En Europe, au bout du monde

Cabo da Roca © ecstk22 - stock.adobe.com

Au bout du monde, dit-on… Et au bout de l’Europe, alors ? À force de voyages, il arrive de croiser des bornes, des monuments, des panneaux signalant l’une de ses extrémités ou son centre.

Mais où sont-ils vraiment ? Tout dépend de ce que l’on considère : le continent, les îles au-delà, ou l’Union européenne. Enquête baladeuse sur les limites de l’Europe, du nord au sud et d’ouest en est.

Le cap Nord (Norvège)

Le cap Nord (Norvège)
Cap Nord © Anibal Trejo - stock.adobe.com

Côté nord, le bout de l’Europe est une évidence : le cap Nord norvégien, sur l’île de Magerøya, reliée au continent par un tunnel sous-marin. Été après été, des milliers d’amateurs de road trips s’enquillent la longue route (3 600 km de Paris) pour rejoindre ce promontoire naturel caparaçonné de falaises, qui s’abîment avec emphase dans les eaux glacées de l’Arctique, 307 m plus bas – mer de Norvège à l’ouest, mer de Barents à l’est. Impressionnant !

Certes, le parking est hors de prix et le site plongé un jour sur deux dans un brouillard à couper au couteau, mais, lorsque le vent le chasse et que le soleil de minuit perce enfin la voûte céleste, l’instant confine au sublime.

Skarsvåg © lehvis - stock.adobe.com

Le plus drôle, c’est que le « vrai » cap Nord n’est pas là, mais à 4 km à l’ouest, au Knivskjelodden, un long doigt de terre rocailleux culminant à 71° 11’ 08’’ de latitude nord (contre 71° 10’ 16’’ pour le cap Nord officiel). Pour arriver là, il faut descendre de voiture et s’avaler une rando un peu morne de 9 km à travers la toundra, balisée de loin en loin par quelques cairns. Facile de s’égarer dès que la brume s’installe…

Pour en savoir plus, lire notre reportage Cap Nord et Nordkyn : la Norvège, au bout de la route

Le + de routard.com :

Petit détour sur la route du cap Nord, Skarsvåg (60 habitants) s’est autoproclamé « village de pêcheurs le plus au nord du monde ». Une boutique spécialisée y vend de jolis pères Noël en verre à accrocher à son sapin !

Le Svalbard (Norvège)

Le Svalbard (Norvège)
Longyearbyen © aalutcenko - stock.adobe.com

Si l’on parle du point le plus septentrional de l’Europe, tous critères confondus, il faut pousser au-delà, jusqu’à l’archipel norvégien du Svalbard, à mi-chemin entre le cap Nord et le pôle. Son nom signifiant « montagnes pointues » évoque bien l’immensité sauvage de ces îles solitaires nappées de glaciers (à 60 %) et entaillées de fjords.

La population, regroupée dans le village norvégien de Longyearbyen, les cités minières russes de Barentsburg et Pyramiden, et la station de recherche scientifique de Ny-Ålesund, atteingnent tout juste 2 880 habitants. Rude vie sous ces latitudes extrêmes, où le soleil se couche le 30 septembre pour se lever le 1er mars !

Spitzberg - glacier de Monaco © Ruben - stock.adobe.com

Souvent prise dans la banquise, Rossøya, l’île la plus au nord de toutes, grande comme un confetti, est pour ainsi dire inaccessible. Mais les croisières, moyen privilégié pour parcourir l’archipel, contournent généralement l’île principale par le nord-ouest pour s’approcher du mur de séracs bleutés du fantastique glacier de Monaco. L’occasion de franchir le 80e parallèle et de se voir offrir un petit verre d’aquavit !

Le + de routard.com :

Le Spitzberg est une destination invariablement chère. Difficile de s’y rendre par soi-même. Ceux qui veulent sortir de Longyearbyen à pied ou à motoneige doivent savoir manier une carabine (une sécurité pour se protéger des ours polaires).

Nuorgam (Finlande)

Nuorgam (Finlande)
Nuorgam © Lapland North Destinations

Retour sur le continent. La Norvège n’appartenant pas à l’Union européenne, c’est du côté de la Finlande qu’il faut chercher son point le plus au nord. En Laponie plus précisément, du côté de Nuorgam, un hameau de la commune d’Utsjoki. Un simple panneau sur une dalle rocheuse y confirme la latitude, à l’endroit même où court la frontière norvégienne : 70° 05’ (bien au-delà du cercle polaire arctique, situé à 66° 33’).

Au bout du monde, Nuorgam n’est qu’un hameau sámi, comptant bien plus de rennes que d’habitants (environ 200). De là, sur une quarantaine de kilomètres, la route 970 épouse les berges de la rivière Teno, bien connue des pêcheurs de saumon.

Utsjoki - cabanes © Lapland North Destinations - KotaCollective

L’été, le jour y règne sans discontinuer du 16 mai au 27 juillet. L’hiver, en plein kaamos (nuit polaire), on vient plutôt observer les aurores boréales, souvent intenses dans le coin – quand le ciel veut bien s’entrouvrir (un jour sur sept en moyenne !).

À Utsjoki, une quinzaine de cabanes posées dans un pré pentu accueillaient jadis pour la nuit les fidèles de l’église voisine, qui marchaient des heures, voire des jours pour assister à la messe…

Le + de routard.com :

Camping, bungalows en bois ou apparts, le Nuorgam Holiday Village offre les hébergements (et le café) les plus septentrionaux de l’UE.

Cabo de São Vicente et Cabo da Roca (Portugal)

Cabo de São Vicente et Cabo da Roca (Portugal)
Cabo São Vicente © Nataraj - stock.adobe.com

Tous ceux qui se sont promenés en Algarve jureraient que l’Europe se termine au cap Saint-Vincent, à l’extrême sud-ouest du Portugal. Un lieu certes très évocateur, décrit comme sacré par les auteurs antiques – qui y voyaient l’extrémité de la Terre tout entière.

La route y bute sur un monastère et un phare magistralement plantés au sommet d’une presqu’île bardée de falaises. À gauche et à droite rugit l’océan.

Lire notre reportage L’Algarve hors des sentiers battus

Praia da Ursa - Cabo da Roca © Rui Vale de Sousa - stock.adobe.com

Instruments de mesure en mains, la vraie extrémité occidentale de l’Europe continentale est située plus au nord, à la hauteur de Lisbonne, près de Sintra : au Cabo da Roca. Coiffant une très belle côte venteuse et sauvage, 140 m au-dessus de l’Atlantique et de ses déferlantes, la pointe du Raz portugaise (par 9° 30’ 2’’ O) est marquée par une colonne de pierre surmontée d’une croix.

Ici aussi, la route parvient jusqu’au site et jusqu’à son phare. Juste au nord, un raidillon un peu dangereux, mal marqué, dévale vers la Praia da Aroeira, la plage la plus à l’ouest de l’Europe. Celle d’Ursa, au-delà, est un peu plus facile à rejoindre et baignée de superbes aiguilles rocheuses.

Le + de routard.com :

S’il contourne le Cabo da Roca par l’intérieur, le GR 11 (Caminho do Atlântico) longe très joliment la côte atlantique portugaise.

Flores (Açores)

Flores (Açores)
Flores © Lukasz Janyst - stock.adobe.com

Elle porte bien son nom, cette jolie « île des fleurs ». La plus à l’ouest de tout l’archipel des Açores, à 1 862 km de la péninsule Ibérique, elle marque le point le plus occidental de l’Europe politique.

Pour ce qui est de la géographie, c’est une autre histoire… Flores et sa petite voisine Corvo font déjà partie de la plaque nord-américaine ! Et pour cause : volcaniques, comme tout l’archipel, elles sont nées sur la dorsale médio-atlantique, avant d’être entraînées vers l’ouest par les mouvements tectoniques.

Entièrement classée réserve de biosphère par l’Unesco, Flores est veillée par quelques pics altiers (culminant à 914 m) et un haut plateau où se sont formés pas moins de sept lacs de cratère. Un lieu envoûtant, souvent nimbé de brumes.

Corvo - cratère © EyesTravelling - stock.adobe.com

Côte ouest, cascades et orgues basaltiques surplombent de délicieux hameaux installés sur d’anciennes coulées d’effondrement, où foisonnent les hortensias. Mais c’est un îlot tout en falaises, juste au large, qui marque le terminus de l’Europe, par 31° 16’ 30’’ O : Monchique. Jadis, les navigateurs réglaient leurs instruments en le dépassant.

Lire aussi Les Açores de l’Ouest, au bout de l’Europe

Le + de routard.com :

À 15 milles marins au nord de Florès, Corvo (380 habitants) se résume à un volcan, un cratère et un unique village blanc dominant la mer. Le bout du monde !

Punta de Tarifa (Espagne)

Punta de Tarifa (Espagne)
Punta de Tarifa © alexemarcel - stock.adobe.com

Voici l’une des extrémités de l’Europe les plus accessibles. À une demi-heure du port andalou d’Algésiras et 1 h 30 de Cadix, la Punta de Tarifa marque l’extrémité méridionale du continent européen. Un parage évocateur, précédé par une plage immense où véliplanchistes et kitesurfeurs profitent des vents s’engouffrant dans le détroit de Gibraltar.

De son extrémité, une chaussée soulignant l’ancien tombolo sableux s’avance : la Punta de Tarifa est là, formant un îlot plat encombré par les vestiges d’une citadelle et un phare – aménagé dans une ancienne tour de guet. Le site, un temps utilisé comme lieu de rétention des immigrants illégaux, a cédé la place en 2022 à un centre d’Interprétation mettant en valeur l’histoire humaine et naturelle du détroit.

Peñón de Vélez de la Gomera © ArtEvent ET - stock.adobe.com

À vrai dire, le pays ne se termine pas tout à fait ici… Outre les exclaves de Ceuta et Melilla sur la côte nord marocaine, restées espagnoles depuis leur conquête aux XVe-XVIe siècles, l’Espagne s’accroche aussi à quelques micro-îlots tutoyant le littoral : Peñón de Vélez de la Gomera (0,019 km² !), Peñón de Alhucemas (0,15 km²) et islas Chafarinas (0,5 km²). À chacun sa garnison ! Mais là, on est déjà géographiquement en Afrique.

Le + de routard.com :

Les visites du centre d’interprétation de la Punta de Tarifa doivent être réservées. Mais on vous remettra un certificat de visite du point le plus au sud de l’Europe !

Île de Gavdos (Grèce)

Île de Gavdos (Grèce)
Gavdos - chaise de Tripiti © gatsi - stock.adobe.com

Bien des îles s’avancent en Méditerranée, comme le micro-archipel italien des Pélages, face à la Tunisie. La plus méridionale, marinant dans des eaux d’un bleu délicieux, à 40 km au large de la Crète, par 34° 48’ 02’’ N, est cependant grecque : Gavdos.

À la pointe de Tripiti, dos à la mer, une inscription à la peinture blanche sur une chaise en bois très instagrammable l’affirme : Southern Point of Europe. Sur le côté, deux injonctions auxquelles on s’abandonne volontiers : Relax et Smile. Parfaitement dans l’esprit de cette île encore un peu hippie, restée en dehors des sentiers battus.

Gavdos - Plage de Sarakiniko © gatsi - stock.adobe.com

Des ferries lents et un peu irréguliers (vite annulés quand la mer enfle), aucun réseau électrique (juste des générateurs), quelques chambres et tavernes… et une foule de jeunes l’été, venus camper librement sur les splendides plages de Sarakiniko et Agios Ioanis, voilà Gavdos.

Sur ce gros caillou sec de 27 km², peuplé à l’année par moins d’une centaine de personnes, les clubs de vacances sont inconnus, l’eau turquoise, le maillot accessoire et l’ombre rare. Rien à voir, à vrai dire, juste une île à respirer et à méditer.

Le + de routard.com :

À Chypre, la base aérienne britannique d’Akrotiri pointe un poil plus au sud (34° 35’ N). Malgré son caractère militaire, on peut y accéder pour visiter le très ancien couvent de Saint-Nicolas-des-Chats – qui n’a pas usurpé son nom !

Île d’El Hierro (Canaries)

Île d’El Hierro (Canaries)
Mirador de Jinama - El Hiero © Neissl - stock.adobe.com

Encore plus au sud ? Ancrées à une centaine de kilomètres au large du Maroc, les Canaries, si elles appartiennent à la plaque continentale africaine, font assurément partie du monde européen. Des sept îles principales, la plus petite (269 km² pour 11 600 habitants), El Hierro, est aussi la plus éloignée de toutes et celle située le plus au sud.

Voilà une île attachante, abrupte, formée par un volcan dont le cratère s’est effondré côté nord, dessinant un demi-amphithéâtre très théâtral grand ouvert sur l’océan. Des crêtes sommitales (culminant à 1 500 m), les panoramas sont spectaculaires ! Les falaises, forêts des hauteurs, arbres tordus et champs de lave n’ont rien à leur envier.

Port de La Restinga © dudlajzov - stock.adobe.com

C’est le petit port de La Restinga qui, par 27° 38’ 27’’ N, remporte la palme sudiste – comme en atteste un drôle de monument en forme d’hélice de bateau.

Cette modeste station, résumée à une marina de poche et une plagette de sable noir, fait face à des fonds marins spectaculaires, protégés par la réserve marine Mar de Las Calmas. Pas si calme à vrai dire… En 2011 et 2012, à 2 km au large, une éruption sous-marine a fait bouillir l’Atlantique et rejeté une multitude de bombes volcaniques flottantes !

Lire aussi Canaries, quelle île choisir ?

Le + de routard.com :

Surplombant La Restinga, le Centro de Interpretación Vulcanológica s’intéresse aux phénomènes volcaniques locaux, images de 2011 et 2012 à l’appui.

Hattuvaara (Finlande) et Ayía Napá (Chypre)

Hattuvaara (Finlande) et Ayía Napá (Chypre)
Carélie © Fauren - stock.adobe.com

Si la limite orientale de l’Europe est généralement définie par les géographes au niveau de la chaîne de l’Oural (et, par extension, du cap Flissingksy en Nouvelle-Zemble), il y a peu de chances que vous puissiez vous aventurer dans le coin ces temps-ci.

Rabattons-nous donc sur le point le plus à l’est de l’Union européenne. En termes continental, c’est à nouveau vers la Finlande qu’il faut regarder, plus précisément dans l’attachante région de Carélie – dernier bastion orthodoxe du pays, tout de forêts profondes et de prairies.

Ayía Napá © Maciej - stock.adobe.com

Limitrophe de la Russie, la commune la plus orientale, Hattuvaara, possède d’ailleurs une adorable chapelle blanche consacrée aux saints Pierre et Paul remontant à la fin du XVIIIe siècle.

Pour atteindre le bout du bout, il faut encore parcourir une vingtaine de kilomètres de piste vers l’est jusqu’au Virmajärvi, un lac où la frontière, matérialisée par deux bornes dressées en vis-à-vis, passe par un minuscule îlot au centre du plan d’eau. Une promenade en bois permet de s’en approcher.

Îles incluses, c’est du côté de Chypre qu’il faut chercher l’extrémité orientale de l’Union européenne : à Ayía Napá, la principale station balnéaire de l’île.

Le + de routard.com :

Amateur de pique-nique en pleine forêt ? Un kota (abri avec foyer) a été installé peu avant le bout de la piste menant au lac Virmajärvi.

Et le centre de l’Europe, alors ?

Et le centre de l’Europe, alors ?
Dresde © art_zzz - stock.adobe.com

Le centre de l’Europe, c’est encore une autre histoire. Là, les candidats au titre suprême abondent. Pas facile à déterminer, ce centre, il faut dire…

Le premier à revendiquer l’endroit, dès 1775, fut un Polonais. Selon lui, c’est à Suchowola, tout à l’est, au début de la grande steppe centre-européenne, qu’il se trouve. Surprenant, alors que les cartes d’Europe n’intégraient pas encore la Russie, considérée comme trop « orientale »…

Au XIXe siècle, les Germains, grands calculateurs devant l’Éternel, s’y mirent à leur tour. Le centre de l’Europe ? À Dresde, juste à côté de la Frauenkirche, chef-d’œuvre baroque reconstruit à l’identique après-guerre, au dôme culminant à 96 m. Au mont Dyleň, en Bohême, préférèrent les Autrichiens de l’Empire (plaque à l’appui). Dans l’actuelle Ukraine, à Dilove, sur la rivière Tisza, dirent d’autres, s’appuyant sur un calcul mystérieux. Qu’importe, les Soviétiques confirmèrent. Très politique, tout ça.

Saaremaa © Ingus Evertovskis - stock.adobe.com

Peu à peu, chacun y est allé de son hypothèse : à Krahule en Slovaquie ; à Tállya en Hongrie (sculpture faisant foi) ; à Vitebsk, au proche lac Cho ou à Babrouïsk ont préféré les Biélorusses ; ou alors sur la belle île champêtre de Saaremaa, en Estonie, si l’on tient compte de toutes les îles d’Europe, jusqu’aux Açores. Et pourquoi pas carrément en Norvège, en incluant le Caucase et l’Arctique comme points de référence ?!

Peut-être plus honnête, l’IGN français, lui, a déterminé le lieu sur une base purement géographique : il s’agit des abords du lac Girija, en Lituanie, par 54° 54’ N et 25° 19’ E. Un compas y a été dessiné au sol et une colonne de granit blanc surmontée d’étoiles dorées dressée. Et pour mieux enfoncer le clou, un parc de sculptures contemporaines en plein air (Europos Parkas), étendu sur 55 ha, a été ouvert à proximité.

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