Œuvres complètes
Auteur : Bruce Chatwin
Editeur : Grasset
1532 Pages
Écrivain-voyageur par excellence, Bruce Chatwin a connu une fulgurante carrière. Cinq ouvrages ont en effet paru en une douzaine d’années, avant que leur auteur ne décède en 1989 à Nice, atteint du sida. Deux autres livres paraîtront après sa mort. Depuis sa naissance en 1940 à Sheffield, il n’a littéralement pas tenu en place. Enfant déjà, la guerre l’obligea à déménager sans cesse dans toute l’Angleterre. Il pratiqua le métier d’expert en art avant de devenir journaliste, profession dont il conservera les meilleures techniques narratives. Conteur par-dessus tout, Chatwin prend plaisir à mélanger choses vues et récits glanés sur les lieux par où il passe ou dans d’innombrables publications dénichées dans les bibliothèques. Réalité et imagination sont unies pour le meilleur par la grâce d’un maître de cérémonie inspiré qui semble constamment conserver son innocence, malgré tout ce qu’il vit et voit. À moins qu’il ne s’agisse du fameux flegme britannique… En Patagonie (1977), son premier livre publié, est d’une générosité rare. Les histoires s’y enchaînent en un tourbillon irrésistible. Deux romans succèdent à ce chef-d’œuvre. Le vice-roi de Ouidah (1980) nous plonge au temps de la traite des esclaves entre le Bénin et le Brésil. On y suit les aventures délirantes d’un trafiquant que Werner Herzog transformera en film avec Cobra verde. Après Les Jumeaux de Black Hill (1982), dont l’intrigue se déroule dans la campagne galloise, Bruce Chatwin part à la rencontre des aborigènes d’Australie dans Le Chant des pistes (1987). La culture complexe de ce peuple qui arpente continuellement ses territoires le fascine. Sans prétendre en avoir trouvé les clés, il s’en inspire afin d’entamer une profonde réflexion sur le nomadisme. On en lira la « suite » dans Anatomie de l’errance (1996), recueil de textes divers édités après sa mort. Le dernier travail de Chatwin publié de son vivant sera Utz (1988), roman dont le personnage principal est un collectionneur de porcelaine praguois. Enfin, Qu’est-ce que je fais là (1989) donne à lire les reportages de l’écrivain en Inde, en Russie, en Chine, à Paris… On sort étourdi de la lecture de ces œuvres complètes réunies en un seul volume. Ou plutôt, on n’en sort pas. N’est-ce pas le comble de l’écrivain-voyageur que d’habiter à ce point-là ses lecteurs ?
Consultez aussi notre dossier consacré à Bruce Chatwin.
Texte : Michel Doussot
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