Randonnées dans la vallée des Merveilles
C’est un petit bout de France, tout en bas à droite de la carte, aux confins de l’Italie, et qui ne fut d’ailleurs français qu’en 1947. À seulement 30 km à vol d’oiseau de la Côte d’Azur, la région montagneuse autour du village de Tende, à la limite sud du Parc national du Mercantour, semble loin de tout.
Pour s’y rendre depuis Nice, il faut emprunter la vallée de la Roya, berçant une rivière aux airs de torrent, qui achève sa course à Vintimille. En chemin, la Roya traverse hameaux et villages perchés : Tende, Saorge, La Brigue et Breil, où l’histoire a laissé chapelles de la Renaissance, cloîtres et clochers baroques.
Près de la frontière italienne, dans les hauteurs de Tende, se trouve l’un des coins les plus grandioses du Mercantour : la vallée des Merveilles – sans oublier sa copine Fontanalba – et ses 40 000 gravures rupestres de la Préhistoire tutoyant les sommets des Alpes. Un cadre unique pour des randonnées inoubliables. Cette vallée-là, unique et étrange, n’a pas volé son nom !
La vallée de la Roya jusqu’à Tende
Une vallée précédant l’autre, c’est celle de la Roya que vous emprunterez depuis la côte, en train ou en voiture, pour vous rendre aux Merveilles. L’un des plus beaux sites de l’arrière-pays azuréen, la vallée de la Roya, se trouve à cheval entre la France et l’Italie. Elle se remonte depuis Vintimille, et devient française au bout d’une quinzaine de kilomètres. La région a d’ailleurs longtemps été italienne, et le roi Vittorio-Emmanuelle II aimait venir y chasser. Ce n’est qu’en 1947 que la haute vallée, autour de Tende, est devenue française.
Premier gros village en remontant la vallée, Breil-sur-Roya, avec ses façades colorées, a d’ailleurs bien des airs d’Italie. Ne manquez pas le bel orgue en bois sculpté de l’église Santa-Maria-in-Albis.
À 9 km en amont, Saorge, l’un des plus beaux villages perchés de France, domine la vallée. Depuis ce nid d’aigle vertigineux, les maisons (XVe, XVIe et XVIIe siècle) aux toits de lauze, aux façades ocre ou bleutées, semblent suspendues entre ciel et terre. Avec ses fresques baroques, l’ancien couvent Notre-Dame-des-Miracles est un petit bijou.
Autre sanctuaire remarquable, Notre-Dame-des-Fontaines, située à côté de La Brigue, est surnommée dans la région la « chapelle Sixtine des Alpes-Maritimes », en raison de ses belles fresques.
Enfin, dernière halte avant le Piémont, Tende (photo), bâti en amphithéâtre au-dessus de la Roya, possède un caractère alpin. Ses hautes maisons suspendues aux toits de lauze semblent se superposer. La ruelle principale conduit à la collégiale, dont le clocher rouge vif domine les maisons.
Avant de monter vers la vallée des Merveilles, une visite au musée des Merveilles de Tende s’impose : très bien fait, il retrace toute l’histoire du site et présente des trouvailles archéologiques sur la signification de ses mystérieuses gravures.
Splendide vallée des Merveilles
Stupeur et tremblements. Comment ne pas être saisi d’une émotion intense devant le paysage grandiose, austère et minéral, de la vallée des Merveilles ? Situé entre 2 100 m et 2 700 m d’altitude, ce site isolé se mérite. Il n’est pourtant qu’à une dizaine de kilomètres de Tende et à 30 km à vol d’oiseau de la Méditerranée. Par beau temps, on aperçoit d’ailleurs la mer depuis la crête des montagnes qui encerclent la vallée.
Aucune route goudronnée ne conduit à la vallée des Merveilles. De Tende, il faut se rendre au lac des Mesches (10 km environ), en voiture ou en bus. Après, il faut pas moins de trois heures pour rejoindre le refuge des Merveilles, point de départ des randonnées. Mieux vaut donc être un bon marcheur. En haut, vous serez récompensé de vos efforts.
La vallée des Merveilles, c’est une myriade d’impressions. Un paysage chaotique de roches déchiquetées, aux teintes bleutées, rouges ou vertes. Des lacs de montagne aux eaux noires, bordés de tourbières et de moraines issues d’on ne sait quelle force tellurique. Devant la splendeur sauvage et mystérieuse de ce paysage, le randonneur se sent tout petit. Surtout lorsque souffle la bourrasque, et que le ciel se couvre de nuages noirs et menaçants.
Un lieu de culte toujours mystérieux
La vallée des Merveilles est devenue un sanctuaire à ciel ouvert il y a 5 000 ans. Au-delà de sa farouche beauté, le site recèle un inestimable trésor archéologique : quelque 40 000 gravures préhistoriques datant de l’âge de bronze et du début de l’âge du cuivre (3 200 à 1 700 av. J.-C.). Les grandes dalles de schistes de la vallée, polies par les glaciers, ont servi de support à un incroyable livre d’images gravées, malheureusement endommagé par endroits.
On attribue les gravures à des peuplades de Lombardie et de la plaine du Rhône, venues dans la région en quête de pâturages et de terres irriguées. Avec ses nombreux lacs et sources, la région a-t-elle fait figure de terre promise ? Le mont Bégo, autour duquel sont disposées les gravures, était-il une montagne sacrée ? Tout porte à le croire, mais rien n’est certain…
Représentant des bêtes à corne, des poignards et quelques visages humains (comme celui du Sorcier), les gravures symboliseraient, selon les archéologues, un culte de l’eau fertilisante (le taureau, dieu de l’orage) et de la Terre, la mère nourricière. D’autres y voient une représentation du cosmos. Des hypothèses, car la vallée des Merveilles est loin d’avoir encore livré tous ses secrets… Et c’est fascinant.
Vallée de Fontanalbe, la bucolique
Moins connue que sa voisine, la vallée de Fontanalba contient, elle aussi, nombre de gravures pétroglyphes. Ne manquez pas la superbe « Voie sacrée » et ses 20 mètres de dalles gravées s’élevant vers un terre-plein en forme d’autel.
Située au pied de l’autre versant du mont Bégo, Fontanalbe est à l’opposé de la vallée des Merveilles. Ni austère, ni minérale, elle offre un cadre verdoyant de pâturages, de lacs, et de forêts de résineux. C’est une vallée ouverte d’où l’on aperçoit la ligne des montagnes séparant la France de l’Italie.
Facile d’accès depuis le hameau de Castérino (1 h 30 de marche environ jusqu'au refuge), Fontanalbe (« la source blanche » en latin) respire la sérénité, dans une atmosphère pastorale. Et apaisante. D’aucuns, dans la région, la qualifient de féminine, complément parfait de la puissance du paysage des Merveilles. Bref, le cadre idéal pour les rêveries d’un promeneur solitaire.
Profitez-en pour admirer la faune et la flore. On compte pas moins de 2 400 espèces végétales et 190 vertébrés dans le parc. Au cours de la balade, il n’est pas rare de croiser chamois, marmottes, bouquetins, hermines, mais aussi aigles et vautours. Pour apercevoir le fameux loup du Mercantour, il faut, par contre, avoir beaucoup de chance.
En été, Fontanalbe, qui se trouve près de 8 mois par an sous la neige, se transforme en feu d’artifice végétal : outre les mélèzes et les sapins se reflétant dans les lacs, la nature y déploie une profusion d’edelweiss, de fougères, de pensées, de gentianes, de boutons d’or, d’orchidées et on y trouve même une minuscule plante carnivore, la grassette. Pas d’inquiétude, elle ne se nourrit que d’insectes !
Comment visiter les deux sites ?
Il faut le savoir : le site archéologique des Merveilles et de Fontanalbe est menacé. De nombreuses gravures sont endommagées et des visiteurs peu scrupuleux ont même volé des morceaux de dalles. Depuis 1999, cette partie du Parc National du Mercantour est protégée et classée Monument historique.
Des règles très strictes doivent être respectées pour la visite : il est interdit de randonner seul hors des sentiers autorisés. Il ne faut pas toucher les gravures, et les bâtons ferrés sont proscrits. De grâce, respectez ces consignes.
Pour accéder à l’ensemble du secteur protégé, il faut être accompagné d’un guide agréé. Il y a jusqu’à quatre visites de 2 h environ chaque été en groupe (15 personnes maximum). Il n’est pas nécessaire de réserver. Une formule que nous vous conseillons pour bien comprendre le site. Plus d’infos sur les horaires et les tarifs : vallee-merveilles.com et tendemerveilles.com. Sachez qu’il est également possible de bénéficier d’une visite personnalisée, en différentes langues, pour des groupes de 1 à 15 personnes maximum. Forfaits à la demi-journée : 150 €, à la journée 180 €.
Prévoyez également un bon équipement de montagne : les vallées des Merveilles et de Fontanalbe se trouvent à plus de 2 000 mètres d’altitude. Elles se visitent de début juin à octobre. Bonnes chaussures de randonnée, vêtements chauds et imperméables, protection solaire et gourde obligatoires.
Les sites sont accessibles en 3 h de marche depuis le lac de Mesches (pour les Merveilles) et 2 h depuis le hameau de Casterino (pour Fontanalbe). Nous vous conseillons de passer la nuit dans les refuges sur les sites, car plusieurs randonnées sont accessibles autour des Merveilles et de Fontanalbe (ascension du Mont Bégo, du Grand-Capelet, de la Cime du Diable…). Sinon, il est tout à fait possible de faire des excursions à la journée. Compter 8 h de marche en tout, visite guidée comprise. Possibilité de se rendre à la vallée en 4x4 avec chauffeur agréé (compter 4 h de marche, mais formule pas très écolo !).
On peut inclure la visite des sites dans une randonnée plus grande dans le Mercantour. En effet, le GR 52 traverse la vallée des Merveilles.
Fiche pratique
Pour préparer votre séjour, consultez notre fiche Côte d'Azur
Office du tourisme de la Riviera Côte d'Azur
Parc national du Mercantour
Office du tourisme Roya-Bévéra
Office du tourisme Tende-Merveilles
Toutes les infos pratiques pour visiter le site : tendemerveilles.com
Comment y aller ?
Nice est desservie quotidiennement par Air France et le TGV.
Depuis Nice, location de voiture conseillée pour explorer à sa guise l’arrière-pays.
Tende est desservie également en train depuis Nice, en TER, ou par le Train des Merveilles
Depuis Tende, service de bus vers le lac des Mesces et Casterino (ligne n° 923)
Accès à la vallée des Merveilles en 3 h de marche depuis les Mesces et à la vallée de Fontanalbe en 2 h depuis Casterino. Service de 4x4 également pour les plus paresseux (mais, vous êtes venus jusque là pour marcher, non ?).
Où dormir ? Où manger ?
- Refuge des Merveilles : 79 places de juin à fin sept ; réservation à l’avance conseillée. Toutes les infos sur www.cafresa.org . Pensez à imprimer le bon de réservation pour le remettre à votre arrivée. Pas d’eau chaude au refuge.
- Refuge de Fontanalbe : 41 places, dont 16 sous la tente.
- Neige et Merveilles : centre d’activités et de tourisme durable, près du lac des Mesces, à la Minière. Un bel endroit, géré de façon associative et situé sur un ancien site minier. Accueil et ambiance très sympas. Nuit et petit déj à partir de 21 €, fait aussi demi-pension.
- À noter également, Le Prieuré à Saint-Dalmas-de-Tende et Le Miramonti à Tende
Carte : IGN Vallée de la Roya-Vallée des Merveilles OT 3841 top 25.
A voir : Musée des Merveilles à Tende.
Texte : Jean-Philippe Damiani
Mise en ligne :