Lyon gourmand

Lyon gourmand
Rosette de Lyon © EMBorque - stock.adobe.com

La table à Lyon fut longtemps à l’image de ces fameux bouchons où l’on servait les plats traditionnels locaux : andouillette, saucisson chaud, quenelles... Du consistant, pour une clientèle de travailleurs.

Les temps ont changé, même s’il existe encore des lieux vraiment typiques. Dans les restos, une seconde génération de chefs a poursuivi la tradition, en l’épurant ou en la magnifiant. Puis une troisième est arrivée, souvent plus créative, qui fait dans le locavore, le simple, le bon, dans un cadre moins chargé de souvenirs. Ils ont repris le flambeau, avec une certaine sagesse dans les prix et un sens de l’accueil retrouvé.

Lyon est une des villes de France où l’on a vu le plus éclore de nouveaux talents, en vingt ans. État des lieux.

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Lyon à table : entre classicisme et innovations

Lyon à table : entre classicisme et innovations
Bouchon lyonnais Daniel & Denise © Julien Bouvier - Daniel & Denise

Ce n’est pas un scoop : on mange fort bien aujourd’hui à Lyon, à des prix inférieurs à ceux pratiqués à Paris, dans des cadres souvent remarquables, quand ce n’est pas en pleine rue, en terrasse ou à l’un de ces food trucks qui cartonnent. C’est d’ailleurs réjouissant de voir que la ville s’est engagée sur la voie d’une cuisine ouverte aux saveurs du monde qui réconcilie les sexes, les âges et les populations.

L’ouverture en 2019 de la Cité de la Gastronomie, à l’intérieur de l’Hôtel Dieu, entièrement rénové, le long des quais, va redonner vie à toute une partie de la Presqu’île. Encore faudra-t-il pour retenir les gourmets qu’elle puisse accueillir autre chose que des ateliers ou des boutiques de luxe. Sinon, ce sont d’autres quartiers qui vont profiter de la formidable vitalité de la cuisine lyonnaise, qui a su s’ouvrir aux influences du monde, sans perdre sa spécificité.

Aujourd’hui, ce sont les quartiers de la Croix-Rousse, de la Guillotière, de Gerland ou de la Confluence qui attirent les jeunes, pour les petits prix, la vie de quartier, les nouveaux espaces ou les architectures qui décoiffent. Street food ou cuisine d’humeur d’un côté, terrasses avec vue et world  food de l’autre.

Tout cela n’empêche pas de s’engouffrer dans un des bouchons traditionnels pour se faire la totale. Certains ont été repris par des Meilleurs Ouvriers de France, gage de qualité. On aime bien ceux de Joseph Viola (Daniel & Denise) où l’on retrouve, en salle et dans l’assiette, tout l’art de vivre lyonnais.

Un dernier conseil : la plupart de ces tables étant de véritables institutions, dotées souvent de peu de couverts, il est quasi indispensable de réserver, surtout le soir et le week-end !

Un Lyon culinaire qui bouge bien

Un Lyon culinaire qui bouge bien
© Victoire et Thomas

Les Lyonnais ont tous leur quartier préféré. Le temps n’est plus où certains, nés dans le Vieux Lyon, ne voyaient pas l’intérêt d’aller passer le pont pour tenter l’aventure en terre inconnue, surtout du côté de la Croix-Rousse.

Discrédité par ses adresses pour touristes, le Vieux Lyon a vu de jeunes chefs lui redonner vie et saveurs, comme Jérémy Galvan, dans le resto chic qui porte son nom, ou Grégory Cuilleron (Les Cinq Mains).

Sur la Presqu’île, en attendant la Cité de la Gastronomie, on assiste à un chassé-croisé de jeunes chefs, sous le regard d’un Thomas Ponson imperturbable, qui a une rue quasiment toute à lui. Coup de cœur pour deux nouveautés qui donnent le ton de l’époque : L’Établi, dans le quartier d’Ainay, et Victoire et Thomas, près de l’Opéra. Joyeux, audacieux, rigoureux, savoureux… des restos dont on ressort heureux.

Côté Croix-Rousse, Balthaz’art et sa cuisine centrée autour du produit se voit concurrencé, côté fréquentation, rue des Pierres-Plantées, par un resto qui propose un brunch tous les jours, Les Déjeuneurs.

© Berzerker - Potager Gerland

Quant aux historiens, ils se demanderont peut-être un jour ce qui aura fait du 7e arrondissement, si mal coté naguère, la nouvelle « Croix-Rousse ». Des petits restos-bars-coffee shops sympas à tous les coins de rue ou presque, où l’on traîne devant son ordi et un café avant de revenir à l’heure de l’apéro et plus tard pour un vrai plat, ou plus si affinités.

On est ici dans un nouvel univers de coolitude gourmande, où l’on transgresse les codes aussi bien de la cuisine lyonnaise que de la cuisine asiatique. Allez faire un tour à l’Indo Café ou réservez auprès d’Ishida, un japonais atypique et bordélique génial (En Mets fais ce qu’il te plaît).

Demain c’est à Gerland que tout se passera. Dans ce quartier en mutation, on trouve déjà des tables comme le Potager Gerland, transplanté dans une ancienne halle aux allures de loft industriel. On se presse autour du bar ou sur les banquettes bleu canard pour se régaler de tapas à la lyonnaise ou d’une cuisine de saveurs parfois osées.

Un tour aux Halles de Lyon

Un tour aux Halles de Lyon
Saucisson brioché © Emmanuel Auger - Maison Sibilia

Une poche de béton, qui éclate de vie quand on est à l’intérieur, c’est ça les Halles de Lyon. Parmi les maisons les plus recommandables, pour les fous de charcuterie lyonnaise, citons un grand classique qu’on retrouve sur les tables estampillées Bocuse (qui prête son nom à ces halles) : la Maison Sibilia. Derrière la reine du saucisson à cuire, voilà un petit bar-restaurant qui a une sérieuse tendance à empiéter sur l’allée. Premier d’une série à vous proposer tétine de vache ou quenelles de brochet. Un plat que vous propose également la Maison Giraudet.

Et si vous logez chez des amis, ou en appartement, faites des provisions de bouche pour le soir. On ne présente plus la charcuterie Bobosse. Andouillettes, caillettes, saucissons, tout est bon.

Fromages sur un marché © Bruno Bernier - stock.adobe.com

On ne mange pas que de la cochonnaille ou des quenelles à Lyon ! Le dimanche midi, le monde se presse autour de l’étal de la Maison Rousseau. Cette institution propose des plateaux de fruits de mer. S’il y a trop de monde, vous avez le choix parmi les concurrents. Merle, écailler. Cellerier, écailler. Chez Léon, écailler. Chez Georges, bar à huîtres... Mais prenez le temps de tourner plusieurs fois dans les allées, vous êtes dans l’un des plus beaux marchés de France, pas spécialement bon marché tout de même.

Pour les amateurs de fromages, rendez-vous chez la très médiatisée Mère Richard et la Maison Mons, qui conditionnent aussi les fromages sous vide.

Allez faire un tour aussi sur les marchés : celui du quai Saint-Antoine, vivant, surprenant, ou celui de la Croix-Rousse, attachant, bon enfant. Les marchés sont des lieux de haute importance à Lyon. Ici, on ne plaisante pas avec la fraîcheur des produits, c’est le point de départ de la cuisine, la trame de toute l’histoire culinaire.

Les classiques de Lyon : rosette, gras-double, quenelles…

Les classiques de Lyon : rosette, gras-double, quenelles…
Quenelles © ALF photo - stock.adobe.com

À Lyon, le jésus désigne un gros saucisson emmailloté comme le divin enfant dans la crèche. Quant à la rosette, on ne vous la présente pas, c’est la Légion d’honneur de Lyon, selon Boris Vian. On adore aussi le saucisson brioché, bien sûr. Quant au cervelas, proposé nature, pistaché ou truffé, il se déguste chaud ou froid, accompagné de pommes vapeur.

Après les amuse-gueule, passons aux choses sérieuses : le tablier de sapeur c’est juste de la tripe, pas grasse du tout, marinée au vin avant d’être panée et frite. Il est servi avec une sauce béarnaise. Quant au gras-double, autre grand classique du mâchon lyonnais, c’est encore de la tripaille, servie à la lyonnaise avec des oignons. L’andouillette locale, composée de fraise de veau grossièrement hachée, arrive coupée en tronçons, baignant dans une crème moutardée et accompagnée de pommes sautées.

Passons à des choses plus légères. La quenelle (prononcer « k’nelle ») est une préparation  à base de semoule de blé dur, de lait et d’œuf, à laquelle on ajoute du brochet, du veau ou de la volaille. Elle est servie avec une sauce nantua (à la béchamel et à l’écrevisse).

Pour vous rafraîchir (mais pas forcément l’haleine), goûtez la cervelle de canut, fromage blanc auquel on incorpore de l’ail, de la ciboulette, du persil et de l’échalote hachés. Si vous n’avez peur de rien, testez le fromage fort.

Et pour finir, une tarte aux pralines devrait vous faire voir la vie en rose : c’est en fait une pâte sablée nappée de crème fraîche et de pralines roses.

Lyon, capitale du chocolat

Lyon, capitale du chocolat
"Vices" présidents © Matthieu Cellard - Bernachon Chocolatier

À Lyon, chacun se doit d’avoir son chocolatier préféré. À tout seigneur, tout honneur, les Lyonnais amoureux de la tradition vont chez Bernachon. La maison fait son propre chocolat, comme Sève, qui a ouvert son propre musée du chocolat, aux portes de Lyon, pour qui on a craqué.

Cet espace de 1 500 m2, très « indus » dans l’esprit, nous fait découvrir le produit tout en jetant un œil à l’atelier à travers les vitres. Du gris, du rouge, du verre. Un décor moderne et brut, où la muséographie invite à la connaissance, avant même la dégustation. Richard Sève et sa femme Gaëlle sont des voyageurs gourmands qui ont rapporté des pièces uniques, joliment mises en lumière pour rendre au décor industriel un peu de l’âme qui lui aurait manqué sinon. Arômes des fèves torréfiées et de cacao, bruit des machines, film qu’on regarde installé sur un sac de fèves... on assiste de loin à la transformation de la fève de cacao en pâte de chocolat, en goûtant à chaque étape. Fort en goût, fort en tout.

À Lyon, vous trouverez une boutique Sève aux halles, tout comme la maison Richart, lyonnaise d’origine. D’autres noms vous seront vite familiers : Voisin, dans la presqu’île, Bouillet, à la Croix-Rousse, qui a ouvert à côté de sa boutique un coin « Goûter » joliment nommé. Ou encore Bernard Dufoux, dont la maison mère est dans le Charolais.

Lyon et le beaujolais

Lyon et le beaujolais
Vignes à Montmélas © Gaelfphoto - stock.adobe.com

Autre temps, autres mœurs… Au 14e s,  le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, avait fait arracher toutes les vignes plantées en gamay. Mais comme le gamay a su résister au gel, au phylloxera et aux hommes, le cépage maudit est redevenu le cépage roi. Cépage très productif, rustique et résistant, c’est bien le seul à pouvoir répondre présent sur le sol en majorité granitique du Beaujolais, où rien ne pousse.

Le beaujolais est à 99 % un vin rouge, qui produit environ un million d’hectolitres répartis en trois grandes familles d’AOC : en bas de l’échelle, une AOC régionale, le beaujolais (c’est le vin le plus commun, la moitié de la production en fait). Au premier étage, une AOC villages : le beaujolais-villages (un quart de la production) ; et au sommet, une AOC qui rassemble les 10 crus que tout bon buveur connaît et qui se partagent le dernier quart de la production : brouilly, chénas, chiroubles, côte-de-brouilly, fleurie, juliénas, morgon, moulin-à-vent, régnié et saint-amour.

Sachez que l’on ne prononce jamais le « s » final d’un cru du Beaujolais. On dit « juliéna » et non « juliénas », « chéna » et non « chénas ». La France boit un peu plus de la moitié de la production totale de la région, le reste est exporté.

Beaujolais nouveau © hcast - stock.adobe.com

Et le beaujolais nouveau, alors ? Boire un vin jeune est une habitude ancienne. Ce qui est nouveau, c’est en fait de boire des vins vieux ! Mais rien ne serait arrivé si, il y juste cinquante ans, un certain René Fallet n’avait pas écrit un bouquin resté dans les mémoires lyonnaises : « Le beaujolais nouveau est arrivé. »

Au fil des décennies, l’habitude de faire la fête le 3e jeudi de novembre est entrée dans les mœurs, pour le plus grand bonheur des vignerons : environ 40 % de la production est exportée, majoritairement en Asie. Mais seuls les vins vinifiés en primeur ont le droit de porter cet adjectif et d’être mis sur le marché à partir du 3e jeudi de novembre. Le reste de la production ne diffère en rien de celle des autres régions viticoles.

Fiche pratique

Retrouvez toutes les bonnes adresses et les infos pratiques dans le Routard Lyon en librairie

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Office du tourisme de Lyon

Comment y aller ?

Lyon est reliée plusieurs fois par jour à Paris-Gare de Lyon en TGV, ainsi qu’à d’autres villes de France.

Nombreuses liaisons aériennes vers Lyon Saint-Exupéry avec HOP! et Air France au départ de plusieurs aéroports français et européens.

Bonnes adresses 

Daniel & Denise Saint-Jean : 36, rue Tramassac, 69005. Sous la houlette de Joseph Viola (MOF), l’une des institutions de la gastronomie locale, qui ne s’endort pas sur ses lauriers. Une bonne adresse pour déguster les grands classiques.

L’Établi : 22, rue des Remparts d’Ainay, 69002. Du local, en toute simplicité, joyeux, audacieux, savoureux et rigoureux. Le renouveau de la Presqu’île, il est là ! Menu midi 24-28 €, soir 34-49 €. 

Victoire et Thomas : 27, rue de l’Arbre-Sec, 69001. Savoureux, chaleureux, inventif et sympa, avec un bon choix de vins au verre. Carte env 35 €. 

En Mets fais ce qu’il te plaît : 43, rue Chevreul, 69007. Une table sous influence japonaise créative et exceptionnelle. Midi formule à 25 €. Soir 38-48 €.

Balthaz’art : 7, rue des Pierres-Plantées, 69001. Une adresse qui ne désemplit pas à la Croix-Rousse pour une cuisine actuelle qui met en avant les produits. La carte change tous les deux mois. Menus 29-34 €.

Le Bistrot du Potager Gerland : 83, rue de Gerland, 69007. Dans une ancienne halle aux allures de loft, des tapas à la lyonnaise et une cuisine aux saveurs parfois osées. Formule tapas 25 €. 

Jérémy Galvan Restaurant : 29, rue du Bœuf, 69005. L’une des excellentes tables de Lyon, pour une cuisine d’auteur, personnelle et maîtrisée, concoctée par un chef étoilé. Menu déj 33 €, le soir 65-105 €.

Marchés

Halles de Lyon – Paul-Bocuse : 102, cours Lafayette, 69003. Mar-sam 7 h-19 h (22 h 30 pour les restos), dim 7 h-13 h (16 h 30 pour les restos).

- Le marché du quai Saint-Antoine : il se prolonge sur le quai des Célestins. Tlj sf lun 6 h-13 h (13 h 30 ven-dim).

- Le marché de la Croix-Rousse : boulevard de la Croix-Rousse, 69004. Tlj sf lun 6 h-13 h (13 h 30 ven-dim). Marché bio sam.

Chocolats

Bernachon : 42, cours Franklin-Roosevelt, 69006.

Richart : 35, cours Franklin-Roosevelt, 69006 (en face de Bernachon !).

Pâtisserie Bouillet : 15, place de la Croix-Rousse, 69004.

Voisin : plusieurs adresses à Lyon. Dans la presqu’île : 24, place des Terreaux ; 28, rue de la République ou 11, place Bellecour.

Bernard Dufoux : 15, rue des Archers, 69002.

Sève Chocolatier : halles de Lyon, 102, cours Lafayette 69006, et 29, quai Saint-Antoine, 69002.

MUSCO (musée-manufacture du chocolat) : 324, allée des Frênes (parc du Puy d’Or), 69760 Limonest. À 13 km au nord de Lyon.

Texte : Gérard Bouchu

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