Le Siècle des nuages
Auteur : Philippe Forest
Editeur : Gallimard
558 Pages
Le grand rêve du XXe siècle s’est abîmé dans la guerre. À travers le destin de son père, Philippe Forest retrace l’histoire de l’aviation, reflet de « cette espérance entêtée et tragique en l’avenir ». « Nos yeux furent les premiers à voir / Les nuages plus bas que nous », écrivait Aragon. L’avion sert d’abord d’instrument à la conquête du ciel, avec sa « poignée de casse-cou » et leurs exploits : la traversée de la Manche par Louis Blériot en 1909, celle de l’Atlantique par Charles Lindbergh en 1927 ou les voyages de Jean Mermoz pour le compte de l’Aéropostale.
La Seconde Guerre mondiale dénature ce rêve, courrier et passagers cédant leur place aux bombes. S’échappant aux États-Unis via Casablanca, le père de l’auteur reçoit une formation de pilote de chasse. Le conflit s’achevant, ses talents sont aussitôt mis à contribution pour Air France, où il devient, en 1952, à 30 ans, commandant de bord. Dans cette décennie, la construction des premiers jets long-courriers, comme le Boeing 707, prépare « l’avènement aérien du tourisme de masse ». Les hôtesses de l’air incarnent alors « un nouvel idéal érotique », « comme si à travailler dans le ciel, on devenait nécessairement plus légère et plus libre ». Avec l’inauguration de son aérogare Sud en 1961, Orly se prête aux sorties du week-end, pour y assister aux décollages ou flâner dans les boutiques.
Dans ce roman très documenté, qui tient davantage de l’essai biographique, voire historique, Philippe Forest survole le siècle écoulé avec un regard doux-amer. De quoi donner envie de pratiquer la vie comme le tourisme, « l’art de jouir du monde en passant ».
Texte : Joël Métreau
Mise en ligne :