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La momie Juanita dans les bras de l'andiniste Miguel Zarate
À Arequipa, je fis la connaissance de Fernando Velasquez, à la fois intellectuel et homme de terrain, qui parle un français impeccable. Il a vécu autrefois à Paris. Spécialiste notamment des tissus andins, il exerce le métier de guide, mais donne aussi des cours à l'université de Lima. Son programme cette année : la pensée du philosophe et sociologue Pierre Bourdieu.
Avec Fernando, nous évoquons la figure de Flora Tristan (1803-1844) la grand-mère maternelle du peintre Paul Gauguin. C'est un Péruvien, l'écrivain Mario Vargas Llosa, originaire d'Arequipa, qui a rendu à cette femme, et à son petit-fils, le plus bel hommage qui soit à travers un merveilleux roman : Le Paradis un peu plus loin. Le musée Santuarios Andinos n'est pas un paradis, mais il est de loin l'endroit le plus visité d'Arequipa. Je m'y rends en compagnie de Fernando. On y admire la célèbre momie Juanita, émouvante princesse des glaces. Celle-ci fut découverte le 8 septembre 1995 au sommet du volcan Ampato, à 6 380 m, par le guide aréquipénien Miguel Zarate qui travaillait comme guide pour l'archéologue américain Johan Reinhard.
La mission était financée en grande partie par le National Geographic Magazine. On estime que cette belle jeune fille de quatorze ans a passé cinq cent trente ans dans les glaces du volcan Ampato ! En 1995, suite à une éruption volcanique, les glaces de l'Ampato se mirent à fondre sous l'effet de la chaleur.
Enterrée depuis un demi-millénaire au sommet de la montagne, la petite momie se détacha de sa cavité naturelle et dévala la pente du cratère. C'est de justesse que Miguel Zarate parvint à la rattraper. Son bon état de conservation lui a permis d'être étudiée aux États-Unis, puis de revenir à Arequipa où elle est exposée avec tous les honneurs comme Toutankhamon dans son musée égyptien.
C'est un magnifique symbole de la civilisation inca. Le cadavre de la fillette était recouvert de fines étoffes incaïques. À ses côtés, Zarate et Reinhard retrouvèrent un petit sac rempli de feuilles de coca et plusieurs types d'offrandes : vases à chicha (bière de maïs), lamas en argent, figurines couvertes de tissu. Afin d'apaiser la colère des divinités, les Incas faisaient des sacrifices humains. On suppose donc que la fillette a été tuée d'un coup de massue dans la tempe droite. Juanita est la momie la mieux conservée de toutes celles découvertes au sommet des Andes péruviennes.
Avec Fernando, nous allons rendre visite au vrai découvreur Miguel Zarate, qui tient une agence d'andinisme à Arequipa. Il n'a qu'une idée fixe : être enfin reconnu comme le découvreur de Juanita, que la vérité soit rétablie, que son nom soit mentionné au musée, à l'Université catholique, à l'office de tourisme, dans la presse. Me montrant une photo où il tient la momie dans les bras, il nous confie : « Quelques jours avant ma découverte, Juanita m'était apparue en rêve. Elle me parlait en me suppliant de venir la sauver. Et je lui répondais : je ne te laisserai pas mourir, non Juanita, tu ne mourras pas. Je viendrai te chercher ».
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Texte : Olivier Page
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