Bonjour Yves,
Ce que tu dis est très juste. Je ne me prononçerait pas sur les aspects ethniques, parce que c’est une question très sensible, complexe, et surtout un thème très politisé.
Dans toute action gouvernementale, il y a les objectifs affichés, et les objectifs cachés. Et les malgaches sont les grands spécialistes à ce jeu là. C’est incroyable comme toute initiative à priori louable peut devenir une véritable plaie.
Pourquoi Nosy Be et pas d’autres lieux? Principalement parce que Nosy Be est classé “PIC” (Pole Intégré de Croissance) dans le MAP (Madagascar Action Plan, une sorte de plan triénal pondu par le gouvernement et validé par le FMI qui débloque les financements internationaux).
A ce titre, Nosy Be devient une “vitrine” pour l’Etat malgache, qui veut en faire un exemple de développement économique.
N’oublions pas que le président est également vice-président du FJKM, c’est à dire l’église anglicane malgache. C’est un homme qui affiche volontiers ses croyances religieuses. Et clairement, tout le buzz autour du tourisme sexuel à Madagascar gène beaucoup l’Etat malgache. N’est ce pas étonnant que le Président se soit déplacé à Nosy Be le 8 décembre dernier pour taper du poing sur la table et exiger l’arrestation de touristes sexuels (ou désignés comme tels), la veille de la diffusion d’un reportage à sensation sur TF1, avec pour thème… le tourisme sexuel à Nosy Be? Reportage d’ailleurs déprogrammé à la dernière minute.
Nosy Be a vu ses infrastructures améliorées grâce au PIC (routes, adduction d’eau, et maintenant alimentation électrique, bientôt un marché, et la réfection du port). La contrepartie est d’en faire un environnement propice au tourisme de masse. C’est une exigence des bailleurs de fonds, qui veulent retrouver leur mise d’une façon ou d’une autre.
C’est pour cela qu’une campagne parallèle, de nettoyage des opérateurs touristiques bancals, se déroule. Certains se plaignent de redressements fiscaux. Mais ils ne disent pas que leurs employés ne sont pas déclarés, qu’ils ne cotisent pas à la CNAPS, qu’ils ne bénéficient pas de congés payés… comme la loi malgache l’exige.
Etonnant comme un groupement d’opérateurs touristiques locaux ont monté avec l’Etat (le fameux PPP, partenariat public-privé) une école hotellière. Je pense que si l’on regardait de plus près la liste des hotelliers partie prenante de cette école, cette liste ne comporterait pas beaucoup d’établissements en redressement judiciaire. Etrange non?
Alors, après Nosy Be, d’autres lieux de nettoyage? Pas sûr. Peut-être Antananarivo pour emm… le maire de la capitale actuellement en délicatesse avec le président.
Je parlais d’objectifs cachés. En vérité, il faut plutôt dire que certains dérivent des objectifs affichés leurs objectifs privés. De telles actions de nettoyage et de ratissage sont une aubaine pour certains fanjakana (hauts placés) pour en tirer un bénéfice personnel. Si certains vazaha se font expulser, cela sera autant d’occasions de les raketter en contrepartie d’un abandon des procédures, ou bien l’opportunité de récupérer leurs bien une fois les personnes expulsées du territoire. C’est Madagascar, et la corruption est une véritable plaie. Et au plus ils sont hauts, au plus ils sont gourmants.
Pour ce qui est du Khat, c’est comme le problème du vol de bovidés. Les gens au pouvoir sont tellement mouillés dans le trafic que ca me paraîtrait très très surprenant que le problème soit réellement pris à bras le corps. Et puis, est-ce réellement un problème de société? Ou plutôt, est-ce une exigence des bailleurs de fonds? Le jour où l’on accusera Madagascar d’être un gros exportateur de Khat, là ca deviendra un problème.