Bonjour,
Beau projet, mais qui demande mûre réflexion.
Les régions du Nord et de l’Isan sont effectivement moins touristiques, et la vie y est moins chère (souvent beaucoup moins), ce qui est un point appréciable. Mais il y a aussi d’énormes contreparties. Pensez que, lorsque vous sortez des endroits touristiques, très peu de gens parlent l’anglais, donc qu’il est bien difficile de communiquer et de se dépêtrer seul, ne serait-ce que dans le labyrinthe administratif. Tout apparaît comme une énigme, et personne ne peut vous aider.
Pour ma part, je suis à la retraite et je vis dans l’Isan (d’après les chiffres de l’ambassade de France, seuls 6% des expatriés français vivent dans cette région, et dans leur immense majorité, ils ont une famille thaïlandaise). Je ne déroge pas à la règle, je connais ce pays depuis plus de 30 ans et j’ai une épouse - et une famille - thaïlandaises, ce qui est particulièrement précieux pour faire face aux multiples casse-tête de la vie quotidienne, même si je parle et lis - un peu - le thaï (mais insuffisamment pour comprendre la notice technique d’un four micro-onde ou un article de fond du “Matichon”). Honnêtement, sans cet atout, je ne sais pas si je resterais dans le Nord-est (et je ne sais même pas, d’ailleurs, si je resterais en Thaïlande). Je ne connais pas un français à 200 kilomètres à la ronde, et sans la vie de famille (souvent intense par chez nous, il est vrai), je pense que je m’y ennuierais à mourir.
Pensez aussi aux problèmes de santé qui, hélas, se multiplient avec l’âge. La Caisse des Français de l’Étranger (la CFA, qui pompera, si vous y adhérez, 4,2% du montant de votre retraite) - n’a passé de conventions qu’avec 3 hôpitaux dans le royaume (2 à Bangkok et 1 à Chiang Maï). Cela signifie que si mon état nécessitait une hospitalisation, je devrais faire 600 kilomètres en car sur des routes défoncées pour gagner le plus proche. Bien sûr, la caisse rembourserait les frais d’hospitalisation dans un autre hôpital mais, outre qu’il m’en faudrait faire l’avance, elle ne me rembourserait que sur les bases des tarifs français, et, dès qu’on souhaite un minimum de confort et de qualité de soins, les tarifs thaïlandais sont souvent exorbitants, bien au-delà des tarifs français. Il faut donc envisager aussi une complémentaire, souvent très chère en fonction de l’âge.
Ne sous-estimez pas non plus les problèmes financiers. Si vous touchez votre retraite en euro, prenez conscience que vivre dans un pays hors de la zone euro signifie avoir des revenus très aléatoires, selon le cours des monnaies. Que le baht s’apprécie, que l’euro se dévalorise, vous devrez subir de très grosses différences. L’euro s’échangeait contre 44 bahts en août 2014. Il est tombé à presque 34 bahts en avril dernier. Cela représentait près de 23% de moins. Aujourd’hui, il retrouve des couleurs, il se négocie autour de 41 bahts, mais qu’en sera-t-il demain, en ces temps de troubles économiques ?
Ce n’est pas un hasard si l’essentiel des touristes français se concentre dans les endroits touristiques ou cosmopolites : Bangkok, Pattaya, Hua Hin, Koh Samui, Phuket, etc. C’est l’assurance de disposer d’un maximum de services sur place, de toujours trouver quelqu’un qui pourra peu ou prou comprendre ce que vous dites, et de rencontrer des compatriotes. En ce qui me concerne, je ne les recherche pas particulièrement, mais c’est vrai qu’il est bien agréable de parler sa langue avec un copain en buvant un pastis (j’en ai cherché, on n’en trouve pas par chez nous).
Ne vous lancez pas sans réfléchir. Je ne peux que vous conseiller de vous installer d’abord dans un endroit où vous trouverez des services et des compatriotes - ou au moins des gens qui parlent l’anglais -, votre vie en sera grandement facilitée, ne serait-ce que pour échanger des expériences et des informations indispensables. Rien ne vous empêchera par la suite de visiter le pays, et de trouver, pourquoi pas, l’endroit qui provoquera un coup de coeur et qui vous donnera envie d’y séjourner longtemps, et sereinement.
Cordialement,
PVM