L’évolution des théories
Et maintenant, au travail !
Dès son retour, Charles Darwin étudie donc ses notes et les spécimens rapportés. Il commence à élaborer sa théorie de l’évolution des espèces. Sa réflexion est alimentée par des idées diverses. Celles du géologue Charles Lyell pour qui la Terre subit une transformation continue au fur et à mesure de l’érosion et des éruptions volcaniques. Celles de l’économiste Thomas Malthus aussi. Ce dernier affirme que, dans la mesure où les populations humaines augmentent inexorablement et que les ressources sont limitées, s’il n’y a pas contrôle de la démographie et de la production, seule une lutte permanente permet à certains de survivre.
Dans les années 1840 et 1850, tout en menant ses travaux, Darwin
rédige et publie des ouvrages dont son journal de voyage et un livre
sur la formation des récifs coralliens, communique sur le rôle de
lombrics dans l’oxygénation de la terre… Il souffre de plusieurs
maux dont certains seront a posteriori attribués à des virus
ramenés des tropiques. Pour travailler en paix, il part s’installer
à la campagne à Downe, dans le Kent en compagnie de son épouse,
sa cousine Emma Wedgwood.
La publication de L’origine des espèces
C’est en 1859 que paraît L’origine des espèces,
sous-titré « au moyen de la sélection naturelle ou la préservation
des races favorisées dans la lutte pour la vie ». Les idées
nouvelles qu’il avance sont excessivement choquantes pour nombre
de ses contemporains. L’Angleterre est à cette époque dominée par
des idées conservatrices et fortement empreintes de religion. Les
espèces vivantes n’ont pas évoluées depuis la création du monde
par Dieu : telle est la théorie fixiste. Une autre théorie, le catastrophisme,
tend à expliquer la disparition de certaines espèces par des catastrophes,
comme son nom l’indique. Mais cette explication ne contredit pas
le fixisme.
Penser autrement, c’est donc aller contre des dogmes. Cela dit, le XIXe siècle est une période où l’on peut se permettre des remises en cause tant les transformations politiques, économiques bouleversent les idées reçues. De nombreux chercheurs bousculent ces dernières. Darwin est un des chaînons de cette espèce laborieuse, comme l’a été Jean Baptiste Lamarck qui, l’année même de la naissance de Darwin, a proposé une théorie de l’évolution des espèces par adaptation au milieu extérieur ; on la nomme transformisme. Un exemple illustrant cette thèse est resté fameux : c’est parce que la nourriture des girafes se trouvait en hauteur que son cou s’est allongé.
Ce qu’avance Darwin
Darwin constate qu’il y a eu transformation des espèces. Il ne peut cependant pas définitivement le prouver, car il lui manque une information capitale, le mécanisme de transmission des caractères génétiques. Pourtant, la découverte de cette dernière est contemporaine de sa théorie. C’est en effet en 1865 que Gregor Mendel l’a établie en étudiant des petits pois ; c’est seulement autour de 1900 qu’elle sera vraiment prise en compte. En revanche, alors qu’il mène ses propres travaux, Darwin prend connaissance de ceux d’Alfred Russel Wallace, autre naturaliste britannique. Ils sont proches des siens mais, faisant taire son égoïsme, il en favorise la présentation en public en 1858. L’écho reçu est minime, c’est à Darwin que va donc échoir le rôle de l’iconoclaste.
Pour Darwin, la Terre s’est progressivement peuplée d’animaux et de plantes, à partir d’organismes vivants premiers. Toutes les espèces, y compris l’homme glisse-t-il incidemment, descendent d’un ou de plusieurs ancêtres communs. Les changements se sont effectués en une série ininterrompue, en fonction de l’environnement et du hasard. Pour lui, la sélection naturelle joue un rôle capital. Les êtres vivants les mieux adaptés à leur milieu sont ceux qui perpétuent l’espèce. S’il y a anomalie, elle permet de créer une nouvelle branche quand le contexte le permet. Ainsi l’existence des fossiles trouve-t-elle une nouvelle explication. Ce sont les traces d’espèces intermédiaires disparues. À l’instar de nombreux scientifiques de son temps, il continue cependant de penser que les caractères acquis au cours de l’existence d’un être vivant peuvent se transmettre à la descendance, ce qui sera contredit par la suite.
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