La Dordogne, une paisible rivière … pardon ! un fleuve dont les eaux parcourent quelques 480 kilomètres depuis sa source en Auvergne jusqu’à la façade atlantique où elles se jettent dans l’océan.
Au cours de son périple, le fleuve traverse ainsi six départements. Autant dire, les paysages, les villes et les curiosités des bords de la Dordogne sont particulièrement variés et multiples …
Dans ce récit, j’évoque la Dordogne que je connais la mieux … celle qui chemine dans le département de la Gironde.
Ainsi, j’ai pris plaisir à (re)faire le voyage le long des berges girondines de la Dordogne et ensuite de le partager avec ce carnet de route … fluviale.
1ère étape : En pays foyen, aux portes du Périgord
Ma balade débute comme il se doit sur les rives de la Dordogne. Nous sommes ici, aux portes du Périgord tout à l’extrémité Est du département de la Gironde, dans une localité qui a tout d’une grande … enfin, surtout le nom : Sainte Foy la Grande.
Cette agglomération ne compte environ que 10 000 habitants et en y ajoutant les deux communes qui la jouxtent.
Ste Foy la Grande est une bastide dont l’origine remonte au 13e siècle, elle fait partie de ces « villes nouvelles » construites à cette période. Des cités toutes tracées sur un même plan d’urbanisme : une place centrale bordées d’arcades entourées d’un quadrillage de rues à angles droits.
En ville, il persiste quelques belles façades à pans de bois. Parmi toutes ces maisons du Moyen Âge, en voici deux exemples, celles de la Place de la Mairie puis une autre qui a pignon sur rue : une élégante maison d’angle adouci par la présence d’une tourelle (15-16e siècle). Cette bâtisse abrite l’Office du Tourisme local, une situation de choix pour cette activité.
Et si l’on parlait un peu plus de notre sujet, La DORDOGNE ?
Le point de vue depuis cette place arborée est idéal pour admirer le fleuve dont les eaux serpentent tranquillement en provenance du Périgord.
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Il suffit de passer le pont qui enjambe la Dordogne pour passer du département de la Gironde à celui de la Dordogne, le découpage administratif est ainsi fait. Ste Foy la Grande est presque située dans une sorte d’enclave girondine en Dordogne … vous me suivez ?
Bref, finalement cela n’a que peu d’importance et n’empêche pas aux eaux de progresser paisiblement vers l’Ouest en longeant à présent la commune de Port-Ste Foy.
Le village comme son nom le laisse supposer était autrefois un port. Au 18e et 19e siècle, la Dordogne était une voie navigable de premier plan … c’était avant l’essor des chemins de fer et des routes bien asphaltées.
Des bateaux traditionnels à fond plat, les « gabares » transportaient des marchandises et surtout des tonneaux de vin. Le vin, le produit phare de la région transitait ainsi sur les eaux de la Dordogne jusqu’aux ports de Libourne et de Bordeaux.
2ème étape … ou plutôt escale, où l’on parle de navigation au fil de l’eau
De nos jours et principalement en saison estivale, ce sont les canoës et les kayaks qui naviguent plus en nombre sur la Dordogne.
C’est au bout d’une petite route, presque sans fin, que l’on trouve la base nautique de Saint Antoine de Breuilh. Là, une flottille de canoës-kayaks attend les amateurs de balades au fil de l’eau. Des embarcations qui dès les premiers jours de septembre semblent prendre leur repos. L’affluence des estivants est terminée et les embarcations sont alignées pointant leur proue vers la rivière.
Pour les amateurs, sachez aussi que les eaux du fleuve sont invitantes pour profiter de la baignade. En effet, on trouve quelques « plages » sur les rivages en pays foyen … un témoignage, apercevez-vous la tête de ce baigneur solitaire qui est en train d’en profiter ?
3ème étape : Une halte culture sur les hauteurs de la vallée
Le voyageur curieux ne doit pas hésiter à faire quelques infidélités au tracé du fleuve lorsqu’il se trouve dans cette vallée.
S’éloigner du lit du fleuve et gagner les hauteurs sur les coteaux permet de découvrir une célèbre demeure. Même si les châteaux des bords de Dordogne sont moins nombreux dans cette contrée que plus en amont dans le Périgord, il en est un qui mérite le détour.
Je me souviens de l’avoir photographié un jour où de façon éphémère il était auréolé d’un splendide arc en ciel.
Son propriétaire à la Renaissance était un des plus grands penseurs de l’époque. Humaniste, philosophe et homme politique … Michel de Montaigne (1533-1592), c’est lui dont il s’agit, est passé à la postérité en rédigeant une œuvre majeure : les Essais.
Il faut l’imaginer dans cette tour de son château écrivant la 4ème édition de ses pensées durant les deux dernières année de sa vie.
Une tour qui va s’avérer être une des seules parties du château épargnées par un incendie, celui qui a ravagé en 1885 pratiquement l’ensemble de la bâtisse.
4éme étape … et le souvenir de la fin d’une interminable bataille
Retour sur les rives de la Dordogne, plus précisément à Castillon la Bataille.
Un nom de localité à la résonance bien guerrière mais qui aurait pu être aussi appelé Castillon la victoire ou encore la paix. La bataille évoquée ici est l’interminable Guerre de Cent Ans et c’est également en ces lieux qu’elle a pris fin.
En effet, en 1453, dans cette plaine fluviale les troupes du roi de France Charles VII sont venues à bout de l’armée anglaise. Ainsi, il en était terminé de trois siècles de domination des terres d’Aquitaine par la couronne anglaise.
La victoire de Castillon, on la doit en grande partie aux frères Bureau, fins stratèges à la tête de leur artillerie de campagne. Ces valeureux militaires ont leur monument à Castillon, érigé afin de leur rendre hommage.
Quant au vaincu, le Général anglais John Talbot, lui aussi a son mémorial, tout au bord de la Dordogne.
Talbot mort au combat à l’âge de 80 ans repose ici en paix, pour l’éternité.
En contemplant les berges si paisibles de la Dordogne dans le secteur de Castillon la Bataille on a du mal à imaginer les terribles combats qui s’y sont déroulés. L’histoire relate un grand nombre de blessés et de victimes parmi les soldats et la cavalerie anglaises, en plus du Chef Talbot et de ses deux fils, on parle d’environ 4000 morts au sein de l’armée anglaise, une véritable hécatombe lors de cette déroute en rase campagne !
Chaque été à Castillon on « refait » la bataille … mais sous forme d’un spectacle instructif et distrayant destiné à intéresser les visiteurs. Une association de bénévoles constituée essentiellement de castillonnais se donne en spectacle : costumes d’époque, scènes de vie rurale et assauts de cavalerie … les munitions étant remplacées par des feux d’artifice et des pétards, c’est plus ludique.
Autre atout pour les visiteurs, l’occasion de découvrir et de déguster la spécialité de la région : les savoureux vins des Côtes de Castillon.
En cette seconde quinzaine d’août, les vignes sont chargées de lourdes grappes de raisins presque mûrs pour la vendange. Une vendange sans doute précoce en raison de la sécheresse et de la canicule … Des conditions météo finalement plutôt favorables à la vigne et les viticulteurs d’espérer un bon millésime 2022.
On retrouve les berges de la Dordogne sur des quais quelque peu désert en cette matinée estivale … cela fait bien longtemps que l’eau du fleuve ne voit plus passer de gabares, le temps du commerce fluvial sur la Dordogne est bien révolu.
On disait à l’époque que la Dordogne était « marchande » lorsque le débit du fleuve permettait une bonne navigation. Peu à peu le lit du cours d’eau s’est envasé et puis, avec la sécheresse actuelle, le (bas) niveau de l’eau ne permet plus la navigation de tels bateaux.
Mais ce fond vaseux ne semble pas déplaire à tout le monde, il suffit d’observer cet échassier qui farfouille sans relâche ces rives boueuses.
A Castillon, la Dordogne est enjambée par deux ponts, un pont de pierre et un second à la structure métallique, de pur style Eiffel.
C’est par ce pont de Tranchard que l’on va passer sur l’autre rive, la gauche, et longer la rivière.
Quelques trouées à travers un rideau de végétation et d’arbres laissent apercevoir des eaux calmes et lisses.
Et si la Dordogne paraît dans ce secteur un peu plus étroite, ce n’est qu’illusion. En effet, l’impression n’est due qu’à la présence de plusieurs îles. Des îles où la nature foisonne : arbres et entrelacs de branches, buissons et végétation aquatique avec ça et là quelques fleurs sauvages, histoire d’apporter quelques touches de teintes roses au tableau à dominante verte.
Le silence est de mise, seulement percé par moments par des chants et des cris d’oiseaux.
Soudain, c’est le bruit feutré de battements d’ailes qui attire mon attention : quatre cygnes volent au ras de l’eau. Le temps de sortir mon appareil photo … voilà qu’ils ont déjà disparu derrière le rideau végétal. Dommage ! la scène était idéalement photogénique.
Une nature exubérante et sauvage côté fleuve et côté plaine, des cultures. Les alluvions apportées par le fleuve ont transformé les terres en une vallée très fertile. On y cultive de la vigne évidemment mais également du maïs, des melons et même des kiwis.
5 éme étape : Une capitale pour les papilles
D’une rive à l’autre, le pont de Saint-Jean de Blaignac permet de passer sur la rive droite de la Dordogne.
Me voici dans le bourg de Sainte Terre, un des lieux des bords de Dordogne qui m’a été pendant de nombreuses années particulièrement familier.
Je les ai souvent contemplé, observé, longé et photographié à différentes saisons ces rives de Dordogne à Ste Terre.
Un exemple avec un lever de soleil hivernal, c’était un matin calme baigné d’une chaude luminosité …mais qui n’arrivait pas cependant à réchauffer une atmosphère fraîche pour ne pas dire gelée.
Sainte Terre une petite commune de plus de 1700 habitants mais en fait une capitale !
Bon, une capitale certes autoproclamée mais une capitale tout de même : la capitale de la lamproie.
La lamproie, pour celles et ceux qui ne connaissent pas est un poisson singulièrement original. C’est un poisson migrateur qui, à l’âge adulte, remonte le cours des rivières pour s’y reproduire en eau douce.
Les lamproies apprécient les fonds vaseux, elles sont donc servies dans plusieurs secteurs de la Dordogne et notamment ici à Ste Terre.
Mesurant jusqu’à 90 cm de long, les lamproies ont un aspect peu sympathique évoquant une anguille ou un serpent. Leur mâchoire a de quoi effrayer : des dents et une bouche en forme de ventouse qui en font un prédateur redouté par beaucoup d’espèces de poissons.
Après une telle description, on pourrait s’interroger sur l’engouement local pour ce poisson ? C’est oublier que sa saveur en fait un plat très apprécié … la recette « à la bordelaise » ou à la « ste terroise » est particulièrement délicieuse. Le poisson est cuisiné en sauce dans du vin rouge, local, bien entendu ! et accompagné de poireaux. Difficile d’obtenir la vraie recette car vous pouvez vous doutez que chaque cuisinière a ses secrets de préparation …
A Ste Terre on pêche et on prépare professionnellement les lamproies. Chaque année, au printemps, se déroule une « Fête de la Lamproie » autour des membres de la très sérieuse Confrérie de la Lamproie. Au menu des conversations … et des repas, le fameux poisson est roi. Capitale oblige !
Pour en apprendre plus, on peut à Ste Terre, au hameau de Lavagnac faire une halte et visiter le « Jardin de la Lamproie ». Un petit musée au cœur d’un parc arboré qui rassemble une mine d’informations sur cet étrange poisson. Et pour la dégustation et le souvenir, il y a des conserves de lamproies à acheter.
Tout irait pour le mieux au pays de la lamproie si il n’y avait pas cette récente limitation, voire presque interdiction, de la pêche à la lamproie … En effet, l’espèce serait menacée de disparition d’où de nouvelles règles particulièrement contraignantes imposées aux professionnels locaux !
A Ste Terre, élus et pêcheurs sont ainsi « vent debout » devant ces règlements autoritaires … la filière et la spécialité « lamproie » ne pourraient y résister !
Une actualité illustrant une fois encore l’éternel débat entre la nécessaire protection de la nature et la conservation de certaines traditions loco-régionales.
Et certains d’évoquer le vœux de voir cette pêche locale à la lamproie être sauvée par une inscription au Patrimoine de l’Unesco … à suivre.
La Dordogne est bien basse en cet été de sécheresse, j’ai le souvenir de l’avoir vu avec un niveau d’eau bien plus haut … comme sur cette vue qui date de quelques années avec une surface transformée en un superbe miroir d’eau.
Si belle soit la Dordogne, elle peut aussi s’avérer capricieuse et même envahissante lorsqu’ elle sort de son lit.
En la voyant cet été presque « à sec » on a du mal à l’imaginer inondant ses berges et parfois bien au-delà …
Le centre du bourg est situé à quelques centaines de mètres du fleuve, voici une vue de l’avenue principale, pittoresque avec ses platanes. Il règne ici une impression de village tranquille du midi … mais sans le chant des cigales !
Sur le blason de la commune figure en évidence l’effigie d’une lamproie, on pouvait s’en douter, Ste Terre en est bien la capitale, mais on constate aussi la présence d’une coquille St Jacques ?
Tiens, pêche-t-on également ce mollusque dans les eaux de la Dordogne ? Bien sûr que non ! cette coquille fait référence aux jacquets, ces pèlerins ou randonneurs arpentant les chemins en direction de St Jacques de Compostelle.
Ste Terre est en effet situé sur une des voies traditionnelles qui mènent vers Compostelle. Une voie Nord-Sud qui croise et enjambe notre fleuve Dordogne qui lui, coule dans le sens Est-Ouest.
6 éme étape : Au bord d’un méandre
Une halte dans un petit bourg au bord de la Dordogne. Cabara est un village tranquille, rural et fluvial, parmi beaucoup d’autres.
Le point de vue est séduisant sur une belle courbe de la Dordogne girondine. Depuis les berges mais aussi depuis les hauteurs.
Sur les collines alentour, les rangs de vigne dessinent le paysage avec une alternance de courbes et de lignes rectilignes. J’ai souvent apprécié (et photographié …) ces panoramas de vignoble, en particulier à l’automne lorsqu’ils se parent de splendides teintes dorées.
Une vue en guise d’introduction de l’étape suivante …
7éme étape : Au cœur d’un terroir viticole d’exception
Encore des méandres, comme si le fleuve voulait ralentir son cours et profiter plus encore de la beauté des paysages du vignoble de Saint Emilion.
Le cœur de ce terroir mondialement connu et inscrit au patrimoine de l’Unesco nécessite afin de mieux le découvrir de s’éloigner des rivages de la Dordogne.
La cité médiévale de Saint Emilion vaut la peine que l’on y fasse un tour et une halte …
Une vue plongeante sur le centre ville et une autre de la Tour du Roy, un donjon citadelle d’où à la fin de chaque été les membres de la Jurade de Saint Emilion proclament le « Ban des vendanges ».
Cette année, la sympathique cérémonie s’est tenue le 18 septembre avec comme célébrité intronisée à cette occasion, le « grand » sportif Tony Parker, le basketteur.
Une fois le début des vendanges proclamé, c’est ensuite la ruée sur les belles grappes de raisins. Elles sont cueillies, foulées et vinifiées.
Avec tout le savoir faire et la maîtrise des viticulteurs et autres maîtres de chai locaux, on n’en doute pas, le vin élaboré deviendra ensuite un nectar d’exception.
Un dernier souvenir de St Emilion avant de retrouver notre fleuve Dordogne. Le souvenir d’un matin d’hiver frisquet où la cité et son vignoble étaient revêtues d’un blanc manteau. Une situation finalement plutôt rare dans la région où les flocons éphémères ne tombent que tous les 5 ou 10 ans …
Les étapes suivantes … à suivre, message suivant …