Italie : en Toscane, sur les traces des Étrusques

Italie : en Toscane, sur les traces des Étrusques
Volterra © Nikolai Sorokin - stock.adobe.com

Pise, Florence, Sienne, le Chianti... Une autre Toscane, plus secrète, plus originale, mérite d’être connue, que l’on soit féru d’histoire ou pas : celle des… Étrusques.

Ce peuple aux origines mystérieuses – qui descendrait toutefois des populations autochtones vivant déjà dans le centre de l’Italie – a développé en Toscane, en Ombrie et dans le Latium une civilisation brillante, du IXe au IIIe siècles av. J.-C. À son apogée, son influence s’étendait, au nord, jusque vers la plaine du Pô et, au sud, dans une partie de la Campanie.

Si les sites les plus touristiques se trouvent dans le Latium, la Toscane compte de nombreux – et intéressants – vestiges de ce peuple d’artisans et de navigateurs. Partons à leur découverte…

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Populonia, prospère cité portuaire

Populonia, prospère cité portuaire
Populonia © digitalog - stock.adobe.com

Commençons notre périple à 100 km au sud de Livourne, dans les paysages enchanteurs du golfe de Baratti. Là s’élevait, non loin de l’actuelle station balnéaire de Piombino, l’une des plus anciennes cités étrusques, l’une des plus riches aussi, et surtout la seule bâtie carrément en bord de mer : Fufluna, devenue Populonia. Sa visite (compter une journée) initie d’emblée au fonctionnement du monde étrusque.

Les vestiges s’élèvent, entre mer et pinèdes, au pied du village médiéval fortifié dans le parc archéologique de Populonia et Baratti. Au IXe siècle av. J.-C., les Étrusques installèrent de petits villages faits de huttes de bois et d’argile (les archéologues en ont reconstitué une sur place). Trois siècles plus tard, Fufluna était une ville importante.

Grâce au minerai importé de l’île d’Elbe toute proche, la cité devint le plus puissant centre métallurgique d'Étrurie. Véritables « champions » du fer, les Étrusques en tirèrent une supériorité sur les autres peuples.

Petite Petra - Populonia © Paula Boyer

À l’apogée de Fufluna, il y avait des fours pour fondre le métal, partout. Quelques vestiges subsistent près de l’une des trois nécropoles mises à jour, près de la mer, depuis 1889, notamment par Isidoro Falchi, célèbre archéologue autodidacte.

Ces nécropoles sont l’élément le plus spectaculaire : des tombes princières étaient placées sous d’imposants tumulus – avec ou sans tambour en pierre –, d‘autres avaient l’allure de petits temples.

Les bois tout proches abritent une nécropole baptisée « petite Petra », qui occupe une falaise creusée de nombreuses cavités. Les 33 tombes à hypogée de la « nécropole des grottes » ont, elles, été taillées à flanc de colline.

L’ambiance est tout autre dans la partie haute du parc archéologique. Un puissant mur d’enceinte étrusque y entoure l’ancienne acropole. Vestiges de temples, de thermes et de belles mosaïques confirment que les Romains ont construit une nouvelle cité sur Fufluna, après l’avoir annexée –pacifiquement – à la fin du IIIe siècle av. J.-C.

Pour voir les objets somptueux – chars, bijoux en or, urnes, céramiques, statues, mosaïques... – trouvés sur place, il faut pousser jusqu’à Piombino : son musée archéologique vaut vraiment le coup.

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Grâce aux contacts avec les autres peuples de la Méditerranée, les Étrusques ont évolué : ils ont adapté l’alphabet grec pour écrire leur langue ; ils ont peu à peu calqué leur Panthéon, peuplé à l’origine de divinités liées à la nature, sur celui des dieux grecs que les Romains adopteront aussi… Leurs rites funéraires ont changé aussi : partant de l’incinération, ils sont passés à l’inhumation, avant de revenir à la crémation. Mais, toujours, les défunts ont été entourés d’offrandes et d’objets familiers (bijoux, céramiques, casques, armes...). Le mort – ou le couple –, allongé dans la position du banquet étrusque, était souvent sculpté sur le couvercle de l’urne ou du sarcophage.

Vetulonia, cité perdue et… retrouvée

Vetulonia, cité perdue et… retrouvée
Museo Civico Archeologico “Isidoro Falchi” © MuVet

À 60 km au sud de Populonia, la bourgade de Vetulonia –  Vatluna à l’époque étrusque – semble être figée depuis l’Antiquité. Douce illusion.

Certes, elle se dresse toujours en hauteur, au milieu des oliviers. Cependant, du temps des Étrusques, cette cité – prospère aussi grâce au travail du métal – n’était pas coupée de la mer comme aujourd’hui. En contrebas s’étendaient alors le lac Prile et ses ports qui permettaient de commercer avec toute la Méditerranée.

Par la suite, le lac Prile a été comblé par des dépôts alluvionnaires. Quant à la cité étrusque, sa trace avait été perdue ! C’est Isodoro Falchi (encore lui !) qui l’a retrouvée en effectuant des fouilles en 1880 sous le bourg médiéval de Colonna di Buriano, baptisé depuis Vetulonia. Vestiges étrusques et romains sont visibles dans deux quartiers. De très beaux objets sont exposés au musée local, dédié à Falchi : ils disent l’opulence de l’aristocratie au pouvoir à Vatluna.

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Parmi les oliviers, à 1 km en contrebas du bourg, une nécropole abrite tombes à puits et à tumulus. Ne pas louper le « tumulus de la Pietrera ». Il en impose. Il abritait d’ailleurs un mobilier funéraire exceptionnel.

Sur les hauteurs de Roselle

Sur les hauteurs de Roselle
Ruines de Roselle © dragoncello - stock.adobe.com

À 15 km au sud de Vetulonia, de l’autre côté de la plaine de Grosseto, s’étendent la ville de Roselle et sa station thermale. Rusel, du temps des Étrusques, est perchée au-dessus, sur un promontoire naturellement défendable et avantageusement situé pour l'agriculture et l'accès à l'eau.

Depuis ce site – habité dès le VIIe siècle av. J.-C. –, le panorama est prodigieux. De l’autre côté de la plaine de Grosseto, Vetulonia pointe sur un mamelon. À l’horizon, les précieuses collines métallifères.

Rusel était une lucumonie, c’est-à-dire une cité-État autonome, gérée par une puissante oligarchie. Les Étrusques n’ayant jamais formé une nation à proprement parler, seule une alliance aux contours assez lâches, la « Dodécapole », réunissait leurs douze cités principales. Souvent rivales, elles seront incapables d’opposer un front commun pour résister aux Romains !

C’est en 294 av. J.-C. que ceux-ci s’emparèrent de Rusel, alors 10 000 habitants. Comme les Étrusques résistèrent, ils tuèrent 2 000 hommes et firent autant de prisonniers.

Murs d’enceinte - Roselle © Maurizio Rovati - stock.adobe.com

Malgré cette triste fin, les ruines de Roselle donnent vraiment la sensation de marcher sur les pas des Étrusques : sur la colline sud, les traces des fours ; au centre-ville, un étonnant petit édifice – rectangulaire à l’extérieur, ovale à l’intérieur – aurait été la demeure d’un chef, peut-être d‘une sorte de chamane ; enfin, les impressionnants murs d’enceinte, bien conservés par endroits, sont faits d’énormes blocs de travertin assemblés à sec. De sacrés bâtisseurs, ces Étrusques !

Plus nombreux sont, malgré tout, les vestiges de la cité superposée par les Romains après leur victoire : rues pavées, thermes, domus, mosaïques blanches et noires, forum, immense amphithéâtre, grandes citernes…

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À 90 km de Roselle par les petites routes, San Casciano dei Bagni est réputée, depuis les Étrusques, pour ses sources thermales à 41  C. Dans les ruines des thermes subsistent les restes d’un temple rectangulaire où ont été trouvées récemment 24 statues en bronze.

L’étrange ville souterraine de Chiusi

L’étrange ville souterraine de Chiusi
Chuisi - sarcophages et urnes funéraires étrusques © Paula Boyer

À 23 km de San Casciano dei Bagni, aux confins de la Toscane et de l’Ombrie, non loin du lac Trasimène, Chiusi s’accroche sur une hauteur. À son emplacement se trouvait Clevsin, la cité étrusque, membre, à son apogée, de la fameuse Dodécapole.

Le musée contigu à la cathédrale San Secondiano donne accès à un système ingénieux de galeries souterraines creusées par les Étrusques pour capter et stocker l’eau dans un lac à 30 m sous terre.

Baptisé « Labyrinthe du roi Porsenna », c’est l’un des sites du musée municipal qui possède un ensemble impressionnant d’urnes cinéraires et tuiles funéraires en terre cuite. Scènes sculptées ou peintes disent la place importante des femmes dans la haute société, les loisirs des Étrusques mais aussi les conflits opposant, dans les derniers temps, les aristocrates à la masse des pauvres, serfs et esclaves. Car les Étrusques furent de grands esclavagistes !

Le musée archéologique, lui, expose notamment d’étonnants canopes (vases funéraires) à couvercle anthropomorphe et des poteries noires (buccheri) typiques des Étrusques.

Le + de routard.com :

À Sarteano, dans les oliveraies en contrebas de Chiusi, ont été mis à jour de gros blocs de pierre en demi-cercle, utilisés pour des rites funéraires étrusques. Juste à côté, 21 tombes sont creusées dans le travertin. Dans celle du « quadrige infernal », des fresques – divinité infernale conduisant un char, serpent à trois têtes, etc. – évoquent la séparation entre le monde des vivants et des morts.

Cortona, l'un des plus beaux panoramas de Toscane

Cortona, l'un des plus beaux panoramas de Toscane
Val di Chiana depuis Cortona © Paula Boyer

Difficile de ne pas être subjugué par Cortona ! Cette petite ville des confins sud de la Toscane, toujours à la limite de l’Ombrie, a été étrusque – et membre de la fameuse Dodecapole – sous le nom de Curtun. Elle offre un des plus beaux panoramas de Toscane sur le lac Trasimène au loin et sur les plaines ondulées du Val di Chiana.

À l’intérieur des puissants remparts étrusques, les ruelles médiévales pavées et incroyablement escarpées s’enroulent autour des églises et des places. Celle qui est dédiée à Luca Signorelli, enfant du pays et célèbre peintre de la Renaissance, abritait le forum étrusco-romain.

Cortona - place du Palazzo Comunale © Frankix - stock.adobe.com

Depuis le XIIIe siècle, le Palazzo Comunale (mairie) s’y dresse, tout comme le palais Casali, écrin du superbe musée de l’Académie étrusque. Sa pièce la plus remarquable ? Un stupéfiant lustre en bronze du Ve av. J.-C.

Dans la plaine en contrebas, l’aire archéologique du Sodo abrite trois tombeaux princiers à tumulus et un podium-autel en pierre dont l’escalier est bordé de gros blocs sculptés de scènes de combat entre hommes et fauves. Un monument à ce jour unique dans l'architecture funéraire étrusque.

Le + de routard.com :

Autour de Cortona, les paysages sont sculptés par l’olivier et la vigne, comme du temps des Étrusques. Mais, en drainant le Val di Chiana, en y creusant des canaux, ceux-ci en avaient aussi fait le « grenier de l’Étrurie ». Cela n’empêcha pas, après l’apogée du VIe siècle, le déclin de Curtun puis la conquête par les Romains.

Fiesole, au-dessus de Florence

Fiesole, au-dessus de Florence
Site archéologique de Fiesole © TATIANA - stock.adobe.com

À 120 km au nord de Cortona se trouve Florence, lovée au bord de l’Arno. Et, juchée au-dessus, sur une colline, Fiesole, la puissante et prospère Vipsul des Étrusques.

Le puissant mur d'enceinte étrusque subsiste en partie. Le musée du site archéologique expose de belles pièces trouvées sur place. Et la balade sur le site archéologique au milieu des oliviers et chênes verts est aussi instructive qu’agréable.

Sur les vestiges de deux temples étrusques se superpose un troisième temple à colonnes, romain celui-là. En effet, une fois Vipsul conquise par la force, les Romains bâtirent une autre cité – Faesulae – dont subsistent thermes en ruines et vaste amphithéâtre.

Plus tard, Faesulae fut éclipsée par Florentia (Florence) : encore une création des Romains !

Le + de routard.com :

Absolument incontournable, le musée archéologique de Florence fait « référence » pour toute l’Étrurie septentrionale. Compter une matinée pour voir ses remarquables sarcophages et urnes funéraires, représentant les mythes et les morts couchés au banquet de l'Au-delà, ses grandes statues en bronze  – notamment celles de la Chimère et de l' Orateur – et son « Vase François », un énorme cratère grec couvert de figures noires mythologiques.

Volterra, capitale de l’albâtre

Volterra, capitale de l’albâtre
Volterra - théâtre romain et acropole étrusque © Kirk Fisher - stock.adobe.com

Pour boucler ce périple étrusque, direction Volterra, à 80 km au sud de Fiesole. Perchée en hauteur, cette petite ville est d’allure très médiévale mais ses murailles cyclopéennes et sa porte « all’Arco » disent l’importance de la Velathri étrusque !

Puissante cité-État membre de la Dodecapole, Velathri devait sa prospérité aux mines de sel et surtout d’albâtre. Ses artisans réalisaient de magnifiques sculptures, exportées dans toute la Méditerranée.

Ici comme ailleurs, les vainqueurs ont bâti au-dessus de la cité étrusque ! Le théâtre romain cohabite donc avec l’ancienne acropole étrusque.

Le + de routard.com :

Le musée Guarnacci possède la plus grande collection au monde d’urnes sculptées ! Il offre un passionnant voyage dans l’univers funéraire des Étrusques, comme dans leur vie quotidienne.

Fiche pratique

Retrouvez les adresses, bons plans et infos pratiques dans le Routard Toscane en librairie

Consulter nos guides en ligne Toscane et Italie.

Office national du tourisme italien

Comment y aller ?

En avion jusqu'à Florence. Ensuite, location de voiture. Tramway pour aller de l'aéroport à Florence (1,70 € le ticket). Le bus pour aller à Fiesole est au même prix. 

Bon à savoir

Le site de l'agence de promotion touristique de la Toscane compte de nombreuses pages dédiées aux Étrusques.

Bonnes adresses

– Villa Curiel: via Antonio Gramsci, à Castagneto-Carducci (à 37 km de Piombino). Près du centre médiéval, cet hôtel familial moderne et confortable, offre une atmosphère originale grâce à ses meubles design et ses détails vintage. Vue imprenable sur la région viticole de l’AOC Bolgheri et, au loin, sur la mer et ses îles, dont la Corse. Double à partir de 99 € (savoureux petit déj. inclus). Deux rues plus loin, l’Enoteca Castagnetana sert de bons plats traditionnels du coin (20-30 €).

– À Cortona, à l’entrée de la zone piétonne, la très cossue Villa Marsili (viale Cesare Battisti), décorée de meubles anciens et de fresques peintes à la main, offre un luxe discret et une vue sublime sur le Val di Chiana. Double à partir de 145 €, sans petit déj.

– À Cortona encore, l’hôtel Il Centrale (via Italo Scotoni), tout simple, offre un bon rapport qualité/prix (à partir de 69 € la double) mais a l’inconvénient d’être loin du centre-ville.

– Toujours à Cortona, en plein centre, le restaurant Il Preludio (11, via Guelfa) sert, dans un cadre classique et élégant et une atmosphère chaleureuse, une cuisine très raffinée (35-40 €) tandis qu’à la Logetta, dans un superbe bâtiment XIII e

 siècle de la piazza Pescheria, Marco and Lara proposent des plats toscans traditionnels signalés par les meilleurs guides gastronomiques. L'été, déjeuner et dîner en plein air sous la loggia médiévale (à partir de 35 €).

– À Florence où les hébergements en plein centre sont souvent hors de prix, Pontevecchio Relais (chambres d’hôtes ; 8, Lungarno Archibusieri) propose des chambres élégantes et encore raisonnables (double à partir de 160 €). Toujours dans le centre de Florence, l’excellent Simon Boccanegra (via Ghibellina) héberge, au rez-de-chaussée d’un palais du XIVe siècle, une offre gastronomique (40 € minimum, plus les vins, excellents) mais aussi une osteria plus abordable et une pizzeria.

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Texte : Paula Boyer

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