Valence s’enflamme pour les fallas
Chaque année, du 15 au 19 mars, Valence s’anime avec l’apparition d’immenses personnages de carton-pâte installés à tous ses coins de rue. Les fallas, qui tirent leur nom de ces ensembles monumentaux, sont l’occasion de la plus grande fête populaire de la vieille cité espagnole. Pendant une semaine, l’ambiance est à son comble, entre processions, rafales de pétards le jour et feux d’artifice la nuit. Avant un grand feu de joie final, qui réduira en cendres ces sculptures éphémères...
Préparez votre voyage avec nos partenairesUne brûlante satire populaire
L’origine des fallas de Valence se perd dans
les siècles passés, mais on a coutume de raconter qu’elles sont l’héritage d’une
pratique des artisans de la ville à l’époque médiévale. Ceux-ci, pour éclairer
leur atelier à l’automne, fabriquaient des portants de bois sur lesquels ils
fixaient des lampes à huile. Lorsque, au retour du soleil au printemps, les
lampes devenaient inutiles, ils les brûlaient devant leur atelier.
On s’est vite amusé à habiller les portants de morceaux de tissu, leur conférant
un aspect humain de plus en plus affirmé. En même temps, ces parodies d’autodafés
acquéraient une dimension caricaturale et festive : le peuple avait trouvé
le moyen de faire la satire joyeuse des puissants. Au fil des siècles, les figures
ont été plus minutieusement travaillées, devenant de véritables personnages
de carton-pâte appelés ninots, eux-mêmes regroupés en ensembles thématiques,
les fallas. Ces monuments impressionnants n’ont aujourd’hui plus grand-chose
à voir avec de simples bouts de bois décorés de chiffons ; ils font plutôt
penser à ces personnages de cartoons géants que l’on croise dans les parcs d’attractions...
Chefs-d’œuvre éphémères
De nos jours comme par le passé, les fallas
sont destinées à finir en flammes. Cela n’empêche pas les artistes falleros,
dont certains sont des professionnels qui travaillent aussi sur les décors hollywoodiens
(à l’image d’une star locale, Regino Mas), de créer de véritables œuvres d’art
avec un budget qui peut atteindre jusqu’à deux millions d’euros ! Si jadis,
le bois et le plâtre étaient les matériaux de base, désormais la fibre de verre
ou le polyester permettent d’alléger les fallas, qui peuvent atteindre
plus de 15 m de haut. Les thèmes ne s’embarrassent pas de considérations
politiquement correctes : on a vu Rita Barbera, la mairesse de Valence,
à quatre pattes, habillée en sado-maso et fouettée par Jordí Pujól ; une
critique acerbe des filles anorexiques ou encore des exemples des mutants que
nous prépare l’environnement...
Malgré le côté burlesque de la caricature, l’événement est pris très au sérieux.
Chaque quartier de Valence présente sa propre falla, dont le thème a
été choisi par une commission locale des mois à l’avance. Un concours divisé
en plusieurs catégories (il différencie notamment les travaux des adultes de
ceux des enfants) récompense les meilleurs ensembles. Et le ninot le
mieux réussi, qui obtiendra le titre de ninot indultat, aura le privilège
d’être le seul à ne pas finir en flammes. Tout au long de l’année, on peut d’ailleurs
découvrir au musée des Fallas de Valence tous les ninots indultats qui
ont échappé à la crémation.
Le déroulement des fallas ne varie pas beaucoup d’une année sur l’autre.
La plantá, moment où l’on découvre les sculptures monumentales sur les
places et croisements de rue de Valence, a lieu le 15 mars à minuit. Le
matin du 17 mars, les fallas qui ont obtenu un prix viennent le
recevoir sur la place de l’hôtel de ville (plaza del Ayuntamiento). Ce même
jour et le lendemain, à 16 h, les cortèges de fallas s’ébranlent
pour rejoindre la basilique, contre laquelle un mur de fleurs est traditionnellement
dressé en hommage à la Virgen de los Desamparados, la patronne de la ville.
Attention, car la ville est alors pratiquement paralysée. La semaine se termine
dans les flammes le soir du 19, quand a lieu la crema, la mise à feu
des fallas... Impressionnant !
Des bombes et des pétards
Que seraient les fallas sans ses falleras
et ses mascletas ? Les premières, ambassadrices de la fête, et les
secondes, spectaculaires rafales de pétards quotidiennes, sont indissociables
de ce festival populaire.
Dès le mois de janvier, chaque commission de quartier présente la plus gracieuse
de ses jeunes filles, incarnation de la femme valencienne. Les falleras
se parent de leurs plus beaux atours, à la mode du XVIIIe siècle :
robe de soie, tissus brodés, parure de bijoux, peigne en or et mantille, bref
un costume traditionnel et coûteux... L’une d’entre elles est élue Fallera
Mayor, ainsi qu’une fillette qui obtient le titre de Fallera Mayor Infantil.
Pendant une semaine, ces ambassadrices de Valence seront de toutes les manifestations,
une bonne occasion pour elles de côtoyer la crème de la ville !
Les mascletas, quant à elles, débutent dès le 1er mars
sur la plaza del Ayuntamiento. Elles tirent leur nom du masclet, le plus
gros des pétards, et c’est à un véritable spectacle pyrotechnique que l’on assiste
en pleine journée ! La pétarade résonne devant chaque falla dès
14 h, mais il faut bien la matinée aux artificiers pour préparer les guirlandes
de pétards enrubannés qui envelopperont les rues de la ville d’un nuage de fumée.
Oreilles sensibles, soyez prévenues : rien à voir avec nos gentils pétards
du 14 juillet ! Rien que pour la mascleta de la plaza del Ayuntamiento,
près de 120 kg d’explosifs partent en fumée... Et pour couronner le tout,
ne pas manquer les feux d’artifice tirés chaque soir sur l’ancien cours du río
Túria. Un festival explosif !
Quelques conseils pratiques
- Attention, durant une semaine, le centre de Valence est proscrit à toute autre circulation que celle des bus. Éviter de venir en voiture.
- Les suppléments des journaux locaux (El Levante, El Mercantil Valenciano, Las Provincias, El País) publient un plan très pratique sur les différentes fallas, leur emplacement, la catégorie de compétition, l’artiste fallero...
- Pour une mascletas endiablée, direction la plaza del Ayuntamiento : impressionnant ! Sinon, une mascleta de quartier coincée entre les arbres d’une petite rue peut faire tout autant de raffut, si ce n’est plus... Après une mascleta, être vigilant : il arrive que quelques carcasses n’aient pas explosé.
- Pour les feux d’artifice, les zones les mieux desservies se trouvent sur le paseo de la Ciudadela, le puente de Mar, la plaza de América, le puente Aragón et le paseo de la Alameda.
P’tites adresses à Valence
Où dormir ?
Attention ! Prévoir longtemps à l’avance son logement, car les hôtels
sont très rapidement bondés.
- Hostal Alicante, Ribeira 8, 46002. Tél. et fax : (00-34) 963-51-22-96.
Pas loin de la gare RENFE et de la plaza del Ayuntamiento. Au 2e étage.
Chambres à 30 € avec douche, 40 € avec douche et w.-c. Installées
dans un immeuble bourgeois donnant sur une rue piétonne où pullulent les bars
à tapas, des chambres simples, propres et équipées de l’AC, mais assez
petites (celles sur la rue sont plus grandes). Accueil jeune et sympathique.
Où manger ?
- La Riuá, c/ Mar 27. Tél. : (00-34) 963-91-45-71. Fermé
le dimanche et le lundi soir. Repas à la carte à partir de 15 €. Resto
spécialisé dans la cuisine valencienne et, à en croire les nombreux prix et
récompenses accrochés aux murs, l’un des meilleurs de la ville. Pas moins de
16 plats à base de riz, ainsi qu’un large choix de poisson, notamment un
excellent saumon albufera, arrosé par des vins de la région. L’accueil
est agréable et la clientèle assez touristique, ce qui n’empêchera pas le patron
de venir discuter à votre table pendant que sa femme fait la cuisine et son
gendre le service.
Pour en savoir plus
- Les Fallas ont leur site officiel ! Rendez-vous
sur www.fallas.com pour en connaître
le programme complet, retrouver l’historique de la fête ou encore découvrir
le visage de la Fallera Mayor 2004...
- Un autre site, avec de nombreux reportages sur la nouvelle édition des fallas
et leurs préparatifs : www.mundo-fallero.com.
On peut déjà y découvrir quelques-uns des ninots de cette année.
Texte : Clémentine Bougrat
Mise en ligne :