Verdun, la mémoire vive
Plus d'un siècle après la bataille de Verdun, le vaste secteur où elle s’est déroulée est toujours inhabité. Il faut se rendre dans ce coin de Lorraine aujourd'hui couvert d'une belle forêt, pour tenter de ressentir ce qu’ont pu vivre ici des millions de combattants en 1916. Focus sur l’un des hauts lieux de la mémoire française, à l’occasion des commémorations du 11 novembre.
A lire : le Routard Grande Guerre 14-18, les chemins de mémoire
Préparez votre voyage avec nos partenairesVerdun, retour sur une bataille
L’un des plus spectaculaires temps forts de la Première Guerre mondiale a eu pour théâtre les hauteurs qui surplombent la ville de Verdun, alors toute proche de la frontière allemande. La bataille, qui s’est déroulée du 21 février au 19 décembre 1916, a opposé les forces françaises et allemandes.
Tandis que les alliés français et britanniques s’apprêtent à lancer une grande offensive sur la Somme, les chefs allemands décident de frapper très violemment à Verdun, un verrou protégé par des forts alors négligés par les Français. L’idée est d’obliger ces derniers à concentrer des forces ici. Surpris dans un premier temps, les Français vont cependant contenir l’avancée de leurs ennemis puis les repousser.
Obus de plus en plus gros, gaz mortels, mitraille, corps à corps, pluie, gel, canicule… Des deux côtés, c’est l’enfer pour les soldats qui, lorsqu’ils ne sont pas terrés dans des tranchées ou des forts, partent pour des assauts extrêmement meurtriers.
Bilan : plus de 300 000 morts ou disparus répartis à égalité entre les belligérants sur un total d’environ 700 000 victimes. 10 mois de douleurs pour accoucher d’un monstrueux résultat : une ligne de front revenue quasiment à ce qu’elle était au début de la bataille. Cet épisode a été et reste le symbole de la résistance française face à l’envahisseur et aussi celui de la sauvagerie et de l’absurdité de la guerre.
Dans la « zone rouge »
Lorsque, depuis Verdun, vous montez vers le secteur des combats, vous pénétrez rapidement dans une grande forêt. Elle a été créée après la guerre car l’ancien champ de bataille, qualifié de « zone rouge », a été déclaré impropre à la reprise d’activités agricoles ou à la reconstruction.
Scrutez le sol et vous verrez qu’il est en quelque sorte ondulant… Sur des kilomètres et des kilomètres il en ira de même. Comme sculptée par les bombes, la terre est encore aujourd’hui pleine de vestiges : des balles, des armes, des obus… et des corps. Attention : hors des routes et chemins balisés, des morceaux de ferraille ou de barbelés, souvent difficilement visibles, sont encore en surface.
Au cœur de ces paysages vallonnés et boisés sont implantés des lieux propices au recueillement et à la réflexion.
Douaumont
Les restes de 130 000 soldats français et allemands non identifiés sont conservés dans l’Ossuaire de Douaumont, un monument en forme d’épée plantée dans le sol qui se constitue d’une sorte de crypte en rez-de-chaussée, d’une chapelle et d’une tour de 46 m (panorama au sommet).
Dans la « crypte » on voit des noms de disparus gravés sur les murs et des cénotaphes sous lesquels se trouvent des ossements – visibles à l’extérieur depuis de petites fenêtres situées au ras du sol. En face du bâtiment s’étend une mer de croix blanches, là où sont enterrés 16 000 soldats.
Même si vous êtes rétif à l’aspect « officiel » que peut avoir ce genre de lieu, vous serez irrémédiablement ému à la pensée de tous ces hommes qui ont souffert le martyr voilà un siècle.
À proximité de l’Ossuaire se trouve l’instructif Mémorial de Verdun, un musée qui a rouvert à l’occasion du centenaire de la bataille après une refonte de sa scénographie. Ses sections sont clairement définies et riches en objets et documents français et allemands.
Autre site incontournable : le fort de Douaumont, dont une partie des installations se visitent. On peut y ressentir ce que cela signifiait d’être comme enterré là, dans la promiscuité et le bruit, notamment des bombardements. Il a été gagné par les Allemands puis repris par les Français. Sur son « toit » recouvert de terre, d’où tiraient des canons et des mitrailleuses, on mesure l’effarant défi que devaient relever les attaquants de cette haute position aux pentes très raides et ceinte d’une sorte de douve.
Les autres sites
Non loin se trouvent les forts de Vaux et de Souville qui défendaient eux aussi Verdun. Il n’en reste que des ruines.
Partout dans la zone, vous trouverez des sites où se sont déroulés des combats, notamment la Tranchée des Baïonnettes, des postes de soins et des arsenaux cachés, ce à quoi s’ajoutent des monuments divers et des tombes isolées. Et puis des villages détruits, au nombre de neuf, qui sont toujours administrativement existants bien qu’il n’y ait plus ni maison, ni habitant. À Fleury-devant-Douaumont, des bornes indiquent l’emplacement des rues, des fermes, de la boulangerie, de l’école, etc. Saisissant…
Un peu à l’ouest de Verdun, il faut aller au Saillant de Saint-Mihiel où des sentiers de découverte vous permettent d’emprunter des tranchées allemandes solidement construites, ainsi que leurs équivalentes françaises, reconstituées.
Verdun, une ville à visiter
Située au bout de la Voie sacrée, route stratégique qui la reliait à Bar-le-Duc, Verdun fut bombardée durant la bataille, mais n’a pas été prise.
L’un des bâtiments emblématiques de cette cité est la Tour Chaussée (14e siècle), une de ses anciennes portes d’entrée qui est placée au bout d’un pont enjambant la Meuse – ses berges sont très joyeusement animées aux beaux jours.
Des monuments commémoratifs sont visibles en ville, mais le grand site associé à la guerre est la Citadelle Souterraine (19e siècle). Vous visitez quelques-unes de ses galeries à bord d’un petit train depuis lequel vous assistez à des saynètes mettant en scène des soldats sous forme de films holographiques et voyez des décors reconstitués. C’est là qu’en 1920 fut désigné le soldat inconnu qui repose sous l’Arc de Triomphe à Paris.
En haut de la ville, près de la cathédrale, le Palais épiscopal abrite le Centre mondial de la paix, des libertés et des droits de l'homme. Dans ce bâtiment du 18e siècle sont montrées des expositions.
Ailleurs en Lorraine
En complément de votre séjour à Verdun, vous pouvez vous offrir de belles balades dans les deux grandes villes de la Lorraine. À Metz, la plus proche, ne manquez pas le Quartier impérial construit après que la Moselle fut annexée par l’Allemagne, à l’issue de la guerre de 1870-1871. Des immeubles imposants, dont la gare, affichent un caractère germanique prononcé. La ville est également à visiter pour sa cathédrale, son centre Pompidou…
Nancy, restée française, a pour attraits sa célèbre place Stanislas, ses maisons Art nouveau, ses musées…
Si vous disposez de temps, vous pouvez aussi poursuivre votre voyage sur le thème de la Grande Guerre en suivant les lignes de front situées au sud-est (Vosges) ou à l’ouest (Champagne).
Un Routard spécial vous permet de construire votre voyage sur les Chemins de Mémoire.
Fiche pratique
Pour préparer votre séjour, consultez notre fiche Lorraine
Comité Régional du Tourisme de Lorraine
Comité départemental du tourisme de la Meuse
Comment y aller ?
- Autoroute : A4 Paris Strasbourg.
- Gare : Meuse TGV (navettes pour Verdun).
- Aéroport : Metz Nancy Lorraine.
Une gourmandise
La dragée est une friandise très ancienne, mais la forme qu’on lui connaît est née à Verdun au 13e siècle. Cette amande enrobée de sucre est toujours fabriquée ici, par l’entreprise Braquier, dont les produits sont très fins.
Où dormir ?
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Texte : Michel Doussot