Cambodge : des berges du Mékong au Ratanakiri, pays des terres rouges

Tourisme éco-responsable contre cupidité des hommes

Tourisme éco-responsable contre cupidité des hommes
Pierre-Yves Clais

Les lois cambodgiennes protégeant la nature et les droits des minorités ethniques ne sont pas réellement appliquées. Elles s’apparentent à des déclarations d’intention plus ou moins sincères. Dans ce contexte, le développement du tourisme éco-respectueux représente l’un des seuls espoirs de survie pour un minimum d’oasis conformes à l’attrait même du Ratanakiri : un des derniers sanctuaires ethnique et faunique de la péninsule indochinoise, aujourd’hui en péril.

Ici, pas de place pour la langue de bois : une tragédie se joue, similaire à celle qui ronge l’Amazonie ou les jungles de Papouasie. Sur le terrain, le moratoire sur la coupe et le transport du bois est détourné par un système dont la simplicité est aussi confondante que les mensonges qui l’entourent. D’abord, les terres attirent les pauvres des régions surpeuplées du pays. Ne les accablons pas, ils n’ont pas forcément le choix. Pour subsister, ils mettent le feu à de vastes bandes de forêt, de manière bien plus dévastatrice que la culture sur brulis pratiquée par les autochtones semi-nomades. Puis, les autorités ferment les yeux quand d’autres compatriotes bien mieux placés s’emparent de gré ou de force des parcelles défrichées. Sans titre de propriété, les migrants n’ont aucun recours.

Idem pour les autochtones auxquels appartiennent coutumièrement ces terrains : ce sont les grandes victimes de cette manipulation. Ce scandale est abordé dans la presse, sans que cela change grand-chose pour l’instant. L’exploitation illégale de la forêt pose également problème. Le voyageur curieux entendra parler, ici ou là, d’un ancien haut responsable en fuite parce qu’il avait vraiment abusé en la matière… Ainsi la forêt du Ratanakiri, théoriquement protégée, risque de disparaître entièrement d’ici quelques années, hors parc national… et encore. Le Cambodge souffre malheureusement d’une corruption endémique, allant jusqu’à mettre sérieusement à mal l’intérêt national le plus évident.

Alors, il faut espérer que les retombées financières du tourisme éco-responsable contrebalanceront en partie les perspectives de gains rapides et élevés mais sans lendemain. Pointe d’optimisme, « l’éco » est entré dans le vocabulaire officiel provincial, et surtout, un nombre grandissant de structures indépendantes le pratique, au-delà du simple argument marketing. Ces dernières sont très recommandées pour les rencontres ethniques : les villages sont souvent difficiles à localiser, les habitants plutôt timides ne parlent pas un mot d’anglais et les coutumes — comme les coquines maisons de célibataires Kreungs, les cimetières animistes, les totems Jarai et bien d’autres — méritent amplement quelques explications.

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Texte : Dominique Roland

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