Moselle : Meisenthal et Bitche, au pays des boules de Noël
Les boules de Noël ont leur capitale : Meisenthal, un village de Moselle situé à 1h20 de route de Metz et de Strasbourg. Dans son Centre international d’art verrier, vous découvrirez - et pourrez acheter - l’une des 80 000 boules en verre qui s’y fabriquent chaque année pour décorer le traditionnel sapin !
Meisenthal se trouve au cœur du méconnu pays de Bitche, un territoire frontalier de l’Allemagne et de l’Alsace, aux confins de la Moselle. Profitez-en pour découvrir, en toute saison, ce joli coin de Lorraine, avec ses vastes forêts et son patrimoine exceptionnel, reflet d’une histoire chahutée.
Préparez votre voyage avec nos partenairesMeisenthal, pays du verre et des boules de Noël
Qui dit Meisenthal dit boules de Noël ! Cette histoire s’enracine en 1858, année où il fit si sec qu’il n’y eut pas de pommes dans les vergers… et donc point de fruits à suspendre dans les sapins de Noël. Un maître-verrier de Goetzenbruck, village voisin de Meisenthal, eût alors l’idée de souffler une boule en verre coloré. Elle eût tant de succès que la tradition se répandit. Et, c’est grâce à elle que le Centre international d’art verrier (CIAV) de Meisenthal est redevenu un phare de la création verrière.
Au vrai, ce village revient de loin. Après avoir produit des millions de pièces, sa verrerie avait dû éteindre ses fours, en 1969. Définitivement, croyait-on. C’était sans compter l’équipe de passionnés et d’élus locaux tenaces qui a orchestré sa renaissance.
Depuis le XIIIe siècle, le pays de Bitche est un « pays du verre » car il dispose d’eau, de sols gréseux, de bois en abondance pour alimenter les fours, de fougère pour obtenir l’indispensable potasse…
D’abord itinérantes, ses verreries se sont ensuite sédentarisées. Et c’est au début du XVIIIe, qu’un groupe de maîtres-verriers a obtenu, du duc de Lorraine, l’autorisation de s’installer à Meisenthal.
Largement reconstruits tout au long du XIXe et du XXe, les bâtiments de l’ancien site industriel sont toujours restés au cœur de ce village. Douze ans après leur fermeture, un musée du Verre s’y est installé, suivi, en 1992, par le Centre international d’art verrier (CIAV) devenu, depuis, sous la direction de Yann Grienenberger, un lieu unique de création, de production et de démonstration.
Son produit phare est les boules de Noël en verre coloré : chaque année, un designer différent imagine un nouveau modèle réalisé en plusieurs couleurs.
À « Extra », le millésime 2022, a donc succédé « Stella » en 2023, puis, en 2024, « Kaktus ». Conçu par le designer allemand Mark Braun, il est particulièrement réussi dans ses versions jaune éclatant et rose poudré.
Cette boule est fabriquée à 40 000 exemplaires par les 12 maîtres-verriers du Centre, épaulés par huit verriers recrutés pour la période de Noël. S’y ajoutent, en nombre égal, les rééditions des modèles précédents, désormais recherchés par les collectionneurs. Ces 80 000 boules se vendent comme des petits pains, malgré leur prix (26 € pièce). Un succès qui permet au CIAV de s’autofinancer à 90 % !
La visite du Musée du Verre de Meisenthal (entrée : 9 €), relié par une passerelle au CIAV, permet de maîtriser l’histoire locale du verre et les différentes étapes de la fabrication. Sa vedette ? C’est Émile Gallé. Le chef de file de l’Ecole de Nancy et pionnier de l’Art nouveau a travaillé avec la verrerie de Meisenthal de 1867 à 1894. Sont donc présentes plusieurs de ses créations, dont le somptueux Vase à la Carpe en verre clair de lune, clou de l’exposition temporaire « Muette, la Carpe » (jusqu’au 30 décembre 2024).
Visiter la plus ancienne cristallerie de France
Non loin de Meisenthal, la Cristallerie de Saint-Louis est la plus ancienne cristallerie de France. Son « ancêtre », la Verrerie Royale de Saint-Louis autour de laquelle s’est formé le village de Saint-Louis-lès-Bitche, a été la première, en Europe continentale, à percer le secret de la fabrication du cristal, en 1782 (en simplifiant, il suffit d’ajouter de l’oxyde de plomb dans le verre).
La visite de cette Cristallerie, symbole de l’excellence française, est une occasion unique d’observer des maitres-verriers façonner le verre chaud, de voir travailler tailleurs, graveurs, décorateurs à l’or fin ou polisseurs. Et d’apprécier l’étendue des savoir-faire qui ont valu à la Cristallerie une pluie de médailles.
Pour passer de la boule presse-papiers des débuts (réinventée chaque année avec des décors inédits) aux créations les plus contemporaines d’art de la table, il lui a fallu maîtriser toutes sortes de techniques : le cristal filigrané, le cristal coloré dans la masse, le cristal moulé pressé, l’opaline de cristal, le cristal doublé voire triplé, la gravure à l’acide, la taille à la roue…
Au cœur de la manufacture, le musée du cristal « La Grande Place » présente 2 000 pièces sur trois étages (entrée : 8 €). Le parcours est magnifié par un lustre d’exception (120 lumières !) suspendu dans le puits central, mais la plupart des pièces sont époustouflantes. Toutes ont exigé d’innombrables heures de travail. Leur raffinement laisse béat d’admiration.
Le pays de Bitche, aux confins de la France et de l’Allemagne
Haut-lieu du savoir-faire verrier, également « pays du fer », le pays de Bitche est une enclave aux confins de l’ancien duché de Lorraine (aujourd’hui, de la Moselle). Il est frontalier, au nord, du Land allemand de Rhénanie-Palatinat et tutoie, au sud, une Alsace longtemps morcelée jusqu’à son intégration dans la France de Louis XIV.
Tiraillé entre des puissances rivales, le pays de Bitche a une histoire partagée entre la France et l’Allemagne. Toujours est-il que, souligne Joël Beck, président de la Société d’Histoire et d’Architecture de Lorraine (Shal), « dès les XIIe et XIIIe siècles, les seigneurs locaux se sont employés à formaliser leurs frontières - parfois en se combattant - et à construire sur les hauteurs, une dizaine de châteaux en grès rose ». Désormais, ces châteaux se découvrent en randonnant.
C’est aussi au Moyen-Age qu’un château a été élevé sur l’étroit promontoire allongé qui domine la charmante ville de Bitche (5 000 hab.), désormais labellisée « Petite cité de caractère ».
A la fin du XVIe, ce territoire est tombé dans l’escarcelle du duc de Lorraine avant de se retrouver, très vite, au coeur des incessantes querelles territoriales entre la Lorraine et la France. Il fut totalement ravagé au XVIIe s par les mercenaires suédois pendant la terrible Guerre de Trente ans au XVIIe s.
Pour le repeupler, il fallut alors attirer Picards, Allemands, Autrichiens et Suisses en exemptant de taxes ceux qui s’installaient et défrichaient des terres. Par chance aussi, beaucoup d’artisans vinrent bâtir les fortifications de Bitche, voulues par Louis XIV. Ce n’est qu’à la fin du XVIIIe que ce territoire a vraiment été rattaché à la France.
En partie démantelée, puis reconstruite, la citadelle de Bitche reste très impressionnante avec ses murs épais, ses souterrains, ses puissants bastions qui occupent toute l’arrête rocheuse au-dessus de la ville. Une visite à ne pas rater, d’autant plus que de là-haut, la vue sur le pays de Bitche est magnifique.
Stanislas Belhomme a installé le MAUSA, musée privé d’Art Urbain et du Street art, dans une caserne au pied de la citadelle de Bitche, dans l’espoir de « réveiller un patrimoine endormi ». Il a réussi son coup ! Une vingtaine de murs ont déjà trouvé une nouvelle vie grâce à des artistes de renom comme C 215, Akteone, Alex Senna, Crannio, Dotmaster, Eddie Colla, Levalet, Jay Kaes, etc…
Fort Casso, la mémoire de la ligne Maginot
Frontalier, le pays de Bitche a fait les frais des conflits entre France et Allemagne. Annexé après la guerre de 1870, récupéré par la France après 1918, il a, dans les années 1930, accueilli 7 forts et 44 casemates de la célèbre « Ligne Maginot ».
En 1940, la population du pays de Bitche a dû prendre les routes de l’exode. Dès l’armistice, les Allemands ont occupé le pays de Bitche, le soumettant à une rude germanisation et obligeant les hommes à se battre dans les rangs allemands.
Pour s’immerger dans l’histoire locale de la Seconde Guerre mondiale, rien de tel que de visiter le Fort Casso en compagnie d’un bénévole de l’association créée en 1989 par Joseph Koch (compter deux heures, 8 €, réservation obligatoire).
Gardien du plateau de Rohrbach, à moins de 10 km de la frontière allemande, cet ouvrage d’artillerie où vécurent 173 « soldats du béton », a l’allure d’une véritable petite ville enfouie sous 25 mètres de calcaire. On y trouve casernement, cuisine, usine électrique, centrale téléphonique, soutes à munitions, bloc de combat, tourelle de 135 tonnes…
Aux abords du fort Casso, un sentier pédestre fait découvrir casemates, tourelles d’observation et de tirs. Les paysages sont désormais si paisibles que l’on imagine avec peine combien le Pays de Bitche a souffert.
Randonnées dans les forêts du Pays de Bitche
Vastes, les forêts du Pays de Bitche sont parsemées d’étangs, de tourbières, de petits villages, de châteaux en grès rose, d’églises...
Sillonnée par plus de 600 km de sentiers, cette nature préservée se prête à de très jolies balades. Pour guider vers les plus beaux endroits, 14 « sentiers d’excellence » ont été balisés, ponctués de panneaux explicatifs et tables de pique-nique.
Ne pas rater le circuit n°3. Après avoir contourné l’étang de Hanau, près du château de Waldeck, il chemine à travers bois jusqu’au château médiéval de Falkenstein, perché sur une barre de grés. On rejoint ses puissants vestiges par des escaliers métalliques à flanc de rocher. Par temps de brume, l’atmosphère mystérieuse qui règne là-haut, saisit. Par beau temps, on domine un bel océan de forêts et, au loin, la fameuse ligne bleue des Vosges. Une table d’orientation permet de se repérer.
Fiche pratique
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Comment y aller ?
Bitche est 4 heures de voiture de Paris, à 4 h 30 de Lille, 1 h 15 de Strasbourg, à 1 h 30 de Metz, à 2 h de Nancy.
En train, TGV jusqu’à Strasbourg, puis TER jusqu’à Bitche. Ou TGV jusqu’à Metz. Puis, location de voiture. Pour découvrir ce territoire, il faut être motorisé.
Bonnes adresses
- Villa Maria à Petit-Rederching. Cette maison d’hôte labellisée « qualité Mosl » propose deux agréables chambres doubles (85 € avec petit déj) et une grande suite familiale (à partir de 160 €). Piscine couverte et terrasse géniale pour petit déj s’il fait beau.
- La Paulusmühle, à Soucht. Verrerie puis moulin, ses bâtiments, soigneusement retapés avec des matériaux naturels, accueillent trois chambres d’hôtes hyper cosy. A partir de 114 € la double, petit déj. inclus. Les repas (25 €, sur réservation) valorisent la cuisine paysanne locale, faite de quiches, pâtés, potées et brotknepfle, de délicieuses quenelles de pain.
- L’Argousier, à Volsmunster. Le chef, Jonathan Birkenstok, allie avec talent les saveurs locales dans une cuisine très végétale. Idéal pour une halte gourmande. Menu du marché à 45 €. Réserver.
- Auberge Le Moulin d’Eschviller, à Volsmunster. Bonne cuisine locale à prix doux. On plébiscite ses buvenspätzler (quenelles de pommes de terre). Formule à 18 €. Réservation obligatoire.
- Auberge des Mésanges, à Meisenthal. Carte riche et variée, pas seulement locale, mais bel assortiment de tartes flambées (de 9 € à 13 €). Plat à partir de 18 €. Mieux vaut réserver.
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Texte : Paula Boyer
Mise en ligne :