Nashville, Tennessee : au-delà de la country
Sur les bords de la rivière Cumberland, Nashville, la capitale du Tennessee (715 000 hab), porte en étendard son surnom de « Music City » depuis plus d’un siècle.
Nashville est le berceau de la country : les grands noms de cette musique s’y sont illustrés, de la voix suave de Dolly Parton aux basses profondes de Johnny Cash, et de nombreux musées y sont désormais consacrés. Mais Nashville dérive de plus en plus vers le rock et le métal dans les bars de Broadway.
Pour un peu, on en oublierait l’histoire de Nashville, son architecture et son rôle dans le mouvement des droits civiques. Une ville multiple, en plein boom, qu’il serait dommage de réduire à la country !
Préparez votre voyage avec nos partenairesNashville, berceau de la country
La country est à Nashville ce que le blues est à Memphis : une identité musicale, célébrée dans toute la ville, et notamment dans l’immense Country Music Hall of Fame and Museum. Ouvert en 1967 dans le quartier de Music Row - qui regroupait alors tous les studios d’enregistrement -, puis déplacé au centre-ville en 2001, ce musée indispensable remonte aux origines de la country : du hillbilly des Appalaches, digressant vers le honky tonk, se dressant contre le blue grass.
Vidéos, anecdotes, photos, enregistrements retracent le genre jusqu’aux années 60 : 2 millions d’artefacts exposés, ça étourdit et il faut vraiment être fan – et avoir le temps ! - pour tout détailler. Mais l’on s’attarde volontiers devant une guitare de Johnny Cash et la Cadillac plaquée or d'Elvis Presley. Mythique !
Dans la foulée, au départ du musée et en bus, on file découvrir le mythique RCA Studio B dans le quartier de Music Row : de Don Gibson à Dolly Parton en passant par Patsy Cline et Elvis Presley - dont on admire le Steinway préféré –, la visite guidée (seulement en anglais) enchaîne les anecdotes. Et finit, dans le noir, par l’écoute de la voix veloutée du King.
On complètera ces visites par le Musicians Hall of Fame qui met à l’honneur les compositeurs, les musiciens, les arrangeurs, bref tous ceux qui font la country !
Certes, Johnny Cash venait de l’Arkansas, mais c’est bien à Nashville qu’il enregistra ses plus grands succès. Immanquable si vous êtes un inconditionnel.
Broadway : le son de Nashville en live
Nashville a aussi son (Lower) Broadway, alias Honky Tonk Highway, vers lequel on est implacablement aimanté. Une rue, large, longue qui clignote, jour et nuit, de ses néons multicolores. Broadway vibre d’une cacophonie permanente, notamment en été, lorsque portes, fenêtres, vitrines s’ouvrent largement aux passants. Riff de guitares, beats de batterie, voix saturée, clavier endiablé… le « son » Nashville n’a pas disparu !
Premier étonnement, toutefois, pour ceux qui venaient écouter de la country : le rock et le métal dominent désormais. Mais des institutions s’accrochent tels Robert's Western World ou Tootsies Orchid Lounge.
Dès la nuit tombée, l’ambiance est survoltée. Les trottoirs grouillent, mélange de locaux, d’enterrements de vie de jeune fille et de grappes de touristes. Chapeaux de cow-boy Stetson et santiags sont souvent de mise - la boutique dédiée aux bottes ne désemplit pas.
Chaque club a son cerbère à l’entrée : vérifiant les pièces d’identité – une obligation, quel que soit votre âge - refoulant ceux déjà trop éméchés. On reste 5 minutes dans celui-ci, une heure dans le suivant : la qualité des prestations est assez variable, du groupe débutant au talent stupéfiant.
Puis on s’écarte de cette bande passante pour s’enfoncer dans Printer’s Alley, à moins de 10 minutes à pied. Sous son aspect coupe-gorge, cette ruelle éclairée par endroits de lampions a troqué, dès l’époque de la prohibition, ses imprimeries contre des bars clandestins et des clubs de jazz. Quelques rares ont survécu, comme le Skull's Rainbow Room qui mixte soirée jazz, blues et burlesque dans une agréable pénombre.
On entre sans payer dans la majorité des clubs, mais chaque groupe fait passer son tip’s bucket - seau à pourboire : alors, si vous aimez, n’oubliez pas l’artiste !
Ryman Auditorium et Grand Ole Pry : gospel, stand-up et grand-messe country
C’est d’abord l’histoire de Thomas Ryman, riche fêtard converti en évangéliste convaincu, qui décide de construire en 1892 cette église de briques rouges pour sauver l'âme de Nashville.
Las ! Les factures s’accumulent. Sous l’impulsion de Lula Naff, une jeune femme aux idées audacieuses, l’amphithéâtre à la formidable acoustique accueille peu à peu des célébrités plus cathodiques que catholiques : de Charlie Chaplin à Houdini, en passant par Caruso.
Puis, de 1943 à 1973, le Ryman Auditorium héberge le Grand Ole Opry, grand-messe country enregistrée chaque semaine pour la radio. S’y côtoyaient des légendes comme des talents en devenir comme Elvis Presley ou Minnie Pearl.
Sauvé de la démolition il y a une trentaine d’années, le Ryman a étendu sa palette de spectacles : country bien sûr, mais aussi stand-up, artistes étrangers…. Aujourd’hui, sa visite est l’occasion d’un voyage dans le voyage dans le temps, raconté par Emmylou Harris ou Ricky Staggs. Elle s’achève sur la scène même où vous pouvez vous prendre en photo devant le micro.
Le Grand Ole Pry fête ses 100 ans en 2025, et ce centenaire faut toujours courir les foules. Pour assister à un enregistrement du show le plus fameux des US, direction le plus grand centre commercial de l’Etat à 20 minutes du centre, sur 600 Opry Mills Dr. C’est ici désormais que se trouve le théâtre accueillant les enregistrements.
Les alentours – une zone commerciale sans âme dans un méandre de la rivière – ont beau être déprimants, le Grand Ole Pry continue à mettre une ambiance du tonnerre. Hors enregistrement, le théâtre peut se visiter.
Pour connaître les dates des shows consulter le site opry.com
À deux pas du Ryman, le National Museum of African American Music retrace 400 ans d’histoire de la musique afro-américaine, tous styles confondus depuis l’Afrique jusqu’aux Etats-Unis, des chants des esclaves jusqu’au hip-hop à l’aune des contextes social et politique de chaque époque : interactif, très riche, un musée essentiel.
Visiter Nashville historique
Pour en savoir plus sur Nashville et sa région, on commence par le Tennessee State Museum. Encore un musée ? Certes, mais une autre pépite et gratuite en plus ! Des premiers peuples à la guerre civile, des fondations aux transformations des plus récentes, chaque époque est décortiquée avec ses objets, œuvres d’art, meubles, photos, reconstitutions.
On butine selon ses centres d’intérêt, entre histoire politique, culturelle et sociale. Son architecture, contemporaine, se veut notamment clin d’œil au Capitole de l'État.
Les monuments intéressants ne sont pas légion à Nashville, raison de plus pour ne pas les manquer. Un dôme, des portiques ioniques, des fresques délicates, du calcaire et du marbre… Le Capitole, monument néogrec à souhait érigé par William Strickland, toise la ville du haut de sa colline.
En contrebas, dans le parc Centennial, un des poumons verts de la ville, une réplique à l’échelle du Parthénon d’Athènes qui vous attend. Érigé en 1897 pour l’exposition internationale du centenaire du Tennessee, il ne vaut pas l’original côté facture, mais c’est à voir ! D’ailleurs, Nashville était surnommée à l’époque l’« Athènes du Sud ».
À l’intérieur, on se presse pour contempler la reproduction toute dorée de la statue d’Athéna, œuvre d’un artiste local, Alan LeQuire. Haute de plus de 13 m, mélange de plâtre et de fibre de verre recouvert de 8 kg de feuilles d'or, elle reste impressionnante.
Autre bijou de la même époque, l’ancienne gare Union Station, inaugurée en 1900, a été transformée en hôtel de luxe. Entrez-y pour admirer le hall, juste sublime.
Enfin, il y a les vestiges du Fort Negley, souvent négligé : c’était pourtant la plus grande fortification bâtie par l'armée de l'Union durant la guerre civile. Tout en pierre, rondin, métal et terre, plus de 2 700 Afro-Américains y ont sué. 300 seulement ont été payés.
Si vous y passez le 19 juin, joignez-vous à la foule qui célèbre, dans une ambiance à la fois émouvante et joyeuse, Juneteenth, la fête nationale qui marque l'émancipation des esclaves.
Prendre une voiture est une contrainte nécessaire dès que l’on sort du cœur de ville : pas de parcmètres, mais une appli à télécharger pour payer le stationnement. Et gare à ceux qui oublieraient, les caméras veillent partout.
Les nouveaux quartiers de Nashville en plein boom
Un « gulch » ? C’est un ravin. Celui-ci, glissé entre deux bretelles de périph à 10 minutes à pied de Broadway, est une ancienne gare de triage abandonnée dans les années 1950.
L’endroit a gardé son nom (The Gulch), mais déploie aujourd’hui des entrepôts transformés en lofts, des immeubles de bureaux flambant neuf, mais aussi restaurants branchés et boutiques stylées, galeries d’art léchées et street art coloré. Ce vrai repère à hipsters cache aussi des pépites comme le Station Inn, rare salle de concert au parfum seventies.
On continue pour accéder aux maisons de briques de Germantown. Fondé par deux investisseurs de Virginie en 1786, l'endroit doit son nom aux immigrants allemands qui s’y installent 50 ans plus tard.
L’arrivée d’Italiens, de Suisses, de juifs vint joyeusement bousculer et enrichir le quartier, mélange de cottages ouvriers, de maisons néogothiques, de demeures en briques composant un ensemble préservé et classé. Sans oublier le marché fermier, ouvert en 1802 : plusieurs fois reconstruit et rénové, il offre une débauche de produits souvent bios, et un food court où il fait bon s’attabler.
Des bâtiments victoriens, East Nashville en comptait de fort beaux jusqu’au 22 mars 1916, lorsqu’un violent incendie détruisit plus de 500 maisons à Edgefield. Il en reste cependant quelques-unes, au milieu de rues bien larges, aux maisons joyeuses.
Le quartier est devenu une plaque tournante artistique, blindée de restaurants, et de bars : on fait le grand écart entre un diner des années 50 et une table fusion japonaise gastronomique, on passe des heures au milieu des vinyles de Grimey's Records ou dans cette caserne de pompiers convertie en gigantesque boutique vintage.
Chaque mois entre mai et décembre le parking principal de Gulch se transforme en marché de nuit hippie chic, où acheter des fringues vintages, grignoter de la street food… De son héritage, Germatown a conservé son Oktoberfest, où les schnitzel et les strudels bravent, le temps du festival, poulet frit et banana pudding et le oompah nargue la country !
Fiche pratique
Retrouvez tous les bons plans et les adresses dans le Routard Louisiane et les villes du Sud en librairie
Consulter notre guide en ligne États-Unis
Office de tourisme de Nashville
Comment y aller ?
Aucun vol direct, mais des liaisons quotidiennes depuis Paris-CDG vers Nashville via Atlanta, Detroit, Minneapolis… avec Air France, American Airlines, Delta ou United Airlines. Trouvez votre billet d’avion
Bon à savoir
Si vous comptez visiter plusieurs musées, le Nashville City Total Access Pass sur 3 jours s’avère une bonne solution. Il inclut de surcroît la passionnante découverte de la distillerie Jack Daniel’s, à 1 h de route de la ville.
Où dormir ? Où manger ?
- Bode Nashville : 401 President Ronald Reagan Way. On le choisit pour l’emplacement vraiment central, à 5 minutes à pied du Country Music Hall of Fame. Plus qu’un hôtel, ce sont plutôt des studios ou apparts, au design modern, les plus grands avec cuisine et des espaces communs sympas pour prendre un verre ou grignoter un bout. Et il y a même une guitare dans certaines entités ! A partir de 118 $.
- The Russel : 819 Russel Street. Une église reconvertie en hôtel, en plein cœur d’East-Nashville, on signe de suite ! Doubles à partir de 175 $.
- Black Rabbit : 218 3e Avenue North. Un bâtiment historique planqué dans le quartier de Printer’s Alley, avec hauts murs de briques et plancher. Dans l’ancien cabinet de Tommy Osborn, l’avocat véreux du mafieux Jimmy Hoffa, on dîne de viandes cuites au feu de bois escortées de beaux légumes, on craque pour le mini-burger au lapin ou la truite arc-en-ciel dans une ambiance cool et cosy. Plats 28-59 $
- Noko : 701, Chemin Porter. Vrai coup de cœur pour ce restaurant fusion asiatique à la cuisson au feu de bois, à East Nashville : assiettes délicatement présentées, saveurs vraiment subtiles (testez donc les shishitos carbonisés et la poitrine de bœuf Wagyu), un accueil adorable, et des prix très corrects pour un bistronomique, le tout servi sur une agréable terrasse. Plats 13-25 $.
Trouvez votre hôtel à Nashville.
Où sortir (et souvent manger aussi) ?
- Rippy’s Honky Tonk : 429, Broadway. Finger food et classiques du sud : les portions énormes invitent au partage. Des groupes de rock souvent excellents même si la sono n’est pas terrible.
- Whiskey Bent Saloon : 306, Broadway. Un comptoir tout en longueur, une petite scène, des cocktails généreux et des live rock et parfois country de très bonne qualité. Ambiance plutôt calme par rapport aux voisins !
- Lucky Bastard Saloon : 408, Broadway. On y boit, on y mange, mais surtout on plonge dans une ambiance assez folle quand le live fait le show.
- Attaboy : 8 Macferrin Avenue. Un mur vert, une porte fermée. Frappez. Ce bar de East Nashville, façon speakeasy, concocte des cocktails à votre goût !
Texte : Pascale Missoud
Mise en ligne :