MAUVAISE NOUVELLE
Cuba face au spectre d’une nouvelle “période spéciale”
Par Bureau de La Havane
Il y a 12 heures
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“Je souhaite que la gravité des scandales des abus, qui ont fait émerger les défaillances de beaucoup, serve à souligner l’importance de la protection des mineurs”, assure le pape François (ici, au Vatican le 9 juin).
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Un Cubain lit le journal cubain Granma à La Havane, le 5 avril 2019 Fournis par AFP Un Cubain lit le journal cubain Granma à La Havane, le 5 avril 2019
Un air de déjà-vu pour les Cubains: la réduction de pagination de l’emblématique quotidien Granma, faute de papier, rappelle les débuts de la “période spéciale”, crise économique des années 1990, alors que les files d’attente s’allongent pour acheter farine, poulet ou beurre.
La mesure, annoncée jeudi, a pris effet dès vendredi. Le journal officiel du Parti communiste de Cuba (PCC, unique) passe de 16 à huit pages, deux jours par semaine. Les autres publications de l’île sont aussi mises au régime.
La raison invoquée ? Les “difficultés de disponibilité de papier dans le pays”.
A La Havane, Leandro Lopez, retraité de 90 ans, ne s’en émeut guère: le président Miguel “Diaz-Canel essaie de renforcer l’économie, donc là où on peut réduire les coûts, on les réduit, tant mieux. Je ne pense pas que ça va porter préjudice à l’information”.
Des Cubains achètent des oeufs dans une boutique à La Havane, le 5 avril 2019 Fournis par AFP Des Cubains achètent des oeufs dans une boutique à La Havane, le 5 avril 2019
Il faut toutefois remonter au 24 août 1990 pour trouver une annonce similaire. C’était alors la première mesure adoptée par Fidel Castro pour affronter la “période spéciale”, crise provoquée par la fin de l’Union soviétique, soutien économique de l’île pendant les trois décennies précédentes.
Brusquement privé de ce “grand frère” qui accaparait 85% de son commerce extérieur, le pays s’est retrouvé à l’arrêt, avec des pénuries de carburant et d’aliments, ce qui a entraîné l’apparition de maladies incurables comme la polynévrite, causée par la malnutrition, et l’exode de 45.000 habitants à l’été 1994.
- Le casse-tête des courses -
Aujourd’hui, l’île affronte à nouveau des temps difficiles. Les Etats-Unis ont durci leur embargo en vigueur depuis 1962 et menacent de nouvelles sanctions.
Un Cubain porte une plaque d’oeufs dans une rue de La Havane, le 5 avril 2019 Fournis par AFP Un Cubain porte une plaque d’oeufs dans une rue de La Havane, le 5 avril 2019
Et Cuba risque de perdre le soutien pétrolier du Venezuela de Nicolas Maduro, en plein marasme politique, et de l’Algérie après la démission d’Abdelaziz Bouteflika.
“Depuis trois ans, Cuba essaie de compenser l’impact de la chute des échanges commerciaux avec le Venezuela. La hausse du tourisme, de l’activité privée et des projets avec des investissements étrangers a aidé à amortir ce choc économique”, explique Pavel Vidal, économiste cubain de l’université Javeriana, en Colombie.
“Mais les mesures et menaces de l’administration Trump sont des obstacles à ces trois facteurs qui aidaient à maintenir à flot l’économie”.
La croissance, de 1,2%, est insuffisante pour couvrir les besoins d’un pays qui importe 80% de ce qu’il mange. Les pénuries de farine, d’huile ou de poulet se multiplient, obligeant le gouvernement à rationner leur vente et les habitants à patienter des heures devant les magasins.
“Ce qui se passe maintenant, ça ne ressemble pas à la période spéciale, car à cette époque c’était vraiment la catastrophe”, tempère Tania, une infirmière de 49 ans sortant d’un supermarché.
Des Cubains font la queue pour acheter de la nourriture, le 4 avril 2019 à La Havane Fournis par AFP Des Cubains font la queue pour acheter de la nourriture, le 4 avril 2019 à La Havane
Venue acheter du riz, elle repart pourtant bredouille. “C’est comme ça avec tout. Parfois on cherche un produit et on arrive à le trouver à un endroit, on va ailleurs et on ne le trouve pas”, dit-elle, résumant le casse-tête des Cubains, obligés de faire le tour de la ville pour compléter leur liste de courses.
- Même les touristes affectés -
Selon un diplomate connaisseur des opérations commerciales de l’île, le gouvernement s’arrange pour distribuer, au compte-gouttes, les denrées alimentaires, en gardant des réserves pour les temps durs.
Des Cubains transportent des fruits et des légumes sur un tricycle, le 4 avril 2019 à La Havane Fournis par AFP Des Cubains transportent des fruits et des légumes sur un tricycle, le 4 avril 2019 à La Havane
“Oui, il y a des pénuries, des files d’attente, surtout pour le poulet, la lessive, ce genre de marchandises”, soupire Nelson Flores, retraité de 79 ans, découragé par l’immense queue pour acheter du poulet.
Jusqu’à présent, la crise épargne la sacro-sainte “libreta”, le carnet d’approvisionnement des Cubains, qui reçoivent mensuellement du pain, du riz, des haricots… mais en quantités insuffisantes pour tenir le mois.
Même les touristes commencent à ressentir le manque. Le gérant d’un hôtel sur l’une des îles paradisiaques bordant la côte cubaine a confié à l’AFP manquer d’oeufs, de fruits, de pain, ce qui fait râler les clients venus profiter d’une offre tout compris.
Récemment, Cuba a fait défaut sur une partie de sa dette avec le Brésil, son principal fournisseur d’aliments.
Fin 2018, l’île accumulait des impayés de dette à court terme de 1,5 milliard de dollars, selon l’ex-ministre de l’Economie, José Luis Rodriguez.
“Il y a un niveau de dette que nous n’allons pas pouvoir payer (en 2019) et qui affecte la bonne marche de l’économie”, a reconnu l’actuel ministre, Alejandro Gil.