Une sociologie de la Chine
Auteur : Jean-Louis Rocca
Editeur : La Découverte, collection Repères
128 Pages
Les Chinois par ci, les Chinois par là… Les avis définitifs pleuvent de toute part sur ce peuple : il fait peur aux uns, tandis que les autres sont éperdus d’admiration. Au fond, on manque cruellement d’information nous permettant de saisir le fonctionnement d’une société qui rassemble plus de 1,3 milliard d’individus.
Ce petit précis est fait pour nous éclairer. Jean-Louis Rocca est un sociologue qui mène en Chine des travaux sur l’émergence des nouvelles classes sociales. Sa synthèse est donc nourrie d’éléments de première main. Il ne cherche pas à tout nous expliquer, préférant se concentrer sur des phénomènes majeurs induits par les changements d’orientation économique à l’œuvre depuis plusieurs décennies.
D’une société charpentée par un parti-Etat, la Chine avance très rapidement vers un monde dans lequel chacun doit parvenir coûte que coûte à se trouver une place au soleil. Il en résulte d’énormes tensions génératrices d’angoisses profondes au sein de classes moyennes en formation qui assistent au renforcement d’une « élite thermidorienne », laquelle a investi l’administration et le business à partir des années 1990. Trouver un emploi, se loger, faire des études, se marier, consommer… Rien n’est simple et les laissés-pour-compte sont bien plus nombreux que les gagnants. Les émigrés de l’intérieur, par exemple, ces paysans qui affluent dans les villes vivent en paria dans leur propre pays.
Contrairement à ce que l’on croit communément, les Chinois ne subissent pas silencieusement les effets de la « modernisation » en cours. Mais si une relative liberté d’expression permet d’évoquer leurs problèmes, en particulier des scandales locaux, mettre en avant des opinions non conformes reste très dangereux. A lire cet ouvrage captivant, qui fourmille de détails concrets, de rappels historiques, de références aux traditions toujours vivaces, on se dit que la société chinoise est en train de bouillir. Va-t-elle se stabiliser ou exploser ? A l’arrivée, on se sent débarrassé de pas mal d’idées toutes faites et, l’esprit en éveil, apte à mieux comprendre ce qui se passe du côté de Pékin ou de Shanghai.
Texte : Michel Doussot
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