Le 1er mai : fête du travail pour tous (ou presque)

Le 1er mai : fête du travail pour tous (ou presque)
Muguet © corinne matusiak - stock.adobe.com

Le 1er mai prochain, de nombreux pays du monde célèbreront la fête du travail. Pour la plupart d’entre nous, ce sera l’ouverture du « mois des ponts », l’occasion de s’offrir du muguet ou de profiter d’une (belle) journée chômée. Les origines, l’histoire et la signification du 1er mai sont pourtant peu connues.
Pourquoi a-t-on choisi cette date ? Qu’est-ce qui unit, le temps du 1er mai, des pays aussi divers que la Belgique, la Finlande, la Roumanie ou le Laos ? Et d’où vient la tradition du muguet ? Le 1er mai, c’est une longue histoire, qui n’a pas toujours été de tout repos.

Le 1er mai : une origine américaine

L’idée d’une fête du travail voit le jour au moment de la Révolution française. En 1793, Fabre d’Églantine, ami de Danton, est le premier à instaurer une telle célébration dans le calendrier républicain au 1er pluviôse (fin janvier).

Paradoxalement, c’est outre-Atlantique qu’il faut aller chercher les origines du 1er mai, aux États-Unis, où ce jour n’a jamais été férié. En 1884, les syndicats américains se donnent deux ans pour obtenir la diminution de la journée de travail à huit heures. Il choisissent de lancer leur action le 1er mai, date à laquelle bon nombre d’entreprises entament leur année comptable.

En 1886, face aux réticences de leurs employeurs à diminuer le temps de travail, plus de 300 000 personnes font à nouveau grève. La manifestation, violemment réprimée, fait trois morts parmi les grévistes de la société Mac Cormick à Chicago. Au lendemain de cette répression, une marche de protestation est organisée. La place Haymarket est le théâtre d’un second drame : sept policiers sont tués et de nombreux manifestants blessés. Malgré l’inexistence de preuves, cinq syndicalistes anarchistes sont condamnés à mort et trois autres à perpétuité.

En 1889, les congressistes de la IIe Internationale, réunis à Paris, entrent dans la lutte pour la journée de huit heures. À l’instar de l’American Federation of Labour (AFL), ils fixent la date du 1er mai comme journée de leur revendication. Une manière de commémorer les événements de Chicago, symboles d’une répression qui n’a pas dit son dernier mot. En 1891, la manifestation du 1er mai à Fourmies, dans le nord de la France, s’achève avec le triste bilan de 10 morts et 35 blessés.

Et le 1er mai devint la fête du travail

Le 1er mai prend vite un caractère international et revendicatif. Les travailleurs continuent à se battre pour l’amélioration de leurs conditions de travail. Une lutte qui porte ses fruits. « L’adoption de la journée de huit heures ou de la semaine de quarante-huit heures » est ainsi fixée « comme but à atteindre partout où elle n’a pas encore été obtenue » par l’article 247 du Traité de Versailles, en 1919.

À l’initiative de Lénine, le 1er mai devient en 1920 une journée chômée en URSS. D’autres pays suivront peu à peu. En France, c’est sous la houlette de René Belin, un ancien responsable de la CGT devenu ministre de Pétain (sic), que le 1er mai devient chômé. Officiellement désignée le 24 avril 1941 fête du travail et de la concorde sociale, la fête des travailleurs est détournée dans le but de rapprocher les ouvriers du régime de Vichy. Petit détail, à l'époque la Saint-Philippe (prénom de Pétain) tombait le 1er mai...

Le gouvernement issu de la Libération fait finalement du 1er mai un jour férié, chômé et payé en 1947. Le 1er mai, qui retrouve tout son sens, est communément appelé la « fête du travail » depuis 1948. C'est, selon le Code du Travail, le seul jour obligatoirement chômé pour tous les salariés(toutes entreprises et catégories confondues).

Tour du monde des « 1er mai »

Que font nos voisins européens le 1er mai ?

- Jour chômé en Allemagne, en Belgique et au Luxembourg, le 1er mai est généralement ouvré aux Pays-Bas et en Suisse. Cependant, certaines entreprises et organisations internationales basées en Suisse accordent un jour de congé à leurs employés.

- En Italie, on fête le 1er mai avec, en prime, un grand concert sur la Piazza del Popolo à Rome, qui réunit près d’un million de spectateurs.

- Au Royaume-Uni, on se distingue : c’est le premier lundi de mai qui est férié et non le 1er mai qui reste chômé dans les pays de l’Europe de l’Est, tels que la Pologne et la Roumanie. Néanmoins, les défilés, auparavant imposés par leur grand frère soviétique, n’ont plus cours.

- Le Vappu, 1er mai finlandais, est férié et dignement, voire largement, célébré. Il est à la fois fête des étudiants, fête du travail, célébration de l’arrivée du printemps et survivance de vieux rites païens.

- À Moscou, les grandes festivités et les défilés de l’ère soviétique ont disparu, mais on continue à célébrer la « journée du printemps et du travail ».

- L’Amérique du Nord (États-Unis et Canada), quant à elle, ne fête pas le 1er mai auquel elle préfère le Labor Day, qui tombe le premier lundi de septembre. Cette fête du travail à l’américaine ne fait volontairement pas référence aux événements de Chicago et aux droits des travailleurs.

Chaque pays ou presque a sa fête du travail, généralement célébrée le 1er mai, même si quelques exceptions subsistent comme en Australie ou au Japon.

Des manifestations protocolaires sont organisées dans les pays de tradition communiste, comme le Laos. Le tout, assure-t-on, dans le respect des travailleurs.

Muguet et arbre de mai

L’histoire du 1er mai est aussi liée à l’arrivée du printemps. À qui doit-on cette fameuse tradition qui consiste à offrir un brin de muguet ? Les historiens en attribuent l'origine à Charles IX qui, en 1561, décida d’en offrir à chaque dame de la cour (certains parlent de lys de mai). On peut aussi faire remonter cet usage à la fête druidique de Beltaine qui marque le passage de la saison sombre à la saison lumineuse.

Chez les Romains, le 1er mai marquait l’apogée des célébrations en l’honneur de Flora, déesse des fleurs. Une tradition aux origines diverses et lointaines donc. Symbole de renouveau et du printemps, symbole de bonheur et porte-bonheur, le gazon de Parnasse annonce ainsi l’arrivée des beaux jours.

Le muguet n’a pas toujours été associé à la fête du travail. En fait, au début du 20e siècle, la tradition de vente du muguet voit le jour dans les rues de Paris pour célébrer le printemps. Le muguet est censé être une fleur porte-bonheur, symbolisant aussi l'amitié et l'amour. N'appelle-t-on pas aussi à l'époque « muguets » et « muguettes » les jeunes élégant(e)s ?

Au moment des premiers défilés, les travailleurs arboraient un triangle rouge symbolisant la division de la journée de travail en trois parties : travail, sommeil, loisirs. La fleur d’églantine supplanta ensuite pour un temps le triangle rouge avant de se voir voler la vedette par le muguet. La tradition ne va pas disparaître sous le régime de Vichy, qui voyait d’un mauvais œil l’églantine rouge trop associée à la gauche.

Autre tradition, l’arbre de mai est particulièrement répandu en Bavière. Il s’agit d’un autre rite lié à la venue du printemps. Fanfares et groupes folkloriques envahissent la place principale pour soutenir ceux qui vont de leurs mains hisser le mât de mai, qui atteint parfois les 30 m de haut. Après cette véritable épreuve de force, vient le réconfort : les participants et les spectateurs dégustent saucisses, bières et bretzels dans une ambiance bien guillerette.

Pour en savoir plus

Maurice Dommaget, L’Histoire du premier mai

L’arbre de mai, une fête européenne : www.2travelandeat.com

Texte : Florence Le Bourg

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