Madame Bâ
Auteur : Erik Orsenna
Editeur : Fayard / Stock
490 Pages
Madame Bâ, née Marguerite Dyumasi, descendante de la caste des forgerons et de celle des traditionnistes, est inquiète. Son petit-fils Michel, possédé par le démon du ballon rond, s’est laissé entraîner en France, loin des rives nourricières du fleuve Sénégal et de la chaleur de Kayes, au nord-ouest du Mali, la région où elle a vu le jour. Probablement a-t-il lui aussi été touché par la maladie du départ, celle qui frappe le peuple Soninké depuis la nuit des temps ? Peu importe, Madame Bâ ne laissera pas le jeune Michel seul entre les griffes d’entraîneurs peu scrupuleux. Mais comment faire pour le rejoindre, les visas sont si difficiles à obtenir ? Déjà, sa demande a été rejetée. Une ultime solution s’impose : écrire au président de la République française. Mais pour lui expliquer qui elle est, les quelques lignes du formulaire n° 13-0021 sont bien dérisoires... Comment ranger dans des cases la vie si complexe d’une Africaine ? Madame Bâ s’applique à raconter au président ses origines, sa famille, sa vie de femme aimante et jalouse, son travail au service du développement, puis de l’éducation de son pays...
Erik Orsenna, amoureux de l’Afrique, a choisi de la raconter à travers la vie d’une de ces femmes fortes et admirables, celles sur qui le continent noir se repose et grâce auxquelles il avance. Madame Bâ n’a pas eu la vie facile, mais elle est fière de ce qu’elle est, et sa force de caractère impose le respect. Plus que tout, elle aime son pays, revendique ses racines, sa culture. Elle est déchirée par la fuite inexorable de ceux qui ne voient un avenir meilleur qu’au Nord, cette « maladie de la boussole » qui touche jusqu’à ses enfants. Pourtant, jamais elle ne se laissera abattre.
Le personnage central est plus qu’attachant, le récit envoûtant, la lecture édifiante. L’Afrique, sa richesse culturelle, sa complexité et ses déchirures sont évoquées ici de la manière la plus humaine qui soit.
Texte : Clémentine Bougrat
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