Irlande : la vallée de la Boyne, historique et secrète
Située à moins d'une heure de route au nord de Dublin (environ 50 km), la vallée de la Boyne concentre sur un petit territoire de nombreux sites historiques et collectionne les superlatifs : on peut y voir l’un des sites mégalithiques les plus importants d’Europe, la plus haute croix celtique et le plus grand château anglo-normand d’Irlande, mais aussi des monastères dont la fondation remonte au VIe siècle.
Et si l’on ajoute à cela ses villages pittoresques et sa belle campagne irriguée par le fleuve Boyne, ligne de vie qui traverse trois comtés, de Trinity Well à Drogheda, on se dit que ce petit coin d’Irlande mériterait vraiment d’être plus connu.
En 1849, William Wilde, le père d’Oscar, écrivait que l’histoire de l’Irlande pouvait se résumer à travers les monuments de la Boyne. Et il n’avait pas tort !
Préparez votre voyage avec nos partenairesBrú na Bóinne, sur les traces de la préhistoire
Dotée de sols riches et fertiles, la vallée de la Boyne est occupée par l’homme depuis au moins 6 000 ans. Sur la rive nord de la rivière, on découvre des vestiges mégalithiques exceptionnels : l’ensemble de Brú na Bóinne, inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco.
Le site le plus connu est le grand tumulus funéraire de Newgrange, situé à l’ouest de Drogheda, qui fut construit vers 3200 av. J.-C. (avant les pyramides égyptiennes de Gizeh !).
L’expo du Centre des visiteurs (chapeau à la scénographie) donne des infos intéressantes sur le site, les croyances et les rites des hommes du Néolithique. On apprend aussi qu’à chaque solstice d’hiver, un rayon de lumière pénètre à l’intérieur du tumulus.
Après l’expo, vous pourrez prendre une navette pour visiter le tumulus « en vrai » et admirer ses pierres gravées de signes mystérieux, notamment des spirales. Des motifs que l’on retrouve sur le site de Knowth, qui possède aussi des tombes à couloir ornées de pétroglyphes. En montant sur la terrasse aménagée sur les hauteurs du site, on a une vue panoramique sur toute la campagne.
Quant au site de Dowth, on peut le voir de l’extérieur, mais il ne se visite pas, étant toujours en cours de fouille.
Beaucoup plus confidentiel est le site de Four Knocks, à 25 min au sud de Newgrange. Perdue au milieu des champs, une petite colline (Four Knocks viendrait de Fuair Cnocs, qui signifie collines froides) dissimule en son sein une tombe collective datant de 3000 à 2500 av. J.-C. On y admire plusieurs pierres gravées de très beaux motifs. Pour y accéder, il faut demander la clé à la famille White, qui n’habite pas loin (tél. : +353 (0) 1 8354722, avant 18h).
La mythique colline de Tara
À première vue, à part le superbe panorama, il n’y a pas grand-chose à voir sur ces vertes collines. C’est que le lieu nécessite des explications. Si vous n’avez pas l’occasion de participer à une visite guidée, rendez-vous au centre des visiteurs (ouvert de mi-mai à mi-sept.) installé dans l’église du XIXe siècle sécularisée, ou jetez un coup d’œil aux panneaux à l’entrée du site où quelques infos et des photos aériennes rendent les choses un peu plus évidentes.
Le plus ancien monument visible est le mont des Otages, un tumulus datant de 5 millénaires. Mais c’est à partir de l’âge de fer que Tara a pris toute son importance. On raconte que les anciens rois venaient ici se faire couronner. Selon la légende, si un homme digne de devenir roi plaçait son pied sur la pierre du destin (Lia Fáil), encore visible aujourd’hui, celle-ci se mettait à crier (libre à vous d’essayer !).
Tara était aussi un haut lieu de culte druidique, donc dans le collimateur de saint Patrick, qui, dit-on, alluma un feu à Pâques sur la colline de Slane en 433, pour défier les druides qui célébraient leur propre fête sur la colline de Tara.
Apparemment, le saint patron de l’Irlande a gagné la partie. Sa statue s’élève aujourd’hui à Tara. Ce qui n’empêche pas les nostalgiques de l’époque celtique de considérer cette colline comme un lieu sacré. Ils viennent y réaliser des rituels, et déposer des offrandes près de la source de Tara (Well of Tara), que les catholiques appellent St Patrick's Well…
Allez donc faire un tour dans la boutique-atelier du sympathique Courtney Davis, un artiste gallois branché ésotérisme, art celtique et viking, légende arthurienne, bouddhisme... Après quoi, vous pourrez aller vous poser dans le chaleureux Tara Cafe, tenu par une famille (les Maguires), qui a aussi une boutique de souvenirs.
Le très rock’n’roll château de Slane
Imposant château surplombant la rivière Boyne, Slane Castle est la résidence de la famille Conyngham depuis 1703 (qui le fit reconstruire en 1785). Son actuel propriétaire, Lord Henry Mountcharles, 8e marquis de Conyngham, est considéré comme le plus célèbre aristocrate d’Irlande. Il faut dire que c’est un personnage. On découvre son talent de conteur dans le film qui est projeté au début de la visite.
Dans les années 1970, voulant rendre ce lieu historique vivant, le marquis a décidé d’y organiser des concerts, et quels concerts ! Sur la scène aménagée sur les pelouses du château se sont produits, entre autres, Queen, Bruce Springsteen, les Rolling Stones (2 fois), David Bowie, Madonna, Bob Dylan, Oasis, Eminem, Metallica… et bien sûr U2 (3 fois), qui ont enregistré ici leur 4e album, The Unforgettable Fire.
Un nom qui fait référence à l’incendie qui a fait de gros dégâts en novembre 1991. Il faudra 10 ans pour tout reconstruire. Aujourd’hui, l’aventure continue, avec encore d’autres concerts (dont Harry Styles, en juin 2023).
En 2017, une distillerie a vu le jour à Slane Castle. Elle a été aménagée dans les anciennes écuries. Au cours de la visite, vous découvrez le procédé de fabrication, avant de déguster le whiskey Slane, résultat de l’assemblage de trois maturations… et vraiment bon
Monasterboice et ses hautes croix
Au nord de Drogheda, Monasterboice rappelle un peu Glendalough, dans le comté du Wicklow. Et pour cause : les deux sites monastiques datent de la même époque, et furent fondés au VIe siècle.
Entourés de verdure, les vestiges de l’abbaye de Monasterboice invitent à la contemplation ou à la rêverie. Dans le cimetière, on trouve nombre de grandes croix celtiques, et notamment la South Cross (le plus souvent appelée croix de Muiredach). Haute de 5,5 m, elle est gravée de scènes bibliques d’une rare finesse sur ses quatre faces.
Moins bien conservée, la Tall Cross (également appelée West Cross) porte bien son nom puisque c’est la plus haute d’Irlande (env. 7 m). En face s’élève une tour ronde en ruine (env. 35 m de haut). Victime d’un incendie en 1097, elle est cependant restée debout, même si les trésors (manuscrits, reliques) qu’elle abritait ont été irrémédiablement perdus.
On découvre d’autres hautes croix celtiques à Kells (Kells High Crosses), le village où le Livre de Kells, célèbre manuscrit enluminé paléochrétien, aurait été achevé (l’original est conservé dans la bibliothèque du Trinity College de Dublin). Là aussi, une tour circulaire a été érigée. On en retrouve une autre dans le cimetière de Donaghmore, datant du IXe ou du Xe siècle.
Old Mellifont Abbey, romantiques ruines
À 6 km au sud de Monasterboice, les ruines de l’ancienne abbaye de Mellifont sont d’une grande beauté. C’est la première abbaye cistercienne à avoir été fondée en Irlande, en 1142, par saint Malachie, avec l’aide de moines français, originaires de Claivaux.
Riche et influente à l’époque médiévale, elle fut fermée en 1539, lorsqu’Henri VIII ordonna la dissolution des ordres religieux. Des traces de sa grandeur passée subsistent.
L’édifice le plus remarquable est un bâtiment octogonal de deux étages, où les moines faisaient leurs ablutions. On admire aussi de belles arches de style roman, des vestiges du cloître.
Si vous aimez les abbayes cisterciennes, allez donc admirer Bective Abbey, qui fut fondée en 1147, 5 ans après Mellifont. Les vestiges visibles aujourd’hui (église, cloître d’architecture gothique) datent, pour l’essentiel, des XIIIe-XVe siècles. Le site apparaît dans les films The Last Duel et Braveheart.
Trim, le plus grand château anglo-normand d’Irlande
On retrouve Braveheart à Trim, dont le château a servi de décor au film. Surplombant la rivière Boyne et les ruelles du centre ancien, Trim Castle est le plus grand château anglo-normand d’Irlande. Bâti à partir de la fin du XIIe siècle, il en impose, avec sa tour dont les murs affichent 3 m d’épaisseur et ses hauts remparts. Des visites permettent de découvrir son histoire et de grimper en haut du donjon, d’où l’on profite d’un panorama sur la ville et la campagne environnante.
L’office de tourisme a édité une brochure proposant un itinéraire pour découvrir les sites historiques de la ville (Trim Historic Trail, disponible aussi sur Internet). Parmi les étapes, on peut citer l’abbaye St. Mary (XVe siècle), le prieuré St. John the Baptist (fondé au début du XIIIe siècle), non loin des ruines de la cathédrale médiévale de St. Peter and St. Paul (aussi appelée Newtown cathedral), ou encore le plus ancien pont en pierre du pays : le bien nommé Old Bridge, jeté sur la Boyne, qui date de 1393 et se trouve près du château.
Si vous êtes féru d’histoire militaire, vous pouvez visiter le site de la bataille de la Boyne, qui, le 1er juillet 1690, opposa Guillaume III d’Orange à Jacques II d’Angleterre (dont l’armée comptait 6 500 Français envoyés par Louis XIV). L'enjeu, de taille, était le trône britannique, la domination française en Europe et le pouvoir religieux en Irlande, rien que cela ! La défaite de Jacques II sera, de fait, un énorme revers pour les Irlandais catholiques, qui resteront encore des siècles sous la domination des Anglais. Une expo retrace ces événements à Oldbridge Estate, une demeure du XVIIIe siècle restaurée.
Fiche pratique
Pour préparer votre séjour, consultez notre guide en ligne Irlande
Comment y aller et se déplacer ?
– Avion : comptez en moyenne 1h50 pour un vol Paris-Dublin. Puis, pour explorer la vallée de la Boyne, qui se trouve à environ 1h de la capitale irlandaise, vous pouvez louer une voiture ou emprunter des bus.
Bonnes adresses
– The Station House Hotel : Ringlestown, à Kilmessan. Cet hôtel romantique au cœur de la campagne était autrefois une gare de train. Une belle reconversion ! Double à partir de 180 €/nuit.
– Trim Castle Hotel : Castle Street, à Trim. Parfaitement situé au centre de la ville, cet hôtel se trouve juste en face du château de Trim. Double à partir de 112 €/nuit.
– Knightsbrook Hotel : Dublin Road, à Trim. Un grand hôtel, classique et confortable, entouré de verdure. Golf. Double à partir de 125 €/nuit.
– Browne’s : à Slane Castle. Le week-end, on peut aller bruncher au château de Slane. C’est très bon (produits locaux de qualité). À partir de 11 €.
– Franzinis : 5 French Lane, à Trim. Pâtes, pizzas, poissons, viande ou fajitas… Il y en a pour tous les goûts dans ce resto animé situé près du château de Trim. Plats à partir de 16 €, menu à partir de 26,50 €.
– La réputation de convivialité des pubs irlandais ne se dément pas. Et ils sont nombreux à Trim. Si vous avez envie de boire un verre en musique, vous pouvez aller au Brogans, qui organise pas mal de concerts.
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Texte : Olivia Le Sidaner
Mise en ligne :