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Hula

Émanation des règles sociales de jadis, les grands arts polynésiens sont les mêmes d’un archipel à l’autre : danse, chant et tatouage. La danse et le chant, intimement liés, avaient et ont encore vocation à compter et illustrer l’histoire des ancêtres, les filiations, les migrations, les exploits des héros disparus, la puissance de leur mana, la beauté des filles et des paysages, la force des dieux et la peur qu’ils inspirent aux hommes.

Des dieux omniprésents, dont les formes innombrables imprègnent les éléments primordiaux et leurs manifestations : le soleil et la lune, la mer et les montagnes, la pluie comme la foudre. Chacun, tour à tour, prend corps dans les danseurs, qui « deviennent » nuages ou arc-en-ciel, vague qui va et vient, oiseau qui vole - colères divines ou merveilles sublimées de la nature. Les hommes sont unis au grand tout. Le sang qui s’écoule, plus encore lors des menstruations, fait écho aux marées, aux eaux des torrents, aux mouvements même de la vie. Tout est lié, en une cosmogonie naturaliste où chaque chose possède sa place. Bouleverser le cadre, c’est modifier l’ordre de l’univers : un affront intolérable, jadis sauvegardé par mille kapu (tabous).

Interdite par les autorités coloniales, réduite à la clandestinité, la danse a refait surface dans les années 1970 avec le réveil de la conscience culturelle hawaïenne. En marge des spectacles de hula 'auana (moderne) surtout destinés aux touristes, le kahiko (ancien) a été remis à l’honneur, accompagné du pahu, le tambour tendu d'une peau de requin, de l’’umeke (calebasse) ou des seuls mele (chants). Il s’enseigne aujourd’hui aux quatre coins de l’archipel, dans une centaine de halau (écoles) et même au Japon ! Une revanche apparente qui pourrait menacer son intégrité en se concentrant sur la seule esthétique.

Le hula répond à un vocabulaire précis : chaque mouvement du corps, des pieds, des bras, des mains, des yeux, tantôt lents et coulés, tantôt saccadés et guerriers, véhicule un message spécifique. Au-delà de la norme établie, chaque kumu hula (professeur de danse) apporte sa vision du monde à travers la chorégraphie. Des notions similaires sont transcrites différemment d’une île à l’autre. Chacune privilégie ce qui lui est propre : les halau de Kaua’i, la plus occidentale de l’archipel et la plus arrosée, mettent ainsi en scène bien plus de pluie que les autres...
Et la Grande Île, assise sur les forges des volcans, fait une large place à Pele, déesse du feu et protectrice des danseurs. Les colliers de fleurs qu’ils ceignent au front, sur fond de vert forêt et de baies blanches, allusion à la neige dont la déesse Poliahu nimbe le sommet du Mauna Kea, s’y tâchent du rouge sang des fleurs d’ ‘ohi’a (rouge de la lave en fusion).

Adapté aux événements de la vie, le hula peut se faire joyeux lors d’une naissance, ou triste au moment d’un décès. Certaines danses, composées à la venue au monde des enfants de lignage royal, célèbrent leur pouvoir sexuel. Un chant fort connu évoque ainsi, par métaphore, les organes génitaux « des plus grands » du jeune roi Kalakaua… Aujourd’hui encore, certains chanteurs, tenus en très haute estime, peuvent mémoriser et scander des milliers de vers.

Tatouage

Primordial par le passé dans toutes les cultures polynésiennes, presque abandonné sous l’influence des missionnaires, le kakau est aujourd’hui en pleine renaissance. À l'origine, il semblerait que ce soit pour effrayer les ennemis que le tatouage s’est développé. Très vite, il a pris une fonction sociale de premier ordre, marquant le statut social de chacun et les étapes de la vie. Une sorte de carte d’identité corporelle, révélant aux yeux de la communauté actes héroïques ou traîtrises passées...

Les motifs, majoritairement géométriques, répondaient à des codes précis. À l'origine surtout tatoués entre la taille et les genoux, les hommes développèrent peu à peu des motifs complexes couvrant tout le corps. Les tatouages hawaïens s'inspiraient largement de ceux réalisés aux Marquises, archipel d’origine des premiers colons. Les guerriers se distinguaient par un côté du corps vierge et l'autre entièrement recouvert de noir. Les femmes portaient généralement moins de tatouages, limités à certaines parties du corps.

Les tatouages étaient réalisés à l'aide d’une encre tirée de la combustion de la noix du kukui (bancoulier), avec pour tout instrument une dent de requin ou un os affûté enfoncé sous la peau à l'aide d'un petit maillet. Les cérémonies entourant les séances duraient généralement plusieurs jours - comme c'est aujourd'hui encore le cas aux îles Samoa. Les tatoueurs, des kahuna (prêtres) dont la charge était héréditaire, occupaient une position sociale élevée.

Interdit pour cause de religion, le tatouage se perdit parmi la population hawaïenne avec l'adoption des vêtements occidentaux. Ironie du sort, les marins de Cook, dont certains s'étaient fait tatouer, exhibèrent leurs trophées à leur retour dans les ports d'Europe… La mode se répandit. Un temps défi aux gouvernements coloniaux, le tatouage manifeste aujourd'hui avant tout une envie de renforcer le sentiment d'appartenance culturelle.

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Byodo-In Temple
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Chute de Waimea, Hawaii
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