Traditions et coutumes Îles Anglo-Normandes
Anglaises ou normandes ?
Pas tout à fait l’Angleterre, quelques touches de France : les îles Anglo-Normandes puisent leur charme et leur spécificité dans ce curieux mélange. Car si vous entendez parler anglais autour de vous, réglez vos achats en livres sterling ou allez vous rafraîchir d’une bière anglaise dans un pub, vous serez aussi étonné de constater que la toponymie et certaines expressions résonnent comme un français joliment suranné : « ruettes tranquilles », « Les Landes », « Bonne nuit Bay », « Bordeaux », « Ville au Roi », « La Seigneurie »...
L’histoire des îles est en effet imprégnée d’annexions successives par leurs deux puissants voisins. Les Vikings fraîchement maîtres de la Normandie ouvrent le bal en 933 lorsque Guillaume Longue Épée, duc de Normandie, intègre les îles à son territoire. Un peu plus d’un siècle plus tard, Guillaume le Conquérant assujettit la couronne d’Angleterre, qui devient normande.
Cependant, lorsque, en 1204, Philippe Auguste, roi de France, conquiert la partie continentale du duché de Normandie, les îliens choisissent de rester fidèles à l’Angleterre. En récompense, ils obtiennent leur autonomie, mais on sent déjà une franche inclinaison à préférer le voisin britannique... S’ensuivent quelques invasions françaises de courte durée (1380-1382, 1461-1468).
Mais c’est au XIXe siècle qu’a lieu le tournant décisif. Les progrès des transports (notamment avec le développement de la navigation à vapeur) désenclavent les îles et permettent à des Anglais de plus en plus nombreux de s’y installer, imposant petit à petit leur langue et leur culture. À Jersey, le français est tout de même resté la langue officielle jusque dans les années 1960.
Et malgré tout, quelques irréductibles résistent encore et toujours à l’envahisseur, en perpétuant l’usage des patois jersiais et guernesiais, notamment dans le domaine juridique. Ces dialectes sont issus d’un mélange de normand et d’ancien français...
Religion
Les îliens ont perpétué des croyances païennes jusqu’au début du second millénaire, encouragés notamment par les invasions des Vikings. Les paysages sauvages taillés dans le roc, les nombreux menhirs et dolmens dont l’origine reste parfois mystérieuse, ainsi que l’isolement géographique de l’archipel, qui a pendant longtemps laissé la population à l’écart des doctrines religieuses continentales, ont également entretenu la superstition, les mythes des fées et des sorcières... qui font encore aujourd’hui partie de l’imaginaire collectif.
Les îles ont été christianisées à partir du Ve siècle. Le protestantisme y a été introduit par décret sous le règne d’Edouard VI (1537-1553) puis, à la fin du XVIe siècle, les protestants venus de France pour fuir les persécutions religieuses y ont introduit le calvinisme, rapidement assimilé par une grande partie des îliens.
Aujourd’hui, si l’Église anglicane est dominante, on trouve également des lieux de culte catholiques et méthodistes sur chacune des îles (à Sercq, pas d’église catholique, mais un prêtre vient régulièrement y donner des messes).
Guernesey abrite même une curiosité : The Little Chapel (dans la paroisse de Saint Andrew), érigée en 1914 par un moine français, frère Déodat. Longue de 5 m large de 3 m, elle est l’un des plus petits lieux de culte catholique au monde. À tel point que sa consécration fut annulée, pour cause d’évêque trop corpulent pour passer la porte d’entrée...
Des crapauds et des ânes
De part et d’autre de la Manche, il y a les « frogs » (Français) et les « rosbifs » (Anglais). Mais dans les îles Anglo-Normandes, il y a aussi les « toads » (crapauds) et les « donkeys » (ânes).
Les habitants de Jersey et de Guernesey perpétuent une rivalité ancestrale qui s’est transformée avec le temps en gentille moquerie. Les premiers qualifient ainsi les Guernesiais et leur caractère bien trempé « d’ânes », tandis que les seconds appellent facilement les Jersiais « crapauds », rapport à ce charmant animal que l’on trouve à Jersey, mais pas à Guernesey !
Les habitants des autres îles ne sont pas en reste et possèdent aussi leur surnom dans le folklore local : les « vaches » à Aurigny, et les « corbeaux » à Sercq.
La « visite du branchage »
Une autre coutume surprenante à Jersey. Deux fois par an, début juillet et début septembre, des petits groupes d’officiels parcourent chacune des 12 paroisses de l’île pour mesurer la hauteur les branches qui surplombent les rues.
Et attention, les normes sont strictes ! Elles doivent s’élever au minimum à 12 pieds (3,66 m) au-dessus des routes principales, et à 8 pieds (2,44 m) au-dessus des sentiers. Malheur au propriétaire qui aurait oublié de tailler correctement ses arbres : il s’expose à une amende pouvant atteindre 50 £. C’est qu’on ne rigole pas avec l’entretien des routes, ici.
La clameur de haro
Cette tradition juridique insolite est héritée d’une coutume normande remontant au Xe siècle. Si elle n’est plus en vigueur en France depuis bien longtemps, on y a encore parfois recours sur les îles Anglo-Normandes.
À l’instant où un litige éclate, le plaignant peut, en présence du fautif et de deux témoins, tomber à genoux et s’écrier : « Haro, Haro, à l’aide mon prince, on me fait tort ! » (sic !). L’effet est immédiat : l’accusé se voit obligé de stopper aussi sec son offense, jusqu’à ce que l’affaire soit jugée en Cour royale.
Aujourd’hui, les rares clameurs de haro poussées sur les îles concernent des litiges fonciers.
Les tricots de Jersey
Les célèbres chandails de Jersey et Guernesey sont des vêtements solides et confortables. Le travail de la laine est pratiqué dans les îles depuis le XVIe siècle, et sa renommée est telle que Jersey a donné son nom à un point de tricot.
À l’époque, les habitants de l'île tricotaient pour les marins qui partaient pêcher au Groenland, contrée froide et lointaine où ils avaient besoin de vêtements chauds et résistants. On pouvait reconnaître l’origine des pêcheurs aux motifs de leur chandail : chaque île, et même chacune de leurs paroisses, avait sa propre marque de fabrique.
Ce petit commerce a vite pris de l’ampleur, l’Angleterre et la France se mettant à leur tour à commander bas et autres gilets en tricot dont ils appréciaient la qualité. Tant et si bien que les îliens ne se sont pratiquement plus mis qu’à tricoter, contraignant les autorités de Jersey à interdire par décret, en 1603, de le faire pendant la saison des récoltes ! L’activité a poursuivi malgré tout sa croissance, et il a fallu importer de la laine pour pouvoir continuer à répondre à la demande.
Si, aujourd’hui, cette industrie a perdu de son importance et que l’on n’élève plus de moutons pour leur laine, on continue d’en importer, et quelques entreprises confectionnent toujours les fameux pull-overs.
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