Posadas au Mexique : ciel, ma piñata !
Au Mexique, Noël commence le 16 décembre. Pendant neuf jours, dans les villages et les quartiers, on organise des posadas, des fêtes de voisinage reconstituant des scènes de la Nativité. Mélange de foi religieuse et de réjouissances terrestres, elles sont le théâtre de chants, de prières et de libations pas très catholiques. Et puis, surtout, pour la plus grande joie des enfants, on y casse d’extravagantes boules d’abondance, les piñatas…
Préparez votre voyage avec nos partenairesNeuf soirées pour Joseph et Marie
Si vous voyagez au Mexique avant Noël, vous allez sans doute être frappé par
de grosses boules en forme d’étoiles à sept branches, suspendues au bout d’une
corde, dans les jardins ou devant les maisons. Loin d’être de simples décorations
comme on en trouve en Europe, ces étranges sphères, appelées piñatas,
font partie des rites liés à la célébration de Noël qui, au Mexique, débute
le 16 décembre avec les posadas.
En espagnol, « posada » veut dire « auberge ». La
tradition des posadas, qui remonte au XVIe siècle, commémore le voyage
que firent Joseph et Marie de Nazareth à Bethléem où naquit Jésus. En chemin,
ils demandèrent l’hospitalité à de bons samaritains pour passer la nuit et c’est
ainsi qu’ils arrivèrent sains et saufs à Bethléem.
Pendant les neuf jours précédant Noël, dans les villages
et les quartiers du Mexique, on « rejoue » le voyage de Joseph et
Marie. Des processions réunissant des habitants de la communauté – et
surtout des enfants – se rendent chez un voisin pour demander l’hospitalité
(pedir posada) comme le firent Marie et Joseph. Bien souvent, ces « pèlerins »
reconstituent une scène de la Nativité (les enfants peuvent être déguisés)
en entonnant un chant religieux, avec une bougie et, parfois, une statue de
saint à la main. La règle veut que le groupe se rende dans trois maisons du
voisinage. Seule la troisième leur donnera l’hospitalité. À l’intérieur, les
« pèlerins » prieront et interpréteront des chants de Noël. Avant
de continuer la fête…
Casser la piñata
Le temps des posadas, synonyme de réjouissances avec le voisinage, illustre
le sens de l’hospitalité mexicain. Fête communautaire, la posada repose
sur l’importance du don et de l’entraide. À la même époque, aux États-Unis,
au Canada et en Europe, c’est plutôt aux portes des centres commerciaux que
l’on va frapper, en confondant fêtes de Noël et festival du tiroir-caisse.
Signe de la ferveur religieuse particulière des Mexicains, les posadas
font aussi la joie des enfants. En effet, après la prière, ceux-ci vont devoir
briser les fameuses piñatas. À l’origine des pots de terre cuite, les
piñatas sont aujourd’hui de grosses boules de papier mâché ou de carton,
décorées de couleurs extravagantes, avec, à l’intérieur, toutes sortes de fruits
et de friandises. Elles sont suspendues au bout d’une corde, entre deux arbres,
deux façades ou sous une voûte. Elles peuvent même être accrochées sur des bâtons
tenus par des personnes qui les déplacent pour qu’elles soient difficiles à
atteindre. Les enfants, un bandeau sur les yeux, doivent les casser à coups
de bâton, afin de libérer bonbons et autres sucreries.
Quelles sont les règles du jeu ? Sous les cris de l’assemblée, on fait
tourner plusieurs fois sur eux-mêmes les participants aux yeux bandés pour corser
le défi, en leur faisant perdre la notion de l’espace. Pendant que les joueurs
essaient, chacun à leur tour, de briser la piñata, les invités chantent
une chanson typique : « Dale, dale, dale, no pierdas el tino, porque
si lo pierdes, pierdes el camino, la piñata tiene caca, caca, cacahuates »....
(« Frappe, frappe, frappe, ne perds pas l’adresse, car si tu la perds,
tu perds le chemin, dans la piñata il y a du caca, du caca, des cacahouètes »).
Chaude ambiance assurée !
Casser la piñata représente plus qu’un jeu. Cette tradition est liée
à un rite de purification. La piñata typique a la forme d’une étoile
à sept branches, chacune représentant un des sept péchés capitaux. En la frappant,
on combat le péché et on chasse la tentation. Le bâton représente la force spirituelle
contre le mal et le bandeau, la foi aveugle. Quant aux fruits, sucres, jouets
et confiseries qui tombent de la piñata, ils symbolisent l’amour de Dieu
et l’abondance.
Un bon coup de marketing religieux
Cher voyageur, le mystère des sphères mexicaines est élucidé. Il reste tout
de même une question : pourquoi les Mexicains débutent-ils les fêtes de
Noël un 16 décembre ? À l’origine, il y a un bon coup de « marketing
religieux ». Il ne faut pas oublier qu’au début de la colonisation du Mexique,
la foi chrétienne était concurrencée par les traditions aztèques. Or, du 7 au
26 décembre, ces derniers célébraient la naissance du dieu de la guerre
Huitzilopochtli. En 1586, le frère dominicain Diego de Soria, du village
de San Agustin Acolman (à 40 km de Mexico), obtint du Pape Sixte V
une bulle qui l’autorisait à célébrer des messes et à reconstituer des scènes
de la nativité du 16 au 24 décembre. L’objectif : contrecarrer
les fêtes aztèques. Les posadas, par leur caractère festif et théâtral,
rencontrèrent le succès que l’on sait. Selon certains historiens, on en retint
neuf pour symboliser les neuf mois de la grossesse de Marie.
La piñata a également été introduite au Mexique par les Espagnols. Son
nom vient de l’italien « pignatta » qui veut dire « pot de terre
fragile ». Au départ, les posadas se déroulaient à l’église. Aujourd’hui,
c’est surtout une affaire privée, qui se règle entre voisins. Le religieux est
quelque peu passé au second plan, même si le rituel plonge ses racines dans
la Bible. Il s’agit, avant tout, d’une fête amicale de voisinage où on boit
et on s’amuse beaucoup. Pour y assister, il vaut mieux avoir des amis mexicains
qui vous y invitent. Les posadas sont spontanées et, pour cela, authentiques.
Elles sont l’expression de la foi joyeuse, presque païenne, des Mexicains. Et
puis, si vous faites partie de l’assistance, attendez-vous à ce que l’on vous
bande les yeux pour frapper la piñata. « Dale, dale, dale, no
pierdas el tino… »
Pour en savoir plus
- Aller au Mexique pour les posadas et les fêtes de Noël : prix
à partir de 790 € avec Lufthansa (escale à Francfort) ou American Airlines
(escale aux États-Unis) et à partir de 1 010 € en vol direct avec
Aeromexico
- Site très complet sur l’histoire des célébrations de Noël au Mexique réalisé
par l’Université de Guadalajara. Internet : http://mexico.udg.mx
- Du 16 au 23 décembre, si vous passez par la ville d’Acolman, entre
Mexico DF et Teotihuacan, ne manquez pas la foire de la posada et
de la piñata : les artisans exposent des piñatas en argile
ou encore en carton… Vous pourrez même tenter de créer la vôtre ! Internet
: www.visitmexicopress.com.
- Fabriquer sa propre piñata avec l'aide du site www.kutchuk.com.
Texte : Jean-Philippe Damiani
Mise en ligne :