où que ce soit, qui ont une sorte de leader naturel, celui qui se dévoue pour “faire les papiers” et toute cette sorte de choses. Concession agricole et communauté qui se suffisait à elle même. “tout partager, les travaux, la vie ensemble, les repas, etc” bien entendu sans calculs mesquins.
J’en ai vu une ainsi, se développer en Guyane, sur des dizaines d’hectares qui en plus avait une réputation qui dépassait largement la région: les babas cools plus ou moins routards y passaient au cours de leur périple et contribuaient au boulot commun contre l’hébergement, la bouffe, ils apportaient leur pierre à l’édifice, au défrichage. Là encore, sans calculs mesquins, on est pas dans cette société capitaliste de merde, on est potes.
Et puis un jour comme ça se produit hélas souvent, la communauté s’est disloquée, et on a voulu faire les comptes, pas au centime près mais pour que ceux qui avaient mis des milliers d’heures de boulot pour l’édifice reçoivent en partant un petit quelque chose, pour redémarrer ailleurs.
Ils ont été vite faits: tout, absolument tout était enregistré au nom du fondateur (le bail emphytéotique, les bâtiments, les espaces cultivés etc) lequel avait fait toutes ces démarches si emmerdantes, je suis sympa les mecs, je vous laisse les joies du bûcheronnage ou de la charpenterie, des cultures, pendant que je vais faire des queues aux guichets de Cayenne, et ceux qui voulurent partir n’avaient que le droit de faire leur sac.
Le “fondateur” s’est donné le beau rôle en leur octroyant quelques piécettes et il est maintenant à la tête d’une belle exploitation tout ce qu’il y a de plus normée, insérée dans la société.
Je dis ça je dis rien, mais surtout quand on veut vivre en autarcie on peut se passer de l’électricité raccordée! (du vécu, sept ans en Guyane avec deux panneaux solaires, une lampe à gaz (sur grosse bouteille et colonne belvédère, là ça ne coûte à peu près rien en butane, avec les petites cartouches jetables c’est l’horreur) un frigo à pétrole (cher à l’achat mais increvable, aucune pièce en mouvement et ça consomme très peu si on consacre 10mn/jour au réglage), et un tout petit groupe qui fonctionnait 10h/sem environ quand je branchais la pompe qui tirait l’eau du puits pour la hisser dans le réservoir en hauteur et que je devais utiliser l’ordinateur - avant l’ère internet dont on peut aussi se passer, si! si! (mais j’écrivais)
Je me suis certes remis très vite dans mes habits de civilisé décadent quand cette belle expérience s’est terminée, mais il m’en reste quelque chose et je suis à peu près sûr qu’en cas de grosse merde du genre cataclysme naturel sur la durée ou exode obligé, je serais sans doute moins empoté que d’autres.
Cela dit je ne crois guère à la vraie autarcie en France. Parce qu’il faut quand même vendre un peu pour se procurer ce qu’on ne peut pas produire (des tas de choses, bien plus que dans un pays chaud où la dépense en vêtements est infiniment moindre par exemple), qu’on ne peut pas vendre facilement du fait des normes de sécurité alimentaire, que pour avoir assez de bois pour se chauffer six mois par an il faut une sacrée surface boisée etc.
Nos “communautaires en autarcie” en France, 98 fois sur 100, font la queue à la poste entre le 5 et le 8 pour retirer leurs 500 euros du RSA, ils ont la CMU, et leur activité personnelle (très respectable, souvent intéressante) est souvent davantage un mode de vie et un complément de revenus qu’un vrai retour aux sources en se coupant de la société.
Parce qu’avec un RSA à la campagne quand on a le logement pas loué (même très rustique), le potager, le poulailler, les clapiers, voire une ou deux ruches et trois chèvres pour le lait etc. on vit infiniment mieux qu’avec un SMIC dans une ville, un loyer à payer tout comme l’intégralité de la nourriture, des transports, et toutes les dépenses contraintes (je ne critique pas le RSA, d’abord ce serait HS sur ce forum ensuite il correspond à un besoin pragmatique; enfin si certains départements l’octroient et le maintiennent assez facilement, d’autres sont bcp plus sélectifs)
D’ailleurs même dans ma “communauté guyanaise” évoquée ci-dessus et alors que la vraie autarcie était possible, avec les meules à charbon de bois pour la cuisson (et assez de bois pour les alimenter, ça repoussait plus vite qu’on le coupait et pour que ce soit le cas en France il faut une sacrée surface), des lampes à huile et l’huile faite sur place, des cultures vivrières en excédent (ventes sur les marchés rapportant de quoi acheter des outils, des vêtements, etc) de l’élevage, du miel, du sucre de canne, qq plants de café et même le tabac qui fait rigoler, dès que le RMI fut institué, tous les ayant-droits ont fait la queue à la poste. Et quand l’un d’eux s’est quasiment coupé le bras en abattant un arbre il n’est pas allé voir le chaman du coin, mais bel et bien l’hosto de Cayenne (et il fit très bien).
Cela pour dire que la vie en quasi autarcie est possible, que ce choix est infiniment respectable (pour moi du moins même si c’est aux antipodes des orientations que j’ai données à mon existence) mais que justement pour être cohérent et ne pas se planter il faut être en position permanente de réflexion.
Est-ce que tel ou tel truc est indispensable, nécessaire ou superflu? (ex EDF dans certaines situations qu’on ne peut pas généraliser… des fois c’est oui, des fois c’est non)
Est ce que si je vais dans telle direction je ne me mets pas un fil à la patte à long terme pour une satisfaction à court terme?
Et accepter une part de risque qu’on a du mal à évaluer tant on est formaté. Chez nous si on est malade on est soigné d’abord, ensuite on voit si la personne peut payer (sauf la bobologie et encore quand on insiste…). Dans plein de pays où on vit comme on veut et où on le fait effectivement en quasi autarcie, ou on se paye une assurance santé (mais dans ce cas il faut travailler pour la vie quotidienne PLUS pour dégager du cash et alors ce n’est pas un fil mais un câble qu’on se met à la patte) ou on accepte le fait qu’un accident parfois banal, une maladie, peuvent avoir des conséquences dramatiques. Cette part de risque acceptée ou pas est de la liberté souveraine de chacun, mais pour être libre encore faut-il en être informé. Et se souvenir que la situation où on est à 20-30 ans (jeune, seul dans la vie, en pleine santé) n’est pas forcément celle où on sera vingt ans plus tard (pas pour refuser les aléas, mais pour les gérer et les accepter en toute connaissance de cause)
Cordialement