Festival d’Obon au Japon : le retour des morts vivants
Le festival d’Obon revêt une importance capitale pour le peuple japonais. Si, dans une minorité de régions de l’Est encore adeptes du calendrier lunaire, on l’a célébré au mois de juillet, c’est à partir du 7 août qu’il donnera toute sa mesure dans la majeure partie du Japon. Ce jour-là, les portes de l’enfer s’ouvriront, permettant aux défunts de revenir sur Terre pendant une semaine pour rendre visite à leurs proches. Ce festival, d’origine bouddhiste, offre une ambiance unique et étonne autant pour la communion qu’il provoque que par la richesse et la diversité de ses célébrations.
Préparez votre voyage avec nos partenairesUne légende bouddhiste à l’origine d’un rite spirituel
Le Japon n’est pas le berceau du bouddhisme. Loin de là. C’est sous l’influence de la Chine, puis de la Corée que le Japon a découvert, au VIe siècle, un bouddhisme pragmatique, basé sur la pratique plutôt que sur la doctrine, ne privilégiant la plupart du temps qu’un nombre limité de techniques spirituelles. Depuis, la culture bouddhiste est très présente aux Japon. Elle est dotée d’une forte orientation sociale et s’est développée en parallèle du shintoïsme, sorte de culte indigène de la nature et de divinités ancestrales. Dans le sillage du bouddhisme se sont logiquement imposées les fêtes et traditions qui accompagnent la pratique religieuse. Ainsi s’est fait connaître le festival d’Ulambana, dont l’origine remonte à l’histoire d’un moine bouddhiste dont la mère, disparue, ne pouvait supporter la souffrance du royaume des morts. Devant cet enfer, son fils fit de nombreuses offrandes aux prêtres bouddhistes qui sauvèrent la pauvre femme, l’envoyant au paradis. Le jeune moine se mit alors à danser pour célébrer l’événement.
Journées portes ouvertes en enfer
Obon est la version japonaise d’Ulambana (littéralement " le jour
des ancêtres ") : sa célébration dure une semaine. Précisons
qu’il sera cette année célébré, dans la majeure partie du pays, du 7 au
15 août. Une minorité de régions de l’est du Japon qui applique encore
le calendrier lunaire a fêté Obon en juillet dernier. Pendant sept jours, les
esprits des morts reviennent sur Terre pour rendre visite à leurs proches. Charmant
programme en perspective... Mais rassurez-vous, leurs intentions sont pacifiques.
Pendant toute la durée du festival, le rôle des familles sera de soulager ces
fantômes des souffrances de l’enfer, qu’ils tentent de fuir. Les familles disposent
de plusieurs rites censés non seulement libérer les esprits des défunts, mais
surtout leur faire apprécier leur retour parmi les vivants ! Chaque région
a ses propres chansons et danses qui incorporent les légendes locales. Il existe
autour de cette fête et de la célébration des esprits des morts une diversité
d’approches spirituelles sans égale.
De l’art de recevoir un fantôme au Japon
Le festival commencera avec l’installation des Shouryoudana, le 7 août.
Ces autels, dressés devant les maisons des familles pour faire bon accueil
aux âmes des ancêtres, sont ornés de toutes sortes de mets et de présents. Riz,
fruits et légumes, gâteaux, bonbons ou fleurs... Bien qu’il y ait une forte
tradition de dons de nourriture, il n’y a pas de règle stricte. Chacun peut
offrir ce que bon lui semble.
L’atmosphère spécifique d’Obon est directement liée à la principale activité
qui le rythme : la visite des tombeaux familiaux. À l’échelle nationale
ou au sein d’une ville, le phénomène est impressionnant. Les familles se rendent
tous les jours au cimetière et décorent tombeaux et stèles : lanternes
de papier et fleurs donnent à l’ensemble un aspect joyeux, accentué par les
groupes d’enfants qui font exploser des pétards.
La danse a un rôle capital dans la célébration des esprits des anciens. La danse
Fève-Odori a pour but de soulager l’esprit perturbé des ancêtres et a
lieu dans la majeure partie des parcs des villes, dans les rues, les cours d’école
ou tout autre endroit public. Chaque municipalité, chaque quartier même, définit
les dates de ces séances de danses collectives. À tout moment de la journée,
vous pourrez voir des danseurs former un cercle au milieu duquel joueurs de
taiko (tambours typiques du Japon) et chanteurs s’en donnent à cœur joie.
Dérivé moins gai mais plus mystique des danses dites traditionnelles, le Chankoko
est consacré aux familles dont un des membres est mort l’année précédente.
Les danseurs, accompagnés parfois des membres de la famille, portent des sous-vêtements
bleus et des chapeaux fleuris, et exécutent leur danse dans le jardin ou près
du tombeau familial pour ensuite arpenter les rues, battant un gong et un tambour,
en chantant. Pour assister à un Chankoko, pas de règle générale : chaque
ville et surtout chaque famille est libre d’organiser ces danses à n’importe
quel moment de la semaine. L’idéal reste de se renseigner auprès des mairies
à partir du premier jour du festival.
Au soir du 15 août débutera le fabuleux rituel des lanternes. Le rôle de
celles-ci, omniprésentes pendant l’ensemble du festival (elle guident les esprits
dans leur errance et leur permettent de retrouver le tombeau familial), prendra
alors un peu plus de consistance. Lors d’un cérémonial haut en couleur et riche
en émotions, les membres des familles japonaises déposeront sur un fleuve ou
sur la mer des lanternes de papier, blanches ou colorées. Guidés par ces lumières
bienfaitrices, les esprits pourront alors regagner l’au-delà, apaisés.
Pour en savoir plus
- Ambassade du Japon en France : chancellerie
et service consulaire, 7, av. Hoche, 75008 Paris. Tél. : 01-48-88-62-00.
Fax : 01-42-27-50-81. Internet : www.fr.emb-japan.go.jp.
- Maison de la culture du Japon à Paris : 101 bis,
quai Branly, 75740 Paris Cedex 15. Tél. : 01-44-37-95-00. Fax :
01-44-37-95-15. Internet : www.mcjp.asso.fr.
Cet institut propose des conférences, des expositions, bref une approche complète
de la culture du Japon.
Texte : William Royer
Mise en ligne :