Rome, ville de cinéma
Rome et le cinéma, c’est une longue histoire d’amour… La capitale italienne est sans aucun doute l’une des villes les plus cinématographiées avec Paris et New York, servie par des réalisateurs italiens mais aussi étrangers, américains surtout, en quête d’une Ville Eternelle de carte postale. Quels sont les lieux liés au cinéma à Rome ? Réponse en forme de balade à travers les quartiers de la Ville éternelle, des mythiques studios de Cinecittà à la fontaine de Trevi de La Dolce Vita.
Préparez votre voyage avec nos partenairesCinecittà : visiter les mythiques studios de cinéma de Rome
Qui dit Rome et cinéma pense forcément à Cinecittà. L’histoire de Cinecittà est intimement liée à celle de Federico Fellini qui y tourna (au fameux « Teatro 5 ») la plupart de ses films, comme La Dolce Vita (1959), Huit et demi (1962), Satyricon (1969), La Cité des femmes (1979), Et vogue le navire (1982) et le crépusculaire Intervista (1987) où le réalisateur papote sur le cinéma et…Cinecittà.
Ce studio a été inauguré en 1937 pour contenter la mégalomanie fasciste qui souhaitait rivaliser avec les Américains. Finalement, clin d’œil de l’histoire, Cinecittà doit sa renommée à… Hollywood qui y délocalisa ses péplums dans les années 1950, Quo Vadis (1951) de Mervyn Le Roy, Ben-Hur (1959) de William Wyler ou Cléopâtre (1963) de Joseph L. Mankiewicz entre autres. Plus de 3 000 tournages y ont élu domicile.
Situé au sud-est de Rome, Cinecittà est ouvert à la visite (15 €). Il se trouve via Tuscolana, dans le quartier de Don Bosco cher à Pier Paolo Pasolini (Anna Magnani y habite dans Mamma Roma, 1962), pas très loin du parc des aqueducs et de l’aqueduc de l’Aqua Claudia (que l’on voit dans La Grande Bellezza, La Dolce Vita, To Rome with Love ou Mamma Roma).
Accueilli par la grande Mona (statue du film Casanova, 1975, de Fellini), on se balade parmi les décors de carton-pâte (Rome Antique, temple de Jérusalem et Florence de la Renaissance) de cette belle endormie longtemps laissée aux mains des chaînes de télévision (à partir des années 1970) et qui a retrouvé une seconde jeunesse grâce aux séries (Rome, The Young Pope, The New Pope).
Infos pratiques pour les visites sur le site de Cinecittà
La Rome de Fellini
Principal ambassadeur de la ville, Federico Fellini a mis Rome à toutes les sauces.
Il y a bien évidemment La Dolce Vita, sa horde de paparazzi désœuvrés de la via Veneto (reconstruite à Cinecittà et bien plus survoltée que l’originale), l’étreinte mouillée entre Anita Ekberg et Marcello Mastroianni dans la fontaine de Trevi (bien moins fréquentée, elle, que l’originale) et celle plus dansante dans les thermes de Caracalla (10€) transformés en dancefloor.
Mais aussi Fellini Roma (1971), patchwork de souvenirs et de saynètes, dans les entrailles de la ville lors de percées pour la construction du métro ou à moto du Castel Sant'Angelo (12€) jusqu’au Colisée (16€ avec le forum et le mont Palatin) en passant par la piazza del Popolo (qui connaîtra son heure de gloire dans Nous nous sommes tant aimés, 1974, d’Ettore Scola).
Mais deux endroits semblent particulièrement chers au cœur du maestro : la via Veneto, déjà citée et arpentée par Giulietta Masina dans Les Nuits de Cabiria (1957) et la gare de Termini qui apparaît dans Le Cheik blanc (1952), Les Vitelloni (1954), Les nuits de Cabiria et Fellini Roma.
Rome vue par Hollywood
Les réalisateurs outre-Atlantique ont souvent enfermé Rome dans ses clichés. Si on ne peut résister au couple Audrey Hepburn/Gregory Peck, Vacances romaines (1952) de William Wyler se regarde comme un clip publicitaire : Audrey attendant Gregory une gelato à la main piazza di Spagna ; Hepburn conduisant fort maladroitement une Vespa dans les rues de Rome, la Bocca de la Verità (dans l’église Sainte-Marie in Cosmedin), ainsi que la très florale et arty Via Margutta (Mario Camerini lui consacra un film éponyme en 1962), le Colisée, et le Vatican.
Justement, dans une production plus récente, le grandiloquent Anges et Démons (2009) de Ron Howard, le Vatican est la cible d’une attaque des Illuminati. La ville-Etat ayant opposé une fin de non-recevoir, la place Saint-Pierre a été reconstruite à l’identique en… Californie.
Dans le James Bond Spectre (2015) de Sam Mendes, c’est sur les rives du Tibre qu’on joue au casse-cou lors d’une course poursuite.
Et puis Woody Allen reprend à son compte le catalogue des splendeurs de la ville dans son To Rome with Love (2012). Un carabinier en faction piazza Venezia, une visite du Colisée, une intrusion nocturne dans les thermes de Caracalla... tout y est.
Rome : les quartiers du néoréalisme
La France a eu sa Nouvelle Vague. L’Italie son néoréalisme, maintes fois territorialisé à Rome. Thématiques sociales, recours à des acteurs non professionnels, tournage en extérieur pour croquer le réel, fuir les studios et les jeux plus formatés.
Le vrai point de départ du néoréalisme a été le film, Rome, ville ouverte (1945) de Roberto Rossellini bien que l’on date à Ossessione (1943) de Luchino Visconti, les débuts de ce courant cinématographique. La scène culte où Anna Magnani est fauchée par un tir allemand a été tournée dans le Pigneto, à l’est de Rome, via Montecuccoli. Ce quartier, qui n’a plus grand-chose à voir avec son lointain passé ouvrier, est désormais très prisé d’une jeunesse alternative.
Le Pigneto apparaît également dans Accatone de Pier Paolo Pasolini, dont le souvenir flotte encore sur différents quartiers de Rome, des faubourgs populaires à l’EUR où il vécut, en passant par la gare Termini ou la plage d’Ostie où il fut assassiné.
Au scénario de ces œuvres désespérées, on trouve souvent l’écrivain Cesare Zavattini, partenaire privilégié d’un autre chantre du néoréalisme, Vittorio De Sica (Umberto D., Sciuscià, Le voleur de bicyclette), qui aimait alors investir les rioni populaires de Rome dans une Italie balafrée par la guerre.
Parmi les œuvres marquantes : Umberto D. et son professeur à la retraite qui se résout à la mendicité au Panthéon ; Sciuscià où, dans une prison pour mineurs, deux cireurs de chaussures de la via Veneto rompent une belle amitié ; Le voleur de bicyclette, dans lequel un père et son fils vivent une descente aux enfers de Val Melaina à Monte Sacro. De saisissants portraits de la Rome des années 1945 à 1955.
Rome dans les films de Nanni Moretti
Souvent, les réalisateurs locaux, plus familiers de la géographie romaine, ont posé leurs caméras ailleurs. C’est le cas de Nanni Moretti dans Journal Intime (1993) arpentant sur sa Vespa et sur le « I’m Your Man » de Leonard Cohen la Garbatella (mais pas que), un ancien quartier ouvrier qui fut aussi cité-dortoir lorsque Mussolini y parqua la population la plus indigente de Rome. « Mon quartier préféré, c’est la Garbatella. Je n’aime pas seulement voir les façades, j’aime aussi voir les intérieurs ».
Et il a raison Nanni, toujours propriétaire du cinéma Nuovo Sacher (dans le Trastevere) ! Car ce quartier, imaginé par Paolo Orlando en 1920, tout en tons ocres et façades incurvées, fait la part belle à la végétation en réinventant la cité-jardin. Résultat, de larges cours ouvertes richement arborisées et sur les pignons (notamment de la via Caffaro) de monumentaux graffitis, souvent engagés qui transpirent le caractère rebelle du quartier.
On vous conseille les piazze Benedetto Brin, Damiano Sauli, di Sant’Eurosia et quelques bâtisses comme la très austère Scuola dell'Infanzia Comunale "La Coccinella", patronnée par quatre aigles qu’on croise aussi chez Nanni Moretti.
Et, tant qu’à être dans les parages, poussez plus loin à la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs et à Centrale Montemartini (10€), un musée qui amalgame passé industriel et statues antiques.
Rome : quand le cinéma fait découvrir des quartiers moins connus…
Insolite lotissement que celui du Coppedè, au nord de la Villa Borghese. Gino Coppedè, dans les années 1910, a pris au demi-mot ses commanditaires qui voulaient que le quartier ait un aspect « romain ». Qu’à cela ne tienne, un arc à chandelier marque son entrée, du travertin, des corniches, mais ce bon Gino a veillé à mélanger les styles.
Des tours, une vierge à l’enfant, des coquetteries orientales et surtout des formes végétales et des adjonctions baroques. Bref un petit lopin Liberty (Art Nouveau). Autour de la fontaine des grenouilles et de la piazza Mincio s’éparpillent plusieurs palais aux volumes extravagants et tournures tarabiscotées comme le manoir des fées, le palais de l’araignée ou celui des ambassadeurs.
Le maître du giallo, Dario Argento (qui a ouvert en 1989, dans le Prati, la boutique Profondo Rosso pour les amateurs de films d’horreur), ne s’y est pas trompé, y perdant certains des personnages de l’Oiseau au plumage d’argent (1969) ou d’Inferno (1979). Richard Donner, au début de The Omen (1976), en fera de même avec Gregory Peck, décidément abonné à la capitale italienne.
Le quartier de l’EUR (Esposizione Universale di Roma), créé de toutes pièces pour fêter les 20 ans au pouvoir de Benito Mussolini, s’étend, froid et orthonormé, au sud de la capitale.
En son sein, accueillant le siège de la marque Fendi, le marmoréen palais de la Civilisation italienne (Palazzo della Civiltà Italiana), surnommé le « Colisée carré », avec ses 216 arches, ses statues équestres et ses perspectives, a servi d’écrin à de nombreux films : la Dolce Vita, L’éclipse (1962) de Michelangelo Antonioni, Je suis une légende (1964) d’Ubaldo Ragona, ou Le ventre de l’architecte de Peter Greenaway.
D’autres périphéries ont offert leurs méandres au cinéma. Le Foro Italico (Peter Greenaway, Woody Allen, Mario Bava), complexe sportif à la foisonnante statuaire, au nord-ouest de la ville ; le quartier de Casal Palocco (Dario Argento, Nanni Moretti) rêve fasciste (encore) d’une riche zone résidentielle au sud de la ville, sans oublier Ostie et sa plage (Nanni Moretti, Sergio Citti, Abel Ferrara, Theo Angelopoulos) où Pier Paolo Pasolini fut sauvagement assassiné une nuit de novembre 1975.
Fiche pratique
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L’aéroport de Rome Fiumicino est relié quotidiennement aux principaux aéroports français par Air France, ITA, EasyJet, Vueling…
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Festivals et sites intéressants à Rome
Alors que la ville se vide de ses cinémas, que des institutions comme le cinéma Azzurro Scipionia, mis à mal par les fermetures (dues à la crise sanitaire), ont été sauvées de justesse, il reste, l’été, quelques poches de résistance : la Casa del Cinema (Villa Borghese), lors du festival Timvision Floating Theatre ou piazza di San Cosimato pour l’événement « Il Cinema in Piazza », organisé par le collectif I ragazzi del Cinema America qui, après l’avoir squatté, a aussi redonné une deuxième jeunesse cinématographique à une salle du quartier, l’America, avant d’en ouvrir une autre, le Troisi.
Texte : Florent Oumehdi
Mise en ligne :