Tout n’est pas pas que déprime, misère et projets d’exil dans la Havane de 2022. Hier soir, pour la première fois depuis le monde d’avant j’étais face à un choix inédit, celui entre deux endroits différents pour aller écouter de la musique… (boire des coups et compartir, comme on dit ici).
Il y avait ce petit cabaret “particular”, situé dans un appartement à l’étage dans un morceau d’une grande demeure… et la réouverture de la Fabrica de Arte Cubano (on dit la Fabrica).
Le cabaret, j’y avais déjà été, un creuset où l’on vient d’abord pour fréquenter d’autres humains… C’est un petit endroit, très haut de plafond, pas un espace libre sur les immenses murs, tableaux, photos, affiches, horloges, miroirs, disques… Pas d’enseigne ni même de nom sur la porte, pas sûr que cette activité soit officiellement enregistrée, on y vient après s’être annoncé au téléphone.
On y trouve encore tout ce qui fait de Cuba ce pays à part, de la chaleur humaine, du rire, des boléros tragiques, des musiciens surdoués, des chanteuses qui te font frissonner, des moments d’exaltation collective…
La Fabrica, c’est tout autre chose, ici, on ne peut prétendre échanger avec chaque membre de l’assistance. Hier soir, il y a avait quelques centaines de personnes dès l’ouverture, après plus de deux ans de fermeture. Le mélange des genres y est toujours de rigueur, depuis la jeunesse dorée jusqu’à des spécialistes de l’invento qu’on préfère croiser ici plutôt que dans une rue sombre.
Le programme musical était assez réduit pour ce premier soir, histoire de remettre en route cette grosse machine, sans doute. Le côté DJ était largement majoritaire, ambiance moite garantie. Le jeudi, pour la musique “live” c’est le soir du “classique”, donc l’orchestre de chambre de la Havane a joué un répertoire sur le thème “Cuba/Brésil”. Un maximum de compositions contemporaines, la plupart des compositeurs étaient d’ailleurs dans la salle. Beaucoup de couleurs et de rythmes, des guaguancos pour orchestre à cordes, Gershwin sur le Malecon, Debussy à Ipanema… Bref un beau voyage !
Des musiciens contents de retrouver leur public, un public content de retrouver cet espace unique… Et comme d’habitude, beaucoup de musiciens dans l’assistance, dans cette période où l’on compte ceux qui restent, ceux qui partent, ceux qui vont et viennent.
Comme à peu près tout ce qui a un prix dans ce pays, l’entrée à 250 CUP a été multipliée par 5 pour les cubains et reste à peu près au même tarif pour ceux qui ont changé des euros.
De retour à la maison, j’ai reçu une petite vidéo de la soirée au cabaret “particular”, ils n’étaient pas bien nombreux, mais l’ambiance était bien là !