Oia, qu’ont-ils fait de toi ?!
Je ressens aujourd’hui le besoin de vous dire ma déception quand j’ai découvert Oia (prononcer « Ia »), un village tout au nord de l’île de Santorin, en cette fin d’été 2017.
Dépressifs, n’y allez pas, vous risquez d’en repartir plus désespérés, c’est un lieu magique mais dangereux pour votre énergie à vivre !
Jugez plutôt.
Oia est en apparence l’archétype du village grec : ses petites maisons accrochées en haut de la falaise, plus ou moins troglodytes, sont charmantes ; toutes les formes, toutes les combinaisons pour construire, malgré l’à-pic, ce petit village aux murs d’un blanc éclatant ponctué du bleu de quelques toits ; c’est un jeu infini de courettes, d’escaliers plus raides à monter les uns que les autres, la lumière est très belle, le vent frais nous protège d’une éventuelle chaleur : bref, le spectacle est magnifique, vraiment !
Mais !
Mais Oia est envahie par les touristes !
Normal, me direz-vous ?!
Ben non, je ne peux pas trouver ça normal…
Je n’ai pas trouvé normal que les touristes qui grouillent dans les rues s’ignorent autant les uns les autres. Pourquoi chacun se comporte-t-il comme s’il était seul au monde ?
En particulier, ces hordes de jeunes femmes asiatiques, en robe de mariée, baskets blanches et socquettes noires aux pieds, qui grimpent, telles des chèvres grecques (les chèvres crétoises ne sont pas mal non plus, quand j’y pense…), sur les murets, ou même sur les toits des chapelles, pour faire un sourire extatique mais très bref devant l’appareil du photographe qui les suit partout , à moins qu’elles ne se retrouvent dans les bras de leurs époux qui, parfois, semblent trouver la pose pénible et ont du mal à faire un vrai sourire. Quand la photo est faite, l’extase s’enfuit et leur visage redevient impénétrable. J’en vois une qui se nettoie consciencieusement les dents avec un cure-dents en rentrant à son hôtel, le mari loin devant, la photographe au milieu, elle suivant d’un air enfin détendu… Ces belles mariées ne voient personne, à peine leur mari ; leurs seuls vrais regards sont pour leur photographe, ou plutôt l’appareil photo qui les traque partout…
Elles ne sont pas les seules !
Les autres touristes se pressent sur la promenade spécialement aménagée pour leur faciliter la vue sur le panorama magnifique qui s’offre à eux ; ils interrompent continuellement leur déambulation pour prendre la pose et se photographier ; les sourires apparaissent alors, des poses alanguies s’esquissent ; dès que la photo est prise, ils reprennent leur promenade et redeviennent étrangers à tout ce qui n’est pas eux…
Ce qui m’a semblé le plus absurde, c’est de voir une femme trempant dans un minuscule baquet d’eau installé sur la minuscule terrasse d’un des très luxueux hôtels qui pullulent ici (terrasse qui surplombe la promenade ci-avant décrite), la tête tournée vers le flot de promeneurs, mais ne semblant jamais voir personne !
La rue principale envahie de boutiques de luxe ne fait rien pour arranger les choses. L’argent, le fric, le profit seraient les seules réalités de ce monde de fantasmes où chacun vit dans sa bulle sans rencontrer l’autre ?
Il y a foule jusque vers 15h ; après, les rues se vident et le village semble brusquement désert, abandonné…
J’ai vu ce qu’était la solitude, la vraie, la mauvaise, celle qui vous vide de votre humanité, je l’ai vue à Oia…
Je n’y reviendrai pas, malgré la beauté du décor, j’en suis repartie bien trop triste…
AnneBb52