Mexique : Oaxaca, cœur indien
…et discriminations
Plus loin dans les montagnes, derrière Mitla, d'autres bourgs peuplés majoritairement d'Indiens « Mixés » sont loin d'être aussi fréquentés. Après une longue route sinueuse et abîmée, au bord de laquelle des hommes broient l'agave cuite avant de la distiller – nous sommes au cœur du pays du mezcal – , Tlahuitoltepec se découvre, perchée à flanc de montagne. Dans la ville, les panneaux sont indiqués en Ayuujk (« la parole fleurie »), preuve d'un attachement à une forte identité culturelle. La ville abrite même une radio communautaire qui diffuse dans toute la région, radio « Jënpoj », qui couvre toute l'actualité des Mixés qui comptent près de 110 000 individus, habitant principalement dans l'État d’Oaxaca.
Dévastée par deux coulées de boue provoquées par le déluge de septembre 2010, Tlahuitoltepec se débat en vain auprès des autorités pour reconstruire les infrastructures détruites et consolider celles qui ont été fragilisées. Mais les mois passent, et aucun financement n'a pour l'instant été débloqué. Rien d'étonnant, dans un État où les populations indigènes sont depuis longtemps largement délaissées et discriminées. La situation des habitants de Tlahuitoltepec n'est en effet pas isolée. Dans certaines régions d’Oaxaca, les tensions avec les communautés indiennes peuvent parfois mener à des conflits.
À San Juan Copala, une communauté villageoise Triqui s'est ainsi constituée en structure « autonome » en 2007, pour protester contre les discriminations. Depuis, elle se heurte à un harcèlement et à des violences inouïes (assassinats, expulsions de masse, …) de la part de groupes armés proches de l'ancien gouverneur. Une trentaine de femmes de la petite communauté occupent depuis août 2010 une partie du zócalo d’Oaxaca, pour faire entendre leurs revendications.
Le nouveau gouverneur, Gabino Cué, a fait beaucoup de promesses aux communautés indigènes d’Oaxaca pendant sa campagne électorale. En 2006, la conjonction des revendications indigènes et syndicales a abouti à une insurrection. Le blocage du centre historique d’Oaxaca a duré plus de trois mois. Partout, sur les murs de la ville, les messages à caractère révolutionnaire rappellent aux autorités que le couvercle refermé par la force peut de nouveau se soulever ... un jour ou l'autre.
Texte : Gaël Grilhot
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