L'incroyable projet du Cinéfritour
Découvrez le périple et le projet Cinéfritour, trois zazous partis sur les routes en mini-van pour rencontrer les peuples de l'Est sur la route de la soie et pour vivre une aventure solidaire et responsable.
Pouvez-vous présenter le projet Cinéfritour aux internautes et par la même occasion présenter l'équipe ?
Le projet Cinéfritour est un mélange un peu fourre-tout. On y retrouve la volonté de voyager sans trop polluer avec l'utilisation d'huile de friture usagée, filtrée et mélangée au diesel comme carburant, l'envie de rencontrer des gens différents, mais surtout sympas à travers les expériences de volontariat chez l'habitant (type wwoofing), c'est aussi du cinéma itinérant avec la projection de films d'animation muets tous réalisés par des étudiants, c'est encore éveiller la curiosité sur le monde à travers le partenariat établi avec les élèves d'une école du nord Isère, et enfin la volonté d'expérimenter au maximum la pêche, la cueillette et l'élaboration de recettes grâce à ce que nous récoltons lors de nos pérégrinations.
Font partis du Cinéfritour, trois zazous, Elsa, 28 ans éducatrice, Marine, 27 ans professeur de FLE, et Adrien, 27 ans, critique gastronomique. Tout au long du trajet nous recevons la visite, plus ou moins longue, de nombreux amis qui se trouvent embarqués eux aussi dans l'aventure.
Comment est né ce projet ? Il vous a fallu combien de temps pour le mettre en place ?
Le Cinéfritour est né il y a trois ans en Géorgie, alors que nous voyagions déjà tous les trois en nous faisant la remarque qu'un mois et demi c’est bien trop court. Il nous a fallu attendre deux ans avant le décollage complet, sachant qu'on ne s'est pas trop pressés.
Pourquoi ce périple sur la route de la soie ?
À l'origine on voulait partir le plus à l'est possible avec un camion. Après quelques consultations des différentes procédures de visa et un rapide coup d'œil sur le prix des ferrys, l'itinéraire s'est imposé de lui-même. La route du retour a quant à elle évolué en fonction de l'actualité géopolitique.
Quels ont été les préparatifs pour mener à bien vos différentes expéditions ?
Il nous a fallu gagner de l'argent, acheter un camion, trouver un moyen de le remettre sur roues pour par cher, trouver des écoles d'animations partenaires pour les projections et une école élémentaire, se renseigner longuement sur les procédures administratives, réaménager le camion à notre façon (système de filtration d'huile et poêle à bois) et, le plus long, nous avons rédigé un dossier de présentation pour prétendre à des subventions...
Comment avez-vous budgété vos dépenses et par quel mode de financement ?
Nous avons réalisé un budget approximatif en nous basant sur le prix du carburant dans chaque pays, avec un budget alimentaire de 2,50 € par jour et par personne, en y incluant ensuite le prix du camion, des assurances et de quelques pannes possibles. Au total notre budget maximum était de 7 000 € par tête.
Nous avons tenté de trouver des sponsors, échec retentissant aussi bien auprès des entreprises de matériel technique que des collectivités territoriales. Nous y avons quand même passé beaucoup de temps et grâce à eux nous avons un très beau dossier !
Cinéfritour est donc un projet 100 % autofinancé.
Pouvez-vous nous dire ce que vous avez emmené lors de votre voyage ?
Plein de trucs pour ne pas s’ennuyer : une canne à pêche, de la peinture, une combinaison de plongée, de la mosaïque, des jeux de société, des livres, des outils, des habits d’hiver, des habits d’été, des livres, un ordinateur, des crayons de couleur, des perles, du matériel de couture, un appareil photo, un ukulélé, un mélodica et un harmonica dont on ne sait pas jouer, des cartes routières, un fusil harpon, un jeu de pétanque, une slackline, une tente, une trousse à pharmacie énorme, un vidéoprojecteur et son écran, un Opinel…
Comment votre entourage personnel et professionnel a-t-il réagi ?
Côté professionnel fastoche, on a tout fait pour avoir des CDD qui se terminent à la même période ! Quant à nos proches, ils ont l’habitude de nous voir voyager.
Que retirez-vous de ces expériences, ces rencontres ?
Bien évidemment on a rencontré des tas de gens accueillants, chaleureux, ouverts et généreux avec qui on a passé des tas de moments chouettes et re-chouettes, mais on ne peut pas dire ça sans dire aussi que : voyager c’est se confronter aux autres, mais aussi aux autres sociétés, c’est donc rencontrer physiquement la pauvreté, l’écart de richesse, la domination plus ou moins forte du monde occidental sur la quasi-totalité des pays visités.
Bouger, vadrouiller, crapahuter, barouder, rouler c’est se rendre compte de l’inégalité permanente qu’entraîne notre mode de vie au niveau international.
Voyager c’est prendre conscience que deux mois de travail en Suisse offrent la possibilité de se la couler douce pendant plus d’un an et demi en mini-van.
Rencontrer des gens c’est aussi devoir expliquer pourquoi, vous, vous avez le droit et la possibilité de voyager quand, eux, travaillent pour vous.
C’était la joyeuse tirade du Cinéfritour.
Quels sont vos coups de cœur ?
Le Kirghizstan pour ses paysages, mais surtout la Géorgie et la Roumanie pour la générosité des habitants et la tournure improbable que prennent les évènements. S’il fallait donner une ville ce serait Cluj-Napoca, la ville ou rien ne s’arrête. Le marché de Bichkek fut certainement l’un des meilleurs arrêts pour manger un bout.
Quels conseils pouvez-vous donner ?
La patience est la mère des vertus. Il faut être patient pour avoir son visa, il faut être patient pour esquiver le bakchich, il faut être patient pour traverser les frontières, il faut être patient en cas de panne, il faut être patient quand il pleut, il faut être patient pour cuisiner au feu de bois…
Avez-vous une anecdote de voyage ou une rencontre exceptionnelle à partager ?
Il y a à peine une semaine (ndlr, interview réalisée courant juillet 2015), en se promenant dans une rivière, Adrien est tombé nez à nez avec deux solides gaillards mitraillette au poing qui lui ont demandé de les suivre sans explication. Après quelques minutes et une conversation en russe hésitant il s’est rendu compte qu’il avait traversé la frontière ukraino-slovaque par mégarde. Il en a été bon pour passer 5 h au poste militaire et s’acquitter de 7,50 € d’amende !
Quels sont vos projets à venir ?
Elsa va peut-être repartir faire un service civique européen en Roumanie, Adrien et Marine ont le projet d’ouvrir une brasserie artisanale en Bretagne.
On termine par une question portrait chinois : Si vous étiez un pays… lequel, et pourquoi ?
La Bulgarie… mais non, la Géorgie bien sûr !
Retrouvez le Cinéfritour sur Internet !
Facebook : https://www.facebook.com/cinefritour
Texte : Cédric Duchamp de Routard.com
Mise en ligne :