Il était une fois Bollywood
Auteur : Jonathan Torgovnik
Editeur : Phaidon
115 Pages
Avec plus de huit cents nouveaux films tournés chaque année, l'Inde est le premier producteur de cinéma au monde. Mais les particularités du cinéma de Bollywood (jeu de mot formé sur Bombay et Hollywood) le confinent, à l’exception de quelques succès internationaux, au seul public indien. Le terme « confiner » reste toutefois relatif, puisque quatorze millions de personnes se déplacent quotidiennement dans les salles obscures du pays afin de s’adonner à ce qui est, pour la plupart d’entre elles, leur unique divertissement. Dans Il était une fois Bollywood, le photographe Jonathan Torgovnik nous immerge au cœur de cette culture cinématographique singulière, à la rencontre d'un peuple amoureux de son septième art. En quatre chapitres et une centaine de photos, il s’immisce dans les coulisses de l’industrie bollywoodienne et témoigne de son impact sur la société indienne.
Les longs-métrages indiens respectent des thèmes et une structure quasi immuables, que l’on retrouve dans cet ouvrage. L’amour fou est célébré à travers des scènes de danses et de chants, les pudiques scènes d’amour évitent de heurter la morale, tandis que les spectaculaires scènes d’action assurent le triomphe du bien sur le mal… Torgovnik ne se focalise pas uniquement sur les événements se déroulant devant la caméra, il immortalise également toute la faune qui s’agite frénétiquement derrière les objectifs pour donner vie à une histoire : techniciens, maquilleurs, cascadeurs, décorateurs… Une galerie de portraits permet de faire connaissance avec les acteurs et les actrices campant les personnages récurrents des innombrables productions de Bollywood, tels le héros, beau gosse à la vertu irréprochable, la jeune vierge, amoureuse transie, l’ennemi à moustache, version cinéma du démon des contes épiques hindous, etc.
C'est en s’éloignant des plateaux et lieux de tournage que Jonathan Torgovnik capte l’essence de la culture cinématographique indienne. Les carrefours des grandes villes d’Inde sont de véritables odes au cinéma local, les affiches de films s’y disputent le moindre espace libre avec les effigies géantes des acteurs et actrices vedettes. Le culte voué à ces mêmes vedettes est digne de celui accordé aux divinités. Il n’est, par conséquent, pas étonnant de voir de longues files d’attente devant les cinémas de Mumbay ou de Calcutta. Quand le projectionniste, de sa cabine surchauffée, lance le film, le spectacle se fait sur l’écran, mais aussi dans la salle, le public n’hésitant pas à manifester ses sentiments.
Loin des villes, la ferveur pour le septième art est moins exacerbée, mais néanmoins présente grâce au cinéma itinérant. Dans chaque village visité, les habitants s’installent à même le sol, sous une tente dressée pour l’occasion, afin d’assister à la projection de plusieurs films jusque tard dans la nuit. Ainsi, personne n’est exclu de la magie de Bollywood, élément identitaire indien au même titre que la religion.
Préfacé par Nasreen Munni Kabir, spécialiste du cinéma indien, ce livre constitue une bonne introduction à l’univers de Bollywood. En nous proposant d’être le témoin privilégié d’un tournage à la FilmCity de Mumbay, ou spectateur parmi les spectateurs dans un cinéma bruyamment ventilé de Chennai, les photos de Jonathan Torgovnik nous permettent de toucher du doigt, ou tout du moins des yeux, le quotidien d’un cinéma vécu passionnément.
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Texte : Antonin Samson
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