En ce moment, une grande effervescence règne dans les villages ; on va célébrer Galungan partout sur l’ile. Tous les 210 jours, les Balinais invitent en effet les dieux et les ancêtres à venir sur terre fêter la création de l’Univers et prient pour la victoire de la vertu sur le démon.
Là encore, la créativité balinaise est à l’honneur. Les plus gros impressionnent vraiment. Nous nous demandons même comment ils vont pouvoir être relevés sans casse avant d’être fichés dans le sol, devant la demeure. Il y a deux ans, Wyan, le fils de nos logeurs, avait brisé le sien en le redressant avec des amis après l’avoir patiemment fabriqué durant trois jours sur des tréteaux installés dans la rue. Il avait dû scier la base, mais avait perdu deux bons mètres de hauteur. J’espère que ses ancêtres qui s’en servent de balise depuis le Paradis ont malgré tout pu retrouver le temple familial. Les Balinais croient en effet que leurs aïeux redescendent sur terre durant cette période, participent aux festivités, s’amusent, profitent des offrandes et ne repartent que dix jours plus tard, au moment de Kuningan.
Quand les allées des villages en sont bordées, le spectacle de ces hautes perches se balançant au gré du vent est vraiment unique et beau. Avec Chantal, nous ne nous lassons pas d’arpenter les rues d’Ubud et les environs pendant cette période.
La veille de Galungan, très tôt le matin, les messieurs préparent le lawar, plat traditionnel incontournable très épicé. Wayan nous en offre deux grandes assiettées. À voir sa joie de le partager avec nous, nous acceptons avec enthousiasme ce mets de riz, de viande et de légumes, même si nous n’avons pas l’habitude de déjeuner. Communément servi avec du porc, le poulet a été choisi pour celui de cette année. Peut-être les soubresauts du volcan Agung et l’évacuation de sa proche région riche en élevages y sont-ils pour quelque chose ? En tout cas, nous nous régalons !
Le jour de Galungan, commémoration de la création de l’univers et fête très importante pour les locaux, nous accompagnons Suan, Ella et Lista au Pura Dalem, temple public. Pour cela, nous avons comme tout le monde endossé nos habits balinais. Les messieurs et les dames, les petits et les grands, tous portent la tenue de cérémonie. Alors que les hommes sont vêtus de blanc, symbole de pureté, nous notons que les femmes arborent une mise pour une fois sans code de couleurs précises ; elles en sont d’autant plus belles. Un peu en retrait, nous assistons à la célébration où se côtoient dans un balai incessant, mais respectueux, toutes les familles du quartier. Le prêtre bénit alors les offrandes amenées sur la tête par les dames, avant que l’assemblée ne se recueille pieusement et s’orne la chevelure de pétales de fleur, sans distinction d’âge et de sexe. Après la cérémonie au pura, nous prenons la moto pour nous rendre dans les villages avoisinants admirer ces chefs-d’œuvre pointés vers le ciel et fabriqués principalement avec des produits liés à la terre. Nous sillonnons des routes et des rues magnifiques et, aussi modestes soient-ils, les penjor ont tous une grâce qui nous enchante.En cette journée radieuse, nous stoppons très souvent la moto pour les photographier tranquillement sous tous les angles. En ce jour de visite à la famille, la circulation sur les routes reste très fluide et je me réjouis de pouvoir conduire sans avoir à slalomer dans les embouteillages devenus courants. Je retrouve le Bali de voilà seulement quelques années, lorsqu’il était encore facile de se déplacer au milieu des motos. Les gros véhicules, souvent mal maitrisés par leur chauffeur, remplacent de plus en plus les deux-roues et font partie de la panoplie de ceux qui veulent montrer qu’ils ont réussi… dans la vie, mais certainement pas dans le pilotage ! Bref, aujourd’hui, je retrouve le plaisir de me promener dans Bali. Profitons-en bien, demain il sera trop tard !
Après une dernière Bali Hai sirotée sur notre terrasse, nous allons diner au Rai Pasti et savourer le fameux arak madu, l’alcool de riz mélangé à du jus de citron vert et du miel ! Nous terminons joyeusement la soirée au Laughing Bouddha Bar devant une Bintang en assistant à un bon concert de musique rock. Un peu trop rock pour Chantal dont les oreilles demandent vite grâce !…