Clisson et son vignoble : une petite Toscane aux portes de Nantes
Un pied en Loire-Atlantique, l’autre dans la campagne toscane. À 15 minutes de Nantes en train, Clisson conjugue patrimoine médiéval – un château fort, des halles – et architecture italianisante héritée du XIXᵉ siècle.
Aux beaux jours, les pierres se gorgent de soleil et les toits en tuile se découpent dans un ciel bleu, cultivant encore un peu plus la dolce vita. Le climat local est au diapason avec un ensoleillement plus important que dans le reste du département.
Dans les vignes environnantes, point de chianti, mais du muscadet, un vin blanc sec qui étanche chaque été la soif des festivaliers du Hellfest : 240 000 visiteurs en 2023 et un site devenu un musée à ciel ouvert. Ses environs réservent également de belles découvertes – châteaux, musée, installations artistiques –, de quoi prolonger en beauté son week-end nantais !
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Clisson la médiévale
Depuis le pont de la Vallée, le regard du visiteur embrasse des siècles d’histoire. À gauche, le château, ruine romantique dominant la Sèvre Nantaise, édifié à partir du XIIe siècle. À droite, l’église Notre-Dame inspirée d’une basilique romaine et coiffée d’un clocher toscan, construite en 1888. Entre les deux, un panorama de toits en tuile et de ruelles dévalant vers la rivière. Charmant !
Avant de devenir le rêve italien du sculpteur François-Frédéric Lemot, Clisson fut d’abord une cité médiévale. Apparue dans les textes au IXe siècle, la ville est sous influence angevine avant de passer sous drapeau breton. Sa forteresse, bâtie entre les XIIe et le XVIIe siècles, voit naître Olivier V de Clisson, seigneur cupide et cruel surnommé le « boucher des Anglais », et François II de Bretagne, père de la future reine Anne de Bretagne.
Lors des guerres de Vendée, le château est incendié et la ville en grande partie détruite. Seules les halles sont préservées. Cet ensemble en bois, l’un des plus vastes et des plus anciens de l’Hexagone, a conservé son activité économique au fil des siècles : il accueille toujours un marché et la terrasse d’un café. On le pensait du XVe siècle, sa récente réhabilitation a permis d’établir une nouvelle datation dès 1374-1376.
Autre héritage médiéval : l’église de la Trinité (fermée au public actuellement), mentionnée pour la première fois en 855 et reconstruite après son incendie en 1794.
Pour un autre point de vue sur le patrimoine clissonnais, on opte pour une balade au fil de l’eau. Le club de canoë-kayak de Clisson, basé au moulin de Plessard, propose des locations à partir de la mi-mai : comptez 14 € pour 2 h de canoë, kayak ou paddle. Des randonnées nocturnes sont régulièrement organisées en saison.
La Garenne Lemot, un air d’Italie
Au sortir de la Révolution, Clisson est en ruine et presque désertée. Reste son cadre enchanteur : deux rivières – la Sèvre Nantaise et la Moine – coulant au cœur de collines verdoyantes. Venu en juin 1805, le sculpteur François-Frédéric Lemot est « frappé du grand caractère du paysage » qui le transporte « en Italie ». L’artiste parisien fait rapidement l’acquisition du bois de la Garenne, une réserve de chasse, puis du château et des coteaux alentour.
Sur 25 hectares, il compose une peinture grandeur nature en s’inspirant de villes comme Tivoli, près de Rome, et des grands maîtres de la peinture de paysage dont Nicolas Poussin. Présent à Clisson seulement un mois par an, il confie la maîtrise d’ouvrage à un régisseur local, Joseph Gautret. Cet incroyable projet sera réalisé sur une vingtaine d’années.
Lemot va ensuite promouvoir son œuvre avec un guide de voyage illustré (un ancêtre du Routard !), favorisant l’émergence d’un foyer artistique local : 120 peintres, sculpteurs et graveurs y trouveront l’inspiration au cours du XIXᵉ siècle.
Deux siècles plus tard, le songe est bien réel à la Garenne Lemot – 13 hectares de verdure répartis entre les communes de Clisson, Gétigné et Cugand – dont l’une des entrées n’est qu’à 5 minutes à pied du cœur de ville.
Dans sa partie haute, la maison du jardinier, construite entre 1811 et 1815, s’inspire des fermes d’Ombrie et de Toscane. Le style rustique à l’italienne a servi de modèle aux autres demeures et bâtiments industriels construits dans le vignoble. À l’intérieur, une exposition permanente y retrace le pari fou de l’artiste à l’aide de jeux interactifs.
Toujours transalpine, mais plus bourgeoise, changement de décor avec la villa néoclassique à colonnade de Lemot et son imposante terrasse offrant un superbe point de vue sur la Sèvre. En face, l’autre rive accueille le temple de l’amitié, hommage à la relation qui unissait les frères Cacault à Lemot, et les 18 colonnes du temple de Vesta, réplique de celui de Tivoli. Les édifices font partie des fabriques ornementales – statues antiques, grotte, rochers, colonne – disséminées dans le site.
Après la mort de François-Frédéric Lemot en 1827, son fils prolonge le rêve, repris ensuite par les Clissonnais qui font bâtir à la fin du XIXᵉ siècle l’église Notre-Dame, croisant les influences romaines et toscanes.
Chaque année, des artistes investissent le domaine avec des expositions temporaires dans la villa Lemot et l’installation de nouvelles œuvres dans le parc. En 2024, le sculpteur Johan Creten a carte blanche avec près de 80 œuvres en céramique et en bronze présentées. Des concerts gratuits sont également proposés chaque été.
Le site du Hellfest, musée à ciel ouvert
Fondé en 2006, le Hellfest transforme chaque été Clisson en capitale mondiale du métal avec plus de 200 000 festivaliers venus du monde entier s’éclater sur 21 hectares de terres viticoles. Une ville dans la ville – 70 000 visiteurs par jour en moyenne, 10 fois la population clissonnaise – et un univers qui tranche avec le cadre bucolique et propret du vignoble. En 2024, le festival de musiques extrêmes a accueilli 280 000 festivaliers, 180 groupes programmés sur 6 scènes et 7 000 bénévoles.
Ici aussi, on pratique le pèlerinage… laïc celui-là. Les métalleux sont nombreux à venir se recueillir devant le mausolée dédié à Lemmy Kilmister. Les cendres du leader du groupe Motörhead, décédé en 2015, sont installées au creux d’une statue en métal de 12 m de hauteur. La sculpture de Caroline Brisset fait partie des nombreuses œuvres qui ont transformé le site en musée à ciel ouvert au fil des éditions.
Accessible gratuitement de début août à mi-avril, ce décor de tôles et de rouille plonge les visiteurs – amateurs du genre ou simples curieux –, dans une ambiance gothique croisant les influences médiévales (on y revient !), nordiques et la science-fiction.
L’artiste bordelais Jean-François Buisson signe notamment les Hell Bells, horloge géante aux aiguilles en forme de guitare devenue le point de ralliement des festivaliers, et l’arbre du Hellfest avec ses branches représentant les différents courants du métal.
Le patrimoine local n’est pas oublié avec le Kingdom of muscadet : un bacchus à la guitare et une déesse du vin creusés par Jimmix dans deux troncs de séquoia… avec une cène revisitée au sommet. Quelques mètres plus loin, on aperçoit d’ailleurs un bar à muscadet.
Parmi les dernières œuvres apparues sur le site : un crâne géant et une vanité noire signées Philippe Pasqua. Dans les prochaines années, une gardienne des ténèbres, chimère au buste de femme et à l’abdomen d’un scorpion, devrait faire son apparition à l’entrée du site…
Le site est à 2 km du centre de Clisson, on peut facilement le rejoindre à pied. Des visites guidées « Les essentiels du Hellfest » sont proposées ponctuellement par l’office du tourisme du Vignoble de Nantes.
De Clisson à Nantes, voyage dans le vignoble
Toujours dans une belle harmonie nature-patrimoine, le vignoble nantais réserve de belles découvertes. À 15 km de Clisson, on prend de la hauteur sur le Porte-Vue à Château-Thébaud, belvédère vertigineux créé en 2020 par l’architecte savoyard Emmanuel Ritz dans le cadre du Voyage dans le Vignoble.
Sous nos pieds, 40 m plus bas, la base de loisirs de Pont Caffino, nichée dans un écrin de verdure, et en face, un panorama de falaises et de vignes. L’échappée nature peut se prolonger par une balade en canoë, kayak ou paddle à louer à la base de loisirs.
Si Clisson est la capitale du vignoble, c’est au Pallet, à 15 minutes en voiture, que l’on trouve le musée du Vignoble nantais, dédié à la culture des précieux cépages. Plus de 500 objets y présentent toutes les étapes de la fabrication du vin du XVIᵉ siècle à nos jours. Des visites avec dégustations sont régulièrement proposées.
On peut ensuite approfondir ses connaissances (avec modération !) au château du Coing, propriété viticole reconstruite dans le style italianisant clissonnais, à Saint-Fiacre-sur-Maine.
En retournant vers Nantes, on marque l’arrêt au Château de Goulaine, bâtisse Renaissance en tuffeau aux extérieurs médiévaux, et à Vertou pour y découvrir la chaussée des Moines, gué millénaire récemment restauré. On y retrouve la Sèvre Nantaise, superbe terrain de jeux pour les activités de plein air.
Le vignoble se découvre aussi au fil de l’eau. Depuis la base de loisirs du Loiry à Vertou, on peut rallier le château du Coing (2 heures aller-retour) et la base de loisirs de Pont Caffino (aller-retour dans la journée) en pagayant sur la Sèvre et la Maine. Comptez 14 € par personne pour 2 h de location et jusqu’à 24 € la journée. Renseignements sur le site du club de canoë-kayak de Vertou.
Fiche pratique
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Comment y aller ?
De Paris, 2 h de TGV jusqu’à Nantes puis 15-20 min de TER. En voiture, comptez entre 3 h 30 et 4 h.
Retrouvez toutes les informations sur la destination, les horaires des sites et les visites guidées sur le site de l’office de tourisme du vignoble de Nantes.
Bonnes adresses
– Pollen : 3, place du Minage. Fanny et Marc ont ouvert il y a bientôt 5 ans cette belle adresse au pied du château. Du mardi au vendredi midi, le couple de trentenaires sert une « cuisine du monde » réalisée avec des produits bio et locaux. Deux formules sont proposées : 2 plats et 1 dessert à 16 € et 3 plats et 1 dessert à 20 €. L’été, on peut prendre à emporter et déjeuner à l’ombre des arbres de la Garenne Lemot. Le restaurant est fermé pendant le Hellfest, l’autre passion de Marc étant le métal (il est même chanteur dans un groupe !).
– Olio e Burro : 24, rue des Rémouleurs. David et Marta proposent une cuisine 100 % sans gluten croisant les inspirations des deux côtés des Alpes. La carte courte change tous les deux mois avec des plats compris entre 15 et 20 €. Du mercredi au dimanche midi et du jeudi au samedi soir.
– Les villes invisibles : 1, rue Basse des Halles. En flânant près des halles, on marque l’arrêt dans cette librairie-café avec des rayons dédiés au féminisme, aux luttes sociales, antiracistes et à l’écologie. On y retrouve notamment un focus sur le vin naturel et bio, en lien avec le patrimoine local. Les libraires organisent régulièrement des apéros littéraires ou poésies, des rencontres avec des autrices et des auteurs et des expositions.
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Texte : Jeanne Ferron-Guillot
Mise en ligne :
