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Gitans, manouches et tsiganes : la route du romLes caractéristiquesLes métiers Ils sont souvent en rapport avec la chose militaire, occupation qui fut importante aux premiers temps de la présence rom en Europe, selon les chroniqueurs du passé. Organisés en compagnies, des Roms se sont illustré sur tous les champs de bataille pendant environ deux siècles au cours des conflits européano-ottomans, des guerres de religion entre catholiques et protestants, au service de tel ou tel prince… Bref, ceux-là étaient des sortes de mercenaires. Le spectacle Dans tous les sens du terme, il a été et reste une activité très visible. Que sont les diseuses de bonne aventure, très recherchées lors des foires ou même sur le bord d’une simple route, si ce n’est des artistes du beau langage, et souvent fines psychologues ? Elles vous touchaient la main et regardaient droit dans vos yeux pour y lire ce qu’elles devaient raconter. Adeptes du christianisme Dans leur majorité, les Roms ont au cours de leur histoire adopté la religion des pays dans lesquels ils circulaient ou s’installaient. On a cependant noté que dans les Balkans, lors de l’occupation ottomane, les nomades étaient musulmans et les sédentaires chrétiens orthodoxes – ce qu’ils sont toujours. Manouches, sintis et gitans sont catholiques – beaucoup se retrouvent chaque année en mai aux Saintes-Maries-de-la-Mer en Camargue, afin de célébrer Sainte Sarah. Depuis le XXe siècle, l’évangélisme pentecôtiste fait de grands progrès dans les communautés roms. Les roulottes Avec petite cheminée, fenêtre et volets, elles sont apparues seulement au XIXe siècle. Elles ont été remplacées ensuite par de grandes caravanes accrochées à de puissantes automobiles, la marque Mercedes étant très prisée. Auparavant, les Roms nomades circulaient à bord de chariots bâchés que tiraient des chevaux ou des bœufs. Lors des étapes, ils logeaient sous des tentes ou dans des grottes. La cellule familiale La cellule familiale rom est traditionnellement dirigée par le père. On attend de la mère qu’elle donne beaucoup d’enfants. Plus une famille est nombreuse, plus elle est considérée comme bénie de Dieu. On se marie, mais pas forcément à l’Église ou à la mairie. Les danses et musiques Ils ont été et restent les meilleurs passeports des gipsies. On s’est souvent posé la question de savoir s’il existait une musique typique de l’entité rom. En réalité, on ne peut que constater que les artistes tsiganes ou gitans se sont en fait adaptés aux traditions des pays d’accueil. Ils ont mélangé ces dernières à d’autres, entendues ailleurs, et certainement à un vieux fonds indien conservé de génération en génération. Les genres les plus connus se sont développés là où des Roms ont se sont installés à demeure. L’association danse-rythme-musique est essentielle. Que l’on songe simplement au flamenco. Il n’est pas de musique rom sans partage, sans que l’assistance ne se fasse d’une manière ou d’une autre participante. Les contrastes sont saisissants : lenteur , rapidité, douceur , fureur. Les voix sont toujours éraillées et plaintives. La musique tsigane trouve son origine dans les vieilles traditions balkaniques, ottomanes, slaves et hongroises. C’est dans ce terreau mouvant qui, en certains points, changea souvent plusieurs fois d’occupants, que l’on a poussé les premières complaintes qui font aujourd’hui les délices des amateurs éclairés de musiques du monde. L’engouement a commencé très tôt auprès des princes et des compositeurs (des romantiques comme Lizst aux modernes du XXe siècle tels que Bartok) qui se pâmaient d’admiration devant les nombreux virtuoses tsiganes – notamment les violonistes. Figurant parmi les premiers artistes d’un proto-show-business, les musiciens tsiganes se sont répandus dans toute l’Europe de l’Est et en Russie. Se produisant dans les cabarets, les solistes, orchestres et danseuses ont charmé des millions de spectateurs. Aujourd’hui encore, ce sont des Tsiganes qui animent les soirées des grandes villes de même que les bals, mariages et enterrements des campagnes. À noter : le cousinage qui lie musiques tsiganes et klezmer, le folklore des juifs d’Europe orientale. Le flamenco est apparu à la fin du XVIIIe siècle en Andalousie. Un cri modulé en lamentations d’hommes et de femmes accompagnés de guitaristes et de percussionnistes usant parfois d’un marteau et d’une enclume… Les puristes nomment cette musique canto jondo, chant profond. Elle est le fruit d’une combinaison de plusieurs traditions : celle des origines indiennes, les pratiques judéo-arabo-berbères andalouses et l’art de la romance venu du Nord de l’Espagne, notamment les villancicos. C’est dans les cafés cantantes des gitanerias, quartiers gitans, que se sont fait connaître les premiers artistes du genre. Des danses presque statiques sont le complément indispensable de cette musique. Celle-ci bouleverse surtout lorsque se fait sentir le duende, cet état d’âme indéfinissable proche de la transe. Aussi, la polémique est dès le départ présente. Le flamenco en tant que spectacle rémunéré est considéré comme nul par les aficionados purs et durs. Pourtant, si le genre, longtemps mal perçu, s’est finalement imposé au plus grand nombre, ce fut grâce à des vedettes comme Carmen Amaya ou Camaron, ainsi que grâce à la reconnaissance de musiciens savants tels que Manuel de Falla. La rumba gitane est souvent confondue avec le flamenco. Il s’agit d’un mélange de rythmes afro-cubains et de traditions andalouses inventé au milieu du XXe siècle dans les quartiers gitans de Madrid, Barcelone et Perpignan. Les Gipsy Kings, groupe des années 1980, en ont été les plus dynamiques propagateurs à travers le monde. Le jazz manouche. Django Reinhardt (1910-1953) est la figure majeure de ce genre récent, éclos dans les années 1930 à Paris. C’est un guitariste manouche, issu d’une famille de l’Est de la France. Il se passionne pour la musique moderne du moment, le jazz, en même temps que d’autres Roms guitaristes, tels que les frères Ferret, des gitans catalans. Ces adeptes du swing nord-américain rencontrent des artistes spécialisés dans le genre musette (mélange de traditions auvergnates et italiennes), comme les accordéonistes Jo Privat et Gus Viseur ou des interprètes formés à la musique classique à l’instar du violoniste Stéphane Grappelli. On voit ce que l’émergence du style jazz manouche doit au brassage des cultures à l’œuvre dans la capitale et ses faubourgs. L’héritage du guitariste est toujours très vivace. Ses descendants directs, ainsi que de nombreux manouches, authentiques ou d’adoption, perpétuent son style dans toute l’Europe du Nord. À Samois, en Seine-et-Marne, là où Django a fini sa vie et est enterré, un festival réunit chaque année en juin musiciens et admirateurs du génial guitariste. Illustrations : © Marcel Ville |
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