autour de trois épreuves ; une course de chevaux, un concours de tir à l’arc ainsi qu’un tournoi de lutte mongole. Il s’agissait alors de distinguer le meilleur cavalier de la horde, l’archer le plus habile, ainsi que le soldat le plus fort. Le Naadam se déroulait généralement pendant les grandes fêtes religieuses et donnait lieu à d’importantes célébrations.

Dans les années 1920, la Mongolie, gagnée par la révolution bolchevique, devient une république populaire sous influence soviétique. Le pouvoir communiste récupère alors le Naadam pour en faire une fête populaire nationale, fixée chaque année autour du 11 juillet, date anniversaire de l’instauration du nouveau régime. Les danses folkloriques qui avaient l’habitude d’ouvrir la fête du Naadam sont alors remplacées par des défilés militaires et, à Oulan-Bator, les épreuves de tir à l’arc et de lutte sont cantonnées à l’intérieur du stade. Ce n’est qu’au début des années 1990, lors de la chute du régime communiste, que le Nadaam retrouve toute sa splendeur et son esprit d’autrefois. Aujourd’hui, la fête a repris des couleurs et les Mongols y affirment avec fierté leurs traditions ancestrales. Le claquement des bottes disparaît des cérémonies d’ouverture pour être remplacé par des parades médiévales où l’on exalte les plus glorieuses pages de l’empire de Gengis Khan.

Des J.O. à la mongole

Qu’il se déroule à Oulan-Bator ou ailleurs, le principe du Naadam est partout le même. Il consiste en trois grandes épreuves de jeux traditionnels organisées sur trois jours (du 11 au 13 juillet à Oulan-Bator et dans chaque chef-lieu de province, quelques jours avant ou après dans les villages). Le programme n’a pas changé depuis Gengis Khan : course de chevaux, lutte et tir à l’arc. Dans la capitale, les compétitions réunissent généralement les stars nationales, conférant au Naadam un enjeu immense (certains lutteurs préparent leur musculature plusieurs mois à l’avance !). En province, le Naadam voit s’affronter les meilleurs athlètes à l’échelle locale ou régionale.

- La lutte. C’est l’épreuve-phare de la trilogie. Au même titre que le sumo au Japon, la lutte mongole est élevée au rang d’art. Sa pratique remonte à la nuit des temps. Pendant le Naadam d’Oulan-Bator, le tournoi de lutte se répartit sur trois jours (du 11 au 13 juillet) à l’intérieur du stade national. Avant chaque combat, les deux lutteurs se présentent à la foule en délire en exécutant la danse de l’aigle dans leur tenue traditionnelle (bottes épaisses, culotte brodée et chapeau de velours). Les règles sont simples : celui qui parvient à faire tomber son adversaire en premier remporte le combat et accède au tour suivant. En tout, 512 concurrents, tous gabarits confondus, prennent part au tournoi (soit quatre fois plus que le nombre de tennismen engagés chaque année à Roland Garros !). Il y a neuf tours. Le lutteur qui remporte cinq combats à la suite se voit attribuer le titre de faucon. Celui qui en remporte six devient un éléphant. Le vainqueur de la compétition se transforme en lion. Le lion qui récidive l’année d’après est un géant. Le géant qui s’impose une troisième fois est appelé géant national. Et si le géant national est assez costaud pour l’emporter une quatrième fois d’affilée, il est alors déclaré... invincible. Logique.

- Le tir à l’arc. Le concours de tir à l’arc est une tradition qui remonte à Gengis Khan qui l’avait institué afin de sélectionner ses archers les plus adroits. Les compétiteurs utilisent des arcs en bois dont le fil est fabriqué à partir de tendons d’animaux et des flèches créées à partir de branches d’arbres et de plumes d’oiseaux. À noter que l’épreuve de tir à l’arc est depuis quelques décennies ouvertes aux femmes. Les hommes se tiennent à 75 m de la cible (60 m pour les femmes) et tirent 40 flèches en tout (20 pour les femmes). Des juges se tiennent de chaque côté de la cible, mais pas trop près non plus. Ils entonnent un chant (uukhai) en crescendo afin d’encourager l’archer, puis lèvent les mains au ciel pour annoncer le résultat du tir.

- Les courses de chevaux. Les courses de chevaux sont considérées comme le sport national et suscitent l’effervescence générale dans la steppe. On raconte que le Mongol naît sur une selle et qu’il apprend à chevaucher avant d’apprendre à marcher. Pour le Naadam, les chevaux sont sélectionnés et préparés plusieurs mois à l’avance. Malgré leur petite taille (à peine plus grands que nos poneys), les chevaux de Mongolie sont rapides et très endurants. C’est en partie grâce à eux que Gengis Khan a conquis la moitié de l’Asie ! Toutes les courses ont lieu dans la steppe, sur des distances variant entre 15 et 35 km selon les catégories (les courses sont organisées selon l’âge des chevaux). Quant aux cavaliers, ils sont à peine plus grands que leur monture : les plus jeunes ont cinq ans, les plus âgés douze. La compétition est mixte. Les Mongols assurent que ces courses ne représentent pas un grand danger pour les jeunes cavaliers qui sont d’aussi bons jockeys que leurs parents. Des secouristes en 4x4 encadrent en permanence le peloton et interviennent en cas de chutes (qui demeurent assez rares). Au moment du départ, le public, installé sur des estrades, entre en ébullition. Les jockeys, en habit traditionnel, font des rondes, poussent des cris ancestraux, puis se placent en ligne. C’est parti ! Ils disparaissent dans la steppe pour ne réapparaître que quelques heures plus tard pour le sprint final. Le vainqueur reçoit le titre de meilleur cavalier, son père celui de meilleur éleveur et sa monture est proclamée cheval de l’année. Après avoir paradé sous les hourras de la foule, il reçoit un grand bol de lait de jument fermenté (aïrag), puis on lui remet un prix (un téléviseur noir et blanc, une petite moto soviétique, un service de bols...). Les cinq poursuivants sont décorés d’une médaille, et le dernier de la course est porté devant le public qui le console et l’encourage à faire mieux au Naadam prochain en chantant son nom.

Le Naadam d’Oulan-Bator

Pour un Mongol, cela ne fait aucun doute. Le meilleur Naadam est celui d’Oulan-Bator. Parce qu’il a lieu dans un grand stade où résonne de la musique de péplum et qu’il réunit les meilleurs athlètes du pays, le Naadam de la capitale impressionne et fait rêver les provinciaux. Pendant trois jours, la ville ne dort pas et prend des airs de fête foraine. Des stands fleurissent à chaque coin de rue et on improvise jeux, parades et concerts dans les parcs ou aux alentours du stade. Si le Naadam d’Oulan-Bator représente une expérience unique pour un Mongol, il risque cependant de décevoir le voyageur en quête d’exotisme. Ce dernier pourra alors fuir la capitale pour rejoindre les petits villages des steppes. Le Naadam y est moins spectaculaire qu’à Oulan-Bator, mais tout aussi festif et convivial.

C’est la fête au village

Au-delà du caractère purement sportif de l’événement, le Naadam dans les villages de campagne est l’occasion d’un grand rassemblement suscitant toujours beaucoup d’enthousiasme chez les Mongols. Quelques jours avant le début des festivités, ils sont des centaines, voire des milliers, à converger à travers la steppe vers les lieux où sont organisées les joutes. Pour certains, notamment les nomades, le Naadam est l’occasion de rencontrer un ami ou un proche que l’on n’a pas vu depuis un an. Les retrouvailles s’accompagnent généralement d’un repas à la bonne franquette où l’on mange du khuushuur (beignet de viande de mouton frit dans l’huile) et où l’on boit de l’aïrag ou du suutei tsaï (thé salé au lait). Les yourtes se montent un peu partout autour des villages et, non loin de la ligne d’arrivée des courses de chevaux, on installe une scène sur laquelle se produisent des formations de musique traditionnelle mongole ou, diversité oblige, le groupe de hard rock local.

Voyager en Mongolie

La Mongolie n’étant pas la porte à côté, quelques petits conseils s’imposent. Sachez que vous n’avez pas vraiment l’embarras du choix pour rallier Oulan-Bator depuis la France : l’avion ou le train. Dans les deux cas, il vous faudra transiter par Moscou, voire Pékin.

- Par avion. La solution la plus simple et la moins onéreuse serait de se rendre à Moscou, puis d’embarquer dans un avion pour Oulan-Bator. Le voyage entre les deux capitales dure un peu plus de six heures à l’aller, environ sept au retour. En été, il y a des vols pratiquement tous les jours. Les détails et les réservations sont sur le site de la compagnie aérienne russe, Aeroflot.

- Par train. Et quel train ! Le mythique transsibérien qui traverse la Russie de Moscou à Vladivostok passe par Oulan-Bator. Le voyage dure près d’une semaine, mais il vous offre la possibilité de franchir l’Oural, de longer le Baïkal, de traverser la taïga et de remplir votre tête de souvenirs inoubliables. Le prix varie selon les saisons, le compartiment (2 places ou 4 places), ou la classe (1e, 2de ou 3e). On peut également se rendre à Oulan-Bator depuis Pékin en Transmongolien à travers le désert de Gobi. Toutes les informations concernant le Transsibérien et le Transmongolien sont disponibles en français sur le site de l’agence suisse Espace Est-Ouest qui propose également un système de réservation.
Sur place, on se déplace à l’intérieur du pays en 4x4, le moyen de locomotion préféré des Mongols, après le cheval bien sûr ! Plusieurs chauffeurs relient la capitale aux villes et villages de province, ainsi que les différentes régions entre elles. On peut partager le véhicule à plusieurs, un peu comme un taxi collectif.

Attention ! La Mongolie exige un visa pour les touristes. Pour votre demande de visa, adressez-vous à l’ambassade de Mongolie en France, 5, avenue Robert Schuman, 92100 Boulogne-Billancourt, tél. : 01-46-05-28-12. E-mail : info@ambassadedemongolie.fr.

Pour en savoir plus

Où dormir sur place ?
Il existe de nombreux petits hôtels et auberges bon marché à Oulan-Bator. Les réservations peuvent s’effectuer en ligne...
Ailleurs, on vous invitera à passer la nuit en habitat traditionnel. De nombreux villages disposent en effet de yourtes pour les voyageurs de passage. On y fournit literie et repas chauds.

Liens utiles
Anda Mongolie : ce site est une mine d’informations concernant la culture mongole. Il propose, entre autres, une liste de livres et de carnets de route pour découvrir le pays par la littérature.

Le site de l’Ambassade de France en Mongolie propose des rubriques de conseils aux voyageurs. Pratique et très utile.

Texte : Chahine Benabadji

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