Bristol, capitale du street art

Bristol, capitale du street art
Olivia Le Sidaner

À 170 km à l’ouest de Londres et aux portes du Pays de Galles, Bristol n’a pas fini de vous étonner. Berceau de Massive Attack et de Portishead, mais aussi de Wallace et Gromit, cette dynamique ville étudiante est devenue l’un des hauts lieux de la planète street art. Balade dans une cité arty, alternative et verte, mais aussi très british, sur les traces du graffeur Banksy et de ses acolytes.

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Bristol, du trip-hop au street art

Le dernier week-end de juillet, la cité du sud-ouest de l’Angleterre accueille le plus grand festival européen de street art, Upfest. Pendant trois jours, quelque 250 artistes laisseront parler les aérosols et les pochoirs sur les 3 000 m2 de murs mis à leur disposition dans les quartiers de Southville et de Bedminster.

Si vous n’avez pas la chance d’assister à l’événement, sachez que toute l’année, Bristol vit au rythme de l’art urbain. Des passionnés se font un plaisir de guider les curieux au gré des rues à la découverte des œuvres du célèbre Banksy, l’enfant du pays, et de ses acolytes graffeurs.

Un bon moyen d’appréhender l’âme de cette ville à l’énergie créative débordante, qui a déjà fait parler d’elle dans les années 1990 en lançant le mouvement trip-hop avec Massive Attack et Portishead. Alors, à vos sprays, partez !

Sur les traces de Banksy

La chasse au graff commence en centre-ville. Juste en face de College Green, où l’imposante mairie regarde la non moins imposante cathédrale, une œuvre de Banksy orne le mur d’un immeuble de Park Street, comme un défi à l’establishment.

Il s’en est d’ailleurs fallu de peu pour que « Well Hung Lover » (représentant un homme nu suspendu à une fenêtre où s’encadre un couple) ne disparaisse du paysage, en 2006, si les habitants n’avaient voté à 97 % pour qu’elle reste à sa place.

Toutes les réalisations du célèbre artiste anonyme n’ont pas eu cette chance. Ainsi, « Pulling the Plug », le graffiti que Banksy avait apposé sur la fontaine de la mairie en 2001 – un de ses premiers faits d’arme – a été effacé. Sans doute le message contestataire adressé au City Council, connu alors pour sa politique « zéro tolérance » en matière d’expression murale, avait déplu !

Depuis, l’eau a coulé sous les ponts du Floating Harbour, et Banksy est aujourd’hui un artiste reconnu dans sa ville natale. Pour preuve, la grande exposition qui s’est tenue en 2009 dans le très officiel Bristol Museum and Art Gallery, a attiré 300 000 visiteurs en trois mois. Une sculpture offerte par l’artiste est exposée dans le hall d’entrée : le « Paint Pot Angel », un ange dont la tête est cachée par un pot de peinture rose dégoulinant.

Une autre œuvre de Banksy se trouve dans un musée : « Grim Reaper », la mort armée de sa faux, qui était originellement peinte sur la coque du Thekla, le mythique cargo qui a accueilli les concerts des grands noms de la pop et du trip-hop dans les années 1990, de Pulp à Portishead.

Pour l’empêcher de se dégrader, elle a été déplacée en 2014 au M Shed, le musée d’histoire de la ville, installé sur les quais. Le flanc du bateau, quant à lui, arbore maintenant un graffiti signé Inkie, une autre figure du street art bristolien, camarade de la première heure de Banksy.

Le quartier alternatif de Stokes Croft

En remontant vers le nord, on arrive à Nelson Street, l’une des plus importantes galeries d’art urbain d’Europe. La rue, particulièrement décatie, a été choisie pour accueillir en août 2011 le premier festival « See No Evil », coordonné par Inkie et la mairie, qui avait compris que le street art pouvait aider à réhabiliter les quartiers défavorisés.

Pour l’événement, plus de 70 artistes internationaux ont été invités à exercer leurs talents sur les murs, dont le Bristolien Nick Walker ou le Californien El Mac. L’année suivante, d’autres graffeurs ont fait le déplacement, comme l’Italien Pixel Pancho.

Un peu plus loin, on pénètre sur le territoire de la People’s Republic of Stokes Croft (PRSC), une « république » d’un nouveau genre, œuvrant pour la culture et l’économie locale (en version « do it yourself ») dans le quartier de Stokes Croft.

Les collectifs d’artistes, les restos communautaires et les boutiques indépendantes ont redonné vie aux bâtiments abandonnés, et tout ce petit monde se défend bec et ongles contre toute incursion ennemie des multinationales, le mot d’ordre étant « Think local ».

Pour se plonger dans cette ambiance alternative et bohème, n’hésitez pas à aller grignoter à The Canteen, un resto qui sert des plats bio et locaux et s’inscrit dans la mouvance Slow Food.

On y retrouve aussi la marque de Banksy, dont le fameux « Mild Mild West » (un ours en peluche s’apprêtant à balancer un cocktail Molotov sur la police) surplombe la terrasse, faisant face au Jésus breakdancer de l’artiste londonien Cosmo Sarson, sur le mur opposé.

Dans la Jamaica Street, vous ne pourrez pas non plus louper la galerie à ciel ouvert de la People’s Republic of Stokes Croft, un long mur recouvert de fresques.

La campagne à Bristol

Toujours plus au nord, une surprise nous attend. Après avoir pris un peu d’altitude – Bristol est une cité de collines –, on arrive dans le quartier résidentiel de Montpelier, très arboré, où l’on repère aussi des fresques et des graffitis.

Le centre-ville n’est pas loin, mais on a déjà l’impression d’être à la campagne. Une impression qui se confirme lorsque se profile la St. Werburghs City Farm, une authentique ferme urbaine où se joue une expérience communautaire hors du commun. On y cultive des légumes, on y élève des animaux, le tout en bio, bien sûr.

D’étonnantes demeures ont été construites, dont certaines dans l’esprit de Gaudí. Dans le café aux allures de maisonnette de Hobbit, on peut se réchauffer avec une soupe organic, ou boire un verre sur la terrasse s’il fait beau. Et bien sûr, l’art a sa place, ici, de nombreuses fresques ayant été peintes sur les murs alentour.

Mais n’allez pas penser que seul le nord de la ville est adepte du street art. Si Stokes Croft reste le quartier historique de l’art urbain, les graffeurs ont trouvé un nouveau terrain de jeu au sud de la rivière Avon.

En témoigne l’œuvre que Banksy (encore lui) a peinte au pochoir, comme il se doit, sur un immeuble de Hanover Place, près du centre d’art contemporain de Spike Island, en octobre 2014. Inspiré par Vermeer, « Girl with a pierced eardrum » a été vandalisé dès le lendemain par un jet de peinture, une attaque courante, dans la tradition new-yorkaise.

Le City Council, propriétaire de l’immeuble, a promis de faire le nécessaire pour protéger le dessin de Banksy. On le voit, les temps ont changé, et le street art a un avenir certain à Bristol, où souffle plus que jamais un vent de douce folie créative. Avec une once d’esprit subversif, qui donne aux habitants l’énergie de s’inventer une ville à part, à leur image.

Fiche pratique

Pour préparer votre séjour, consultez notre guide en ligne Angleterre

Office du tourisme de Bristol

Office du tourisme de Grande-Bretagne

Bristol Street Art Tour. L’équipe de Where the Wall organise des tours guidés à la découverte du street art à Bristol (2 h environ), le mercredi, samedi et dimanche, à 11 h. Adulte : £9,20, enfant : £4,80. Pour ceux qui ne parlent pas bien anglais, possibilité de faire le tour en compagnie d’un artiste bristolien francophone, Ollie Gillard, dont on peut aussi admirer les œuvres au sud de la rivière Avon (www.gagegraphics.co.uk ). Sur réservation.

Upfest Bristol 2015. Festival du 25 au 27 juillet. www.upfest.co.uk. Gratuit.

Comment y aller ?

Vol quotidien Paris-Bristol (1 h 15), avec EasyJet.  Réservez votre billet d’avion.

Se déplacer

La ville se laisse facilement découvrir à pied, mais aussi à vélo, l’un des moyens de transport préférés des Bristoliens. Attention : ici, on roule à gauche.

Dans le centre ville, au n° 1 Harbourside, on peut louer des Pashley Bikes au look vintage chez Cycle the city. Tarifs : £20 la journée, £12 la demi-journée.

Où manger, boire un verre ?

The Canteen, 80 Stokes Croft. L’un des centres névralgiques du quartier de Stokes Croft. On y mange bio et local (plats entre £5 et £10), et on y boit des verres le soir en écoutant de la musique.

The Bell, 18 Hillgrove Street, Stokes Croft. Ce pub très engagé dans la promotion du street art est le quartier général des artistes, DJ’s et musiciens.

À voir

M Shed , le musée d’histoire de la ville de Bristol, où est exposé « Grim Reaper », une œuvre de Banksy. Harboursite, entrée gratuite.

Thekla, The Grove, East Mud Dock. Pour voir (de loin) la sirène dessinée par Inkie sur le flanc du bateau ou assister à un concert.

St. Werburghs City Farm, Watercress Road. La ferme urbaine de Bristol.

Texte : Olivia Le Sidaner

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