Laponie, sous les aurores boréales
Tout au nord de la Suède, au-delà du cercle polaire, la Laponie suédoise déploie en hiver ses grands espaces blancs préservés. C’est la terre du peuple sami, des rennes, des forêts de résineux, des lacs et des fleuves gelés. Avec, dans le ciel, les fameuses aurores boréales, à contempler avant d’aller se réchauffer dans un sauna ou de passer la nuit, si le cœur vous en dit, dans un hôtel de glace…
Préparez votre voyage avec nos partenairesLa Laponie suédoise, en remontant le fleuve Torneälven
Région la plus septentrionale du pays, la Laponie suédoise s'étend sur environ 110 000 km2 (soit un quart de la Suède) aux confins de la Norvège et de la Finlande. Alternant montagnes, lacs et forêts profondes, ses paysages comptent parmi les plus sauvages et préservés d’Europe. Côté mer, dans le golfe de Botnie, l’archipel de Luleå ne compte pas moins de 1 300 îles !
La Laponie suédoise est sillonnée par le troisième plus long fleuve du pays : Torneälven s’étire sur 520 km, son dernier tiers constituant la frontière avec la Finlande, avant de se jeter dans la mer Baltique, au niveau du golfe de Botnie.
Ce cours d’eau sauvage – sans aucun barrage – et d’une grande pureté est gelé une bonne partie de l’année, car ces contrées boisées, traversées par le cercle polaire, connaissent trois hivers, étalés sur six mois : l’automnal, de novembre à décembre, le printanier, de mars à avril, et le plein hiver, entre les deux. Ils s’intègrent aux huit saisons que dénombre le peuple sami, vivant en Laponie depuis des siècles.
Un périple nordique en remontant le fleuve Torneälven permet de découvrir la culture de ces anciens nomades vivant en osmose avec la nature.
Kukkola, saumon et sauna à la suédoise
La basse vallée de Torneälven est ponctuée de rapides, dont ceux de Kukkola, village aux eaux poissonneuses réputées chez les pêcheurs. Autrefois, ils attrapaient les nombreux saumons qui viennent frayer en été avec une sorte d’épuisette au long manche, depuis des pontons de bois. Le fleuve est peuplé d’une vingtaine d’autres espèces, dont le lavaret, ou syk, et la lamproie.
Les édifices en bois coloré du hameau de Kukkola ont été bien conservés, avec un petit musée de la pêche, une forge, un moulin à eau, la tour de l’horloge de 1855 et le bâtiment le plus vieux de tous, remontant à 1755 : la cabane où les pêcheurs faisaient une pause en grillant leurs prises du jour et en cuisant le pain traditionnel sami, ou gáhkku, dans l’âtre central.
Un peu plus loin sur la berge, au Kukkolaforsen Hotel, sont installés plusieurs saunas de formes différentes et parfois originales (une sorte de roulotte ou d’énorme ballon de foot, par exemple), constituant un musée dédié à cette pratique qui se dit « bastu » en suédois, sauna étant un terme finlandais.
En plus de les utiliser pour se relaxer, ces espaces bien chauds étaient souvent la pièce la plus propre des fermes d’antan. On y faisait sécher le linge, la viande et les grains. Les femmes y accouchaient même !
Aujourd’hui, les saunas sont toujours des lieux de socialisation, où l’on discute et où l’on prend même des décisions importantes. Sur la terrasse de la bâtisse principale, face au fleuve, deux bains bouillants fument à la lune, tandis qu’une aurore boréale verte apparaît à l’horizon.
Kiruna, au pays des Samis de Suède
Après avoir longé la frontière avec la Finlande, la route qui suit le fleuve bifurque comme lui vers le nord-ouest pour atteindre le bourg de Jukkasjärvi, sur la commune de Kiruna, à 200 km au-dessus du cercle polaire.
En sami, ce nom signifie « lieu de rencontre près de la rivière », car les nomades se rassemblaient jadis à cet endroit pour faire des échanges et prier dans la charmante église en bois du début du 17e siècle : à l’intérieur, les peintures bigarrées sur les murs évoquent l’art naïf.
Juste à côté, Nutti Sami Siida présente la culture samie avec des panneaux explicatifs sur l’histoire et la vie quotidienne, où la pêche, la chasse et l’élevage des rennes occupent une place centrale. Dans un enclos, ces derniers peuvent être approchés et nourris par les visiteurs. La plupart du temps, les cervidés aux bois impressionnants vivent en liberté, se déplaçant dans la nature pour trouver leur nourriture, accompagnés par les bergers samis.
Ce peuple indigène de l’Arctique se répartit sur plusieurs pays : Finlande, Norvège, Russie et Suède où la population s’élève à environ 17 000 personnes sur un total estimé à plus de 100 000.
Sous la tente traditionnelle du Nutti Sami Siida, nommée goahte kåtan, on peut déjeuner ou faire la fameuse pause café suédoise, le « fika ». Mais également découvrir que les Samis emploient 300 mots pour décrire les multiples nuances de neige !
Une nuit dans un hôtel de glace en Laponie
De la neige, il en faut beaucoup, chaque année, pour façonner l’hôtel de glace ICEHOTEL. Mais pas n’importe laquelle : en fait, il s’agit de neige artificielle, désignée, en anglais, par la contraction de snow et ice : snice, car c’est de la neige avec des cristaux de glace, plus compacte et isolante que la naturelle.
Les 35 000 m3 de snice nécessaires à la construction (l’équivalent de 700 millions de boules de neige !) sont produits avec des canons puisant l’eau dans le fleuve Torneälven, qui prend des allures de lac au niveau de Jukkasjärvi. Il fournit aussi les blocs de glace constituant la structure de l’igloo géant qui compte 35 chambres à -5 °C. Elles sont agrémentées de sculptures en glace réalisées par une trentaine d’artistes, designers, stylistes, graphistes, photographes, architectes, etc.
Depuis les années 1990, ce bâtiment éphémère accueille ses hôtes de décembre à avril, puis il fond. Fin 2016, il a été complété par l’ICEHOTEL365, une sorte de congélateur géant qui abrite 20 suites de glace où l’on peut dormir toute l’année. Elles sont décorées selon diverses thématiques : volutes inspirées par des tableaux de Klimt, immense tête de cerf, grandes méduses, jongleurs de boules de neige, etc.
À défaut de casser sa tirelire pour pouvoir y dormir, on peut s’offrir une visite guidée de cet univers fantasmagorique et boire un verre à l’Icebar : pas besoin de glaçons pour le cocktail, il est directement servi dans un petit bloc de glace…
Kiruna, de la mine aux pistes de ski
Autres activités proposées à Jukkasjärvi, dans la forêt ou sur la rivière gelée, les balades en traîneau tiré par des chiens ou des rennes, les promenades à motoneige, les randonnées en raquettes ou ski de fond… Et même du ski alpin à Kiruna, ville fondée il y a à peine plus d’un siècle pour accompagner l’extraction d’une sorte de fer appelée magnétite.
Des pistes éclairées – pour cause de nuit polaire en décembre-janvier – ont été aménagées sur les pentes de la montagne dont les entrailles furent exploitées de 1920 à 1979. Aujourd’hui, avec 28 millions de tonnes produites par an, c’est la mine souterraine de magnétite la plus importante au monde.
Elle se déplace avec l’exploration des filons… jusque sous le centre-ville qui est donc contraint de planifier son déménagement un peu plus à l’est, pour éviter les risques d’effondrement des immeubles et des maisons ! Une partie de la mine est ouverte à la visite.
Parc national d’Abisko : voir les aurores boréales
En poursuivant le chemin au fil du fleuve, vers le nord-ouest et la frontière avec la Norvège, on gagne sa source : c’est un immense lac glaciaire, baptisé Torneträsk. Il s’agit du deuxième lac le plus profond de Suède, atteignant plus de 100 m.
Il est situé dans le parc national d’Abisko, créé dès 1909, qui s’étend sur 77 km². On y pratique le ski de piste et de randonnée, les excursions avec raquettes, l’escalade sur glace… C’est aussi le point de départ de la piste royale, ou Kungsleden, célèbre sentier balisé qui s’étire sur 430 km en direction du sud.
La bourgade d’Abisko est dominée par l’Aurora Sky Station qui est un bon spot d’observation des aurores boréales. Installée sur le mont Nuolja, à 900 m d’altitude, elle bénéficie en général d’une excellente visibilité, car les nuages sont souvent retenus par les sommets alentour. Et, bien sûr, il n’y a pas de pollution lumineuse sur les hauteurs desservies par un télésiège de 2 km.
L’équipement complet est fourni avec le billet d’accès pour résister au froid polaire et profiter pleinement de la féérie dans le ciel. Les aurores boréales proviennent de tempêtes solaires dont les éruptions envoient des particules électrisées vers l’atmosphère terrestre qui sont ensuite attirées par les pôles. Ces phénomènes lumineux se produisent à plus de 100 km d’altitude, prenant la forme d’arcs, de rideaux ou de nuées allongées qui sont en général de couleur verte, mais peuvent virer au rouge quand l’aurore est puissante, au bleu ou au rose. Selon les croyances ancestrales des Samis, il s’agirait de la manifestation de morts disparus jeunes ou de manière violente et il était interdit de les pointer du doigt.
Évidemment, le spectacle est inoubliable si le ciel dégagé est au rendez-vous. Mais l’expérience est intéressante, quel que soit le résultat… D’abord l’ascension dans le silence de la nuit, les jambes dans le vide et le regard tourné vers la magnifique voûte étoilée. Puis le paysage qui se dévoile depuis l’Aurora Sky Station : la neige omniprésente et le vaste lac gelé qui reflètent la luminosité céleste et, au loin, l’étrange silhouette de la porte du Lapland, comme un U dessiné par deux falaises abruptes.
Ce n’est pas seulement les cieux qui fascinent, mais la Laponie qui s’étend sous nos pieds, riche de promesses.
Fiche pratique
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Site de l’office du tourisme de Laponie suédoise
Site de l’office du tourisme de Suède
Comment y aller ?
Vols quotidiens vers Luleå, capitale de la Laponie suédoise, et Kiruna via Stockholm, avec Norwegian Air et Scandinavian Airlines SAS. Trouvez votre billet d’avion.
Où dormir ?
- Kukkolaforsen Hotel à Kukkola. Tél. : +46 922 310 00. Chambre double : à partir de 142 €, avec petit déj et accès au sauna. Petit bungalow pour 2 : à partir de 111 €, avec petit déj et accès au sauna. L’ensemble hôtelier juste au bord du fleuve Torneälven propose différents hébergements : chambres doubles toutes neuves et cosy, bungalows pour deux à quatre personnes, avec kitchenette et coin salon-salle à manger, et même des emplacements de camping, pour l’été bien sûr.
- Lapland Guesthouse à Kangos. Tél. : +46 70 34 35 420. Chambre double : à partir de 110 €, avec petit déj. Depuis 2001, Johan Stenevad, gaillard au look de bûcheron, bâtit de ses mains cet ensemble de maisons en bois, dont certaines, centenaires, et ont été démontées puis reconstruites ici. Une trentaine d’hôtes peuvent y séjourner, dans un décor à la fois rustique et chaleureux, partageant parfois salle de bain et sanitaires. Ils profitent aussi du sauna, de la bonne table garnie de plats traditionnels lapons et de la jolie petite boutique, entre brocante et artisanat local.
- STF Abisko Mountain Station à Abisko. Tél. : +46 980 402 00. À l’auberge de jeunesse, nuitée à partir de 32 € par personne en dortoir. À l’hôtel, chambre double à partir de 150 €. Cet établissement centenaire est une auberge de jeunesse et un hôtel. Le Keron Hostel abrite des dortoirs de 4 à 6 lits avec sanitaires communs, sauna et cuisine partagée. La partie hôtelière comprend des chambres simples ou doubles, toutes avec salle de bains et toilettes privatives, au style fonctionnel épuré. Des cottages de 4 à 6 lits, avec salon-salle à manger et cuisine équipée peuvent également être loués.
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Où manger ?
- Spis : Bergmästaregatan 7, à Kiruna. Tél. : +46 980 170 00. Lun-ven 6 h-23 h, sam-dim 8 h-23 h. Plats : 14,50-35 €. Spis est multicarte : à la fois café, épicerie fine, restaurant et même hôtel de 25 chambres. Dans un cadre moderne et tendance, on déguste une cuisine internationale qui ne néglige pas les classiques de la région : soupe de champignons, ragoût de renne fumé, tartare d'élan, etc.
- Café Sápmi : Marknadsvägen 2, à Jukkasjärvi. Tél. : +46 980 2013 29. Tlj 10 h-17 h ou 18 h. Plats : 11-17 €. Installée sous une tente typique du peuple sami, cette adresse conviviale sert des plats traditionnels cuits sur le feu de bois au milieu des longues tables : suovas (viande de renne salée et fumée) avec de la confiture d’airelles ou soupe, accompagnés de gáhkku, le pain sami, et, en dessert, des gâteaux aux baies arctiques, comme la plaquebière (ou cloudberry).
Texte : Stéphanie Condis
Mise en ligne :