Il fait chaud ? Faites un tour sous terre : il y a de quoi faire ! Pour un peu de fraîcheur et des visites insolites... partons à la découverte de la France underground .
Des grottes, des églises, des caves, des égouts, des cachettes secrètes... Le sous-sol de la France est rempli de trésors cachés. Un patrimoine souvent bien exploité et merveilleusement mis en valeur.
Une occasion originale et décalée de renouer avec des légendes, l’Histoire et le savoir-faire (ou savoir-vivre !) astucieux de nos ancêtres. Et, surtout, de faire de chouettes échappées à quelques pieds sous terre.
Voici une sélection de 10 sites à explorer !
Gouffre de Padirac - Lot
L’un des hauts (bas ?) lieux de la France souterraine, avec près de 500 000 visiteurs annuels (en 2019). Il s’agit d’un puits naturel né de l’effondrement de la voûte d'une grotte. La légende veut que Satan s’y soit "engouffré" après avoir mis saint Martin au défi de traverser le gouffre d’un coup de pied. Avec force prières à Dieu, saint Martin parvint à le franchir. Les âmes emprisonnées furent libérées et le gouffre créé !
Plus sérieusement, c’est Édouard-Alfred Martel, père de la spéléologie moderne, qui, avec ses chaussures à clous et ses bougies, pénétra le premier à l’intérieur de la cavité, en 1889. "Il faut y entrer sans crainte, qui sait quelle surprise vous attend" dira-t-il plus tard. Plus de 103 m de profondeur !
On s’y balade aujourd’hui sur une petite barque, pour partir à la découverte de ses trésors, comme la fameuse Pendeloque, une stalactite de 60 m qui descend, descend, descend vers l’eau du lac de la Pluie.
La salle du Grand Dôme permet de découvrir tout simplement l’une des plus grandes voûtes d’Europe : plus de 94 m de hauteur ! Autre plaisir, la découverte des lacs de concrétion qui forment des paysages souterrains et aquatiques superbes.
Catacombes, crypte archéologique et égouts de Paris, carrières de Montmartre - Paris
Les sous-sols de Paris regorgent de surprises pour les amateurs de souterrains divers et variés.
Commençons par les catacombes, sur la place Denfert-Rochereau, dans le XIVe arrondissement. Une balade d’1,7 km (sur 300) à plus de 20 m sous terre, au milieu des ossements et autres vestiges de nos aïeux. En effet, c’est ici, dans les carrières qui servirent au XVIIIe siècle à construire Paris, que furent entreposés les vestiges des anciens cimetières parisiens. L’endroit ne désemplit pas (au sens propre et figuré). Memento mori ! Souviens-toi que tu vas mourir !
N’oublions pas la crypte archéologique du parvis de Notre-Dame (7, place Jean-Paul II, Parvis Notre-Dame, 75 004 Paris) pour comprendre l’évolution de la ville de Paris, de l’Antiquité à nos jours, en passant par le Moyen Âge. Instructif.
Enfin, ne manquez pas la visite du musée des Egouts de Paris (Pont de l’Alma, rive gauche, face au 93, quai d’Orsay, 75007). L’occasion de découvrir une ville sous la ville : chaque rue de Paris ayant son égout ! Ce système a été construit et imaginé par l’ingénieur Eugène Belgrand au milieu du XIXe siècle. Astucieux, en effet, car il repose sur un principe de gravitation. La pente permet donc l’évacuation "naturelle" de l’eau ! En une heure de visite, on découvre une portion des 2 400 km d’égouts parisiens, les moyens d’écoulement, d’approvisionnement d’eau potable et le recyclage des eaux usées.
Consulter notre guide en ligne Paris Voir les photos des catacombes
Site troglodyte de Jonas à Saint-Pierre-Colamine - Puy-de-Dôme
Bienvenue dans une véritable ville souterraine, avec son four à pain, ses chambres, ses latrines et, bien sûr, sa chapelle ! C'est à partir de 400 av. J.-C. que ce site montagneux fut creusé à la main par des fidèles. À l’époque médiévale, il compte environ 70 cavités.
Si l’ensemble de ces coins et recoins reliés les uns aux autres par des escaliers impressionne, on vient surtout pour les fresques du XIe siècle nichées dans la chapelle. On y retrouve Jésus sur les genoux de la Vierge, le reniement de Pierre, ou encore Jésus avec une couronne d’épines. Sublime !
Mais il s’agit surtout là du témoignage d’une technique originale, obtenue par réaction chimique de l’air avec des sels de chaux. Encore plus sublime !
Les mines participent également de la découverte des souterrains de l’Hexagone. Le bassin minier du nord de la France, qui s’étendait sur 120 km et mesurait à peine 12 km de large, offre depuis quelques années de nombreux exemples de sites reconvertis. Ils permettent de mieux appréhender et comprendre le quotidien et le travail réalisé au fond de ces mines de charbon.
À Lewarde, on peut ainsi se confronter aux chiffres. Plus de deux milliards de tonnes de charbon sur l’ensemble de la zone du Nord-Pas-de-Calais devaient être extraites en l’espace de plus de deux siècles. C’est en 1720 que la première veine de charbon fut découverte à Anzin.
En 1971, la fosse Delloye, qu’on peut ici visiter, fermait, faute de "matière première". Les cadences étaient terribles, avec plus de 1 000 mineurs, dont plus des trois quarts au fond, et un record d’extraction à 1 218 tonnes en un seul jour (contre une tonne les jours "normaux"). Entre 1930 et 1960, ce sont 30 millions de tonnes qui sont extraites sur tout le bassin.
Aujourd’hui, on a l’impression de "descendre" dans une mine encore en activité. On marche sur les pas des mineurs, avec les bruits, les ambiances, les techniques. Des expositions temporaires offrent des éclairages supplémentaires. Très instructif !
A signaler, toujours dans le Nord-Pas-de-Calais, les boves d'Arras, un réseau de souterrains construits sous la ville dès le Xe siècle et ouverts à la visite. Anciennes carrières de craie, les boves ont eu plusieurs fonctions au cours de l'histoire. Une fascinante découverte underground de la capitale de l'Artois !
La Cave aux sculptures de Dénezé-sous-Doué - Maine-et-Loire
L’un des sites les plus mystérieux de l’Anjou. Voici, sur quelques mètres, dans une cave, plus de 230 personnages, sculptés en ronde-bosse dans le tuffeau, qui dateraient, probablement, du XVIe siècle.
Certains vêtements, notamment des corsages de femmes, mais aussi des représentations de François 1er ou Catherine de Médicis, suggèrent ces pistes de datation. Les origines du site restent pourtant floues. Et la nature même de ces personnages, caricatures sculptées, tout autant !
En tout cas, ils permettent de croquer des traits, des allures ou des situations grotesques, voire olé olé et même blasphématoires, comme cette Pietà, tenant un Christ sur ses cuisses dénudées... Ô mon Dieu ! On peut aussi y voir une parodie d’un tableau de Michel-Ange.
La nature lubrique des scènes jouées par cette centaine de petits personnages a aussi pu inspirer les spécialistes, rappelant la position de ces bonshommes autour d’un puits, évoquant un potentiel rituel de purification en action. La farce pour échapper au Diable ? Peut-être. À vous de vous faire votre propre idée !
Pour les fans de patrimoine souterrain, sachez que le Maine-et-Loire vous gâte ! Ne manquez pas non plus les Cathédrales troglodytes des Perrières à Doué-la-Fontaine, d’anciennes carrières d’extraction de falun (sédiments marins) et d’habitat troglodytique.
Château et village souterrain de la Roque Saint-Christophe à Peyzac-le-Moustier - Dordogne
Il n’y a pas que les grottes de Lascaux dans la vallée de la Vézère ! Direction le village de Peyzac-le-Moustier, entre Les Eyzies et Montignac-Lascaux, pour apercevoir une falaise très étrange, sur plus d’un kilomètre, et qui n’est autre que le plus grand ensemble troglodytique d’Europe. Rien que ça !
Il est vrai que ce site est remarquable, ne serait-ce que par la durée de son occupation dans le temps, à flanc de falaise. Imaginez : de l’homme de Néandertal à 1588, date à laquelle Henri III décida de son démantèlement, la falaise fut habitée. Les cousins Cro-Magnon et ceux du Moyen Âge aménagèrent l’endroit.
Vous verrez dans les parois des trous, qui servaient certainement à soutenir les constructions, les façades et autres abris. Aujourd’hui, on peut grimper pour apercevoir les constructions et se rendre compte de l’état de cet habitat ingénieux dans les falaises. Au plus gros de l’occupation, on comptait jusqu’à 800 personnes dans ces creux de pierre.
On peut encore déceler un coffre-fort, des placards, des forges, des citernes, des fours… Il y avait, comme dans toute société, un ordre de grandeur empirique : les plus pauvres au bas de la falaise (paysans, manouvriers, etc.), commerçants au milieu et le seigneur au sommet. Le clou du spectacle reste la terrasse longue de 400 m, avec sa rue au fond de la paroi.
Musée de la Vallée de Saint-Ours-Bas - Alpes de Haute-Provence
La France souterraine, c’est aussi la force de dissimulation en temps de guerre. On cache son arsenal pour mieux surprendre l’ennemi. Dans la vallée de l’Ubaye, dans les Alpes de Haute-Provence, on peut découvrir ces vestiges d’anciennes cachettes secrètes de l’armée, disséminées de-ci, de-là, au gré des ballottements de l’Histoire. Pensez : l’Ubaye, depuis le XIVe siècle a changé 17 fois de "propriétaires" !
Près de Meyronnes, on peut aujourd’hui pénétrer dans ce qui fut surnommé un "sous-marin" dans la montagne, construit dans les années 1930. Ce fut un des ouvrages de la Ligne Maginot des Alpes, où des militaires ont exercé jusqu’en 2008.
Le site est construit sur trois étages de béton et de fer. On pouvait tout à fait y vivre reclus des semaines et des semaines, sans être vus. C’est d’ailleurs ce qui se passa durant la Seconde Guerre mondiale. Quand on passe tout proche, sur la route départementale 900, on ne voit rien ou presque. Il faut s’avancer pour vite partir à l’assaut de cette forteresse bien gardée, à la visite bien guidée.
Le souterrain de la Règle à Limoges - Haute-Vienne
Après la découverte de la spectaculaire cathédrale Saint-Étienne, rendez-vous dans un autre endroit tout aussi surprenant : les souterrains de l’abbaye de la Règle. Certes, cette abbaye, construite aux XIIIe et XIVe siècles, n’est plus, depuis 1966, mais ses souterrains sont restés !
C’est parti pour la visite d’une petite portion du réseau qui ferait environ 70 km, dans ces boyaux de pierre un peu bas de plafond. Gare à la tête ! Et claustrophobes s’abstenir.
Les légendes abondent en ces lieux. On raconte que le fantôme de Valérie, qui fut décapitée par son mari le duc Étienne, et dont le tombeau est niché dans la crypte Saint-Martial, errerait telle une âme en peine au milieu des pierres. Ouvrez l’œil, on ne sait jamais ! Dans la ville, d’autres sections des souterrains ont été réaménagées en caves creusées au cours du temps dans le tuf limougeaud, et utilisées – entre autres – comme raffineries pour le fromage.
À une quinzaine de kilomètres d’Amiens, une ville sous la ville (encore !). Ce refuge souterrain, à plus de 33 m sous terre, a été creusé dans la craie picarde, à partir du IIIe siècle après J.-C. On utilisait l’endroit au départ pour sa pierre. Ce seront en tout plus de 28 galeries et 2 000 m de souterrains creusés.
Par la suite, ce refuge permettra de se cacher et d’échapper aux guerriers. Certes. Mais une fois sous terre, comment les habitants pouvaient-ils bien vivre avec des températures si fraîches ? Tout simplement en faisant du feu dans leurs cheminées.
Et l’évacuation de la fumée ? Regardez bien. Vous apercevrez un astucieux système qui, invisible de l’extérieur, reliait les conduits de cheminée de ces cachettes aux cheminées extérieures des meuniers, "fondant" ainsi les fumées souterraines aux fumées de l’extérieur. Astucieux, non ?
Ces "muches" (cachettes), comme on les nomme en terre picarde, furent ensuite utilisées par les Français pendant la Première Guerre mondiale, puis par les Allemands pendant la Seconde. Elles se visitent aujourd’hui, avec un petit pull (environ 9,5 °C de température constante).
Nous connaissons tous le nom de Saint-Émilion, ce divin breuvage (à consommer avec modération toujours). Mais saviez-vous qu’une grande partie de son village "natal" est souterrain ?
Voici tout simplement une invitation à découvrir la plus vaste église souterraine d’Europe (38m de long pour 12 m de haut), autrefois sise sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Elle aurait été taillée par les moines bénédictins au XIIe siècle.
Autrefois ornée de décorations dans la nef, aux allures orientales, notamment dans ses dimensions et son plan, l’église offre encore quelques traces d’anges et autres décorations pour le moins surprenantes. L’ensemble est classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Fragile, elle ne se découvre que lors de visites guidées.
Sur la même thématique "souterraine", histoire de remonter le temps, faites la visite de la grotte de l’Ermitage de saint Émilion. C’est ici, dans cette grotte en forme de croix latine, que le fameux saint venait se réfugier au VIIIe siècle. Les bénédictins le rejoignirent et la prospérité des lieux ne fit que croître.
Le musée souterrain de la poterie, qui retrace la vie quotidienne des habitants de la région, de l’époque gallo-romaine à aujourd’hui, achèvera de vous charmer.