Gringoland
Auteur : Julien Blanc-Gras
Editeur : Au Diable Vauvert
246 Pages
« Ma retraite cathodique était un échec. La télé ne rend pas seulement con, elle rend malheureux. J’en suis venu à penser que les derniers hommes étaient ceux qui se passaient de télévision. Je suis monté au premier étage de la tour Eiffel et j’ai balancé mon Philips coin carré. Le monde est vaste et accessible. J’ai vendu mon sofa et j’ai acheté un billet d’avion. »
Si Gringoland était un film, gageons qu’il ressemblerait à l’Auberge espagnole. Et que Valentin, le héros de Julien Blanc-Gras, aurait les traits de Romain Duris. Il y a cette nonchalance et ce charme des jeunes années, quoiqu’atténués par un regard acerbe et un humour des plus caustiques chez le héros. Ce jeune homme aime le foot (Saint-Étienne, période Rocheteau), les filles, la télé et sa chienne Charlotte. Cette même Charlotte devenue neurasthénique, il décide de tout plaquer et d’aller tâter du goût des choses à l’étranger.
Première étape : le Mexique. Puis viendront le Guatemala, Belize, Cuba, les États-Unis. S’ensuivent des rencontres, toutes plus colorées, plus épicées les unes que les autres. Néo-babas (le tendre Hollie, anglais au grand cœur) ou babas sur le retour (Robert le Vieux Cramé), vrais itinérants, ou l’Américaine Joana, à l’affût du scoop, toujours sous les sunlights, une Bridget Jones désespérément abandonnée.
Mais qu’est-ce que ce livre ? Un roman ? Un récit de voyage ? On pourrait y croire avec ces réflexions sur Marcos, sur Ciudad Juarez… Mais c’est bien plus. Une équipée au vitriol, un road-trip où No logo tient lieu de bible et s’essayer aux champignons hallucinogènes un passage obligé, et cette question lancinante : quoi de neuf sous le soleil depuis les revendications de mai 1968, ces rêves, ces utopies ? Valentin, notre héros, pose la question. N’y répond pas vraiment. Des rêves d’épanouissement en famille pointent à la fin du livre…
Et si tout était un éternel recommencement ? N’empêche, Valentin nous fait sourire, rire, réfléchir. Le ton est vif, enlevé et la dernière page tournée, on est presque triste de se quitter, comme des potes, à l’arrivée sur un quai.
Texte : Gavin’s Clemente-Ruiz
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