Fès, impériale
Mystérieuse médina
Derrière les portes d’entrée de la vieille ville se cache un enchevêtrement de ruelles, de passages, de petites places. Un labyrinthe inchangé depuis le Moyen Âge, où une modeste façade peut abriter un palais de marbre et de faïence. Un monde a priori impénétrable où pourtant des artisans travaillent, échoppes ouvertes, le bois, le fer, la céramique, le tissu, les peaux. Vue de loin, la médina (le nom vient de Médine, la première cité de l’Islam) a l’air tranquille ; à l’intérieur, elle grouille de vie. Tendez l’oreille, ouvrez l’œil, humez l’air… La médina est un fabuleux terrain de jeux pour les sens.
Classée à l’Unesco, cette médina est la plus grande du monde arabe. Entourée de 24 kilomètres de murailles, elle abrite, sur 200 hectares, plus de 200 000 personnes. L’une des densités urbaines les plus élevées au monde ! En son sein, on compte 9 500 maisons, 176 mosquées, 83 mausolées, 11 médersas et 40 hammams. Selon le modèle de la ville arabo-andalouse médiévale, chaque quartier s’organise autour de son lieu de culte, du four à pain, de l’école coranique et de la fontaine. Dans les rues du vieux Fès s’exprime la mémoire collective du peuple marocain.
Une mémoire menacée, toutefois. La médina, dont 35 % de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté, s’est dégradée, car sa population n’a plus les moyens de l’entretenir. Autrefois creuset de différents milieux sociaux, elle est habitée aujourd’hui par les plus démunis. L’état des lieux est inquiétant : 4 000 bâtisses sont menacées de ruine, dont 1 800 dans un état grave.
Depuis une trentaine d’années, un travail de sauvegarde a été lancé par l’Agence pour la dédensification et la réhabilitation (ADER) de la médina de Fès, soutenue par des mécènes, les collectivités locales et des fonds d’aide internationaux. Plus d’un millier de demeures ont été restaurées, tout comme des monuments et des fontaines. Enfin, les activités artisanales les plus polluantes, comme la céramique, ont été délocalisées. L’objectif : conserver la médina en bon état tout en ne la dénaturant pas. Un équilibre fragile, à respecter.
Texte : Jean-Philippe Damiani
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