Almería, l'Andalousie entre mer et désert

Almería, une Espagne aux airs de Maghreb

Dépassant la notoriété de Grenade au XIIIe siècle, Almería a perdu depuis de sa superbe avec la reconquête par les chrétiens et le tremblement de terre de 1566. La forteresse musulmane est désormais une cathédrale de style gothique tardif et Renaissance et la ville file des jours tranquilles loin du surtourisme…

Dominant la ville depuis la colline de San Cristobal, la citadelle de l’Alcazaba a été construite en 955 par les Arabes. Laissée à l’abandon pendant cinq siècles et magnifiquement restaurée, elle garde un charme unique. Derrière la porte de la justice, les murailles crénelées enserrent des jardins bordés de canaux et de bassins.

Un ancien réservoir, à droite de l’entrée de la salle du palais, illustre à quel point l’eau était déjà au centre des préoccupations. Comme pour l'Alhambra mais dans une moindre mesure, cet ancien palais militaire bénéficiait de jardins d’agréments.

En continuant à travers les vestiges de l’ère musulmane, on débouche sur l’Alcazar chrétien, édifié après la prise de la ville en 1489 par les rois catholiques. Une cour flanquée de la tour de l’Hommage décorée de lions domine un magnifique paysage désertique, ainsi que le quartier populaire de la Chanca, aux airs de médina maghrébine.

Almería, entre visites insolites et musées d’art

Sur la terrasse du kiosque Amalia au cœur de la ville, les habitants sirotent un lait froid, liqueur de cola, cannelle, citron. Un breuvage hérité de la guerre civile espagnole qui a fortement touché la ville. Dès 1937, quatre kilomètres de galeries souterraines ont été construites pour protéger 34 000 civils des bombardements. L’entrée de ces abris, aujourd’hui ouverts à la visite, se situe à proximité du kiosque, sur la plaza Manuel Perez Gracia. La visite de ces Refugios de la Guerra (2 h, résa obligatoire) débouche sur un hôpital de fortune particulièrement émouvant.

En se rapprochant du port, un drôle d’ouvrage en fer dans le pur style Eiffel s’avance dans la mer sur la plage des Almadrabillas. Construit en 1902 par les Anglais, cet ancien quai de chargement surnommé cable inglés permettait d’expédier par la mer le minerai provenant des mines situées à côté de Grenade. Déclaré bien culturel andalou en 1998, il a été transformé en paseo pour déambuler jusqu’à la mer.

Retour dans le cœur historique d’Almería pour visiter la maison du poète José Angel Valente qui ne manque pas d'excentricité. Venu dans le sud de l’Espagne à la recherche de la lumière, l’auteur de Paysages avec des oiseaux jaunes a laissé dans cette maison l’âme d’un être mélancolique, de la bibliothèque jusqu’au salon en passant dans sa salle de bain. Un voyage poétique et gratuit dans une jolie maison bourgeoise datant de 1868.

Autre belle demeure de la fin du XIXe, la Casa del Cine abrite un musée du cinéma. De quoi en savoir plus sur le Cinecitta andalou et les décors  de Lawrence d’Arabie, Le Bon, la Brute et le Truand ou d’Indiana Jones et la dernière croisade qui furent tournés dans la région, notamment dans le désert de Tabernas et au Cabo de Gata.

Enfin si vous êtes un fan de musées, mais aussi d’art, faites un détour par le Museo de la Guitarra dédié à Antonio de Torres, luthier du XIXe s natif d’Almería, considéré comme le père de la guitare moderne, ou au Centro andaluz de la Fotografía pour ses expos photos.

Mojácar et Níjar, deux villages blancs aux portes d’Almería

Longtemps placé sous la domination arabe et le califat de Cordoue, Mojácar, à 1 h d route au nord-est d’Almería et proche de la mer, s’est vu maintes fois attaqué par les pirates et les barbares, d’où son architecture défensive. Ce village blanc conserve sa structure de terrasses en escaliers. En bas, le lavoir décoré de marbre où se donnaient rendez-vous les femmes du village est resté en parfait état.

Dans ses venelles alambiquées et ses façades de maisons blanchies à la chaux, on retrouve le tracé et l’architecture des médinas. Mais les pots de fleurs accrochés aux maisons laissent deviner le style du Sud de l’Espagne.

Au cœur du village s'élève l’église Santa Maria construite au XVIe s à l’emplacement d’une ancienne mosquée. Autour, les terrasses de cafés et les boutiques artisanales ponctuent les rues pentues. Au loin, la vue sur la sierra de Gata est grandiose. 

Níjar situé à une 30 mn de là en direction du Cabo de Gata est moins touristique. Placé sur une colline aux pentes douces, ce village est connu pour la qualité de son artisanat hérité des arabes et ses ruelles tortueuses qui ont inspiré les artistes.

Dans les deux villes des sculptures d’Indalo, personnage stylisé avec les bras écartés et levés vers le ciel, peuplent les places et les murs crépis en signe de paix.

Cabo de Gata, cabotage autour des criques sauvages

À l’est d’Almería, un paysage semi-aride ponctué d’agaves, de palmiers et de succulentes surgit dès les dernières serres en plastiques dépassées (la région est le plus gros producteur de courgettes et de tomates d’Espagne !).  Bienvenue au parc national du Cabo de Gata qui commence à une trentaine de kilomètres de la ville et se poursuit sur soixante-trois kilomètres de côte.

Les randonneurs peuvent sillonner une bonne partie du parc grâce à une quinzaine de sentiers balisés sans grande difficulté. Mais, depuis la mer, ses criques sont encore plus spectaculaires. Entre les coulées de lave ravinées incrustées de granit blancs, les plages blanches et noires aux eaux cristallines et le pico de los Frailes qui culmine à 500 mètres, le spectacle est à la hauteur des espérances !

Des airs de Fuerteventura planent sur ce bout de terre d’origine volcanique balayé par les vents, malmené par les éruptions, colonisé par les algarves dont les fleurs ressemblent à des parasols.

Le Cabo de Gata, réputé pour ses plages (Los Genoveses, Monsul ou Los Arcos) mérite aussi le détour pour la richesse de sa faune sous-marine. Reconnu Géoparc et réserve de biosphère par l’Unesco, il possède des fonds marins couverts de posidonies regorgeant de crabes, de poulpes et de poissons visibles rien qu’en se penchant sur la mer bleu turquoise. Magique !