Récit de voyage d’un globestoppeur autour du monde et de l’escale au Maroc à bord d’un voilier stop d’Espagne aux Canaries. Huits jours de stop et de rencontre à travers cet incroyable pays.
Maroc, terre de différences et de nouvelles cultures. En recherche de dépaysement, je suis enthousiaste de devoir manger avec la main droite les tagines aux saveurs esquisses (très conviviale, j’adore), mais moins à me servir de la main gauche pour l’hygiène (plus difficile à prendre plaisir, mais passage oblige). Cette escale au Maroc est une aubaine et il me tâte d’aller rencontrer le peuple marocain et je ne suis pas déçu.
L’accueil ne se fait pas attendre et mon premier chauffeur marocain me propose spontanément l’hébergement. Il est encore très tôt mais tant pis pour les kilomètres, j’accepte avec plaisir son invitation. Mohammed vit à une vingtaine de kilomètres de Taroudant avec ses parents. Je suis reçu chez lui avec un excellent tagine préparé par sa mère. Ce que j’admire, c’est la simplicité de l’échange. Nous communiquons simplement et avec ouverture bien que nous soyons issues de deux mondes différents, deux religions différentes, deux modes de vie différents, nous apprenons et découvrons l’un de l’autre. Je prends plaisir à d’écrire mon projet à Mohammed et Ismael, son meilleur ami. Comme électron libre, je commence à comprendre que je suis un vecteur de rêve et d’espoir dans l’imaginaire des personnes rencontrées.
Le lendemain, après 40 minutes d’attentes, un van s’arrête. Ils ne parlent pas français et je ne parle pas arabe mais j’essaie de leur faire comprendre que je fais du stop. Une fois a l’intérieur, je réalise qu’il s’agit en vérité d’un taxi. Les gens y montent et descendent en payant l’homme assis devant moi. La pression monte. Vais-je devoir payer ma course ? Je sors mon album photo et le montre a cet homme et comprends vite qu’ils sont impressionnés par mon projet et j’entends le mot autostop revenir régulièrement dans leurs conversations. Je ne reste cependant pas tranquille et redoute le moment de l’arrivée où ils vont me demander de payer. Le moment arrive enfin et mise à part des aux revoir chaleureux, je ne dois pas mettre la main à la poche, ce qui aurait anéanti mon rêve de tour du monde en stop. Soulagement d’éviter un conflit et réalisation que mon album photos peut me sortir de problèmes. L’expérience du van taxi stop au Maroc se déroulera cinq fois de plus dans ce voyage. Onze voitures plus loin, incluant un lift avec Aziz qui m’invite chez lui pour le tagine, j’arrive à Ait Benhaddou.
Alors que je planifiais de dormir dans mon hamac au coeur de l’oasis, j’entame une conversation avec Mustapha dans le restaurant où je m’étais refugié pour récupérer le wifi. Il me propose l’hébergement pour la nuit et son patron lui donne sa soirée. Sur le chemin de la maison de sa famille, il m’explique qu’il vient de sortir de quatre années de prison, et pour cause, il s’avère qu’il a enlevé la vie d’un homme. J’ai le sang glacé et bien que ce ne soit pas la première fois que je rencontre quelqu’un comme ça, cela n’est jamais très rassurant. Il m’explique ensuite avoir été agressé et avoir eu recours a la légitime défense. Il s’estime chanceux car au Maroc, les peines peuvent monter jusqu’à dix années dans ce genre de situation. J’ai peine à croire qu’un homme aussi doux et généreux ait pu tuer un semblable.
Nous passons la soirée avec ses amis dans une des boutiques du bazar qui doit faire vingt mètre carré. Nous sommes 4, puis 7 et enfin 10 à se trouver là. Ici je découvre la culture berbère et je me sens envouté par le son de la guitare et des percussions joint aux différents chants se mêlant aux odeurs de tagine qui se prépare doucement dans le coin de la pièce et les parfums de hachich qui envoutent les lieux. Après cette période de communion musicale, le tagine est servit et dix mains se jettent dessus pour en savourer chaque morceaux. Je suis conquis par l’esprit de convivialité, de partage et de solidarité de cette partie du monde.
Le lendemain, je prends congé des parents de Mustapha pour aller visiter la Kasbah et m’en vais le cœur léger en apercevant mes hôtes me saluer sur le coin de la porte. J’ai été reçu avec beaucoup de simplicité et d’amour bien que je sois un total étranger. Nous avons tant à apprendre de leur culture et j’espère qu’un jour l’Europe en fera de même pour les voyageurs de passage. Je suis heureux, l’ivresse du voyage est bel et bien là.
Je visite cette vieille Kasbah où touriste se mêlent aux différents guides et marchands et comprends que je suis bel et bien dans un site du Patrimoine Mondial de l’UNESCO. La cité est charmante et je prends plaisir à déambuler dans ces petites ruelles de terre rouge où autrefois les caravanes y faisaient escale.
Une fois la visite terminée, je retourne passer un peu de temps avec Mustapha avant de rejoindre Mohammed (guide local et ami) qui me donne toutes les indications pour trouver des nomades dans l’Atlas, et plus précisément dans les Georges de Dades. La décision est prise et je m’y rendrai demain, en attendant, j’accepte leur invitation à rester et repasse une nuit enchantée dans ce lieu si magique.
Arrivé dans les gorges, je m’en vais rencontrer les nomades (voir article ci-joint), puis redescend de la montagne en compagnie de Mohammed. J’accepte son invitation pour la nuit et nous marchons en direction du village. En chemin, nous nous arrêtons dans un bâtiment en construction pour y prendre le thé avec les travailleurs et se réchauffer autour d’un feu. Les prévisions pour la nuit ne sont pas bonnes et la neige est annoncée.
Une fois arrive chez Mohammed, je patiente dans le salon pendant plus d’une heure et dois ensuite partir et pour cause, sa femme est en train de donner la vie dans la pièce voisine et j’entends impuissant les pleurs et les douleurs. Je suis finalement accueilli chez Aziz, ami de Mohammed, où je peux me reposer avant de discuter avec Mohammed le jour suivant et d’apprendre qu’il s’agit d’une petite fille et que sa femme se porte bien.
Le lendemain, je reprends la route vers Merzouga pour y rejoindre Gerald et nous lancer à l’assaut des dunes. Sur le chemin, alors que je me trouve coincé sur une petite route, je discute avec deux locaux et prends le temps de leur montrer les photos. Sans m’en apercevoir, ils ont arrêté une mobylette et m’ont trouvé ma prochaine dépose avec Slimane qui a la gentillesse de m’inviter en route chez sa tante pour y déguster une pizza et un whiskey berbère. Cependant, la journée de stop ne suffit pas et je me retrouve coincé à 30 kilomètres de Merzouga et décide de passer la nuit dans la palmeraie malgré les propositions d’hébergements reçues.
Une fois sur place et Gerald retrouvé, nous nous lançons dans les dunes afin d’y rencontrer les nomades vivant de l’autre coté. Déception. Ces nomades sont ce que le jour est à la nuit et il s’agit bien plus d’une attraction touristique où les échanges se monnayent à coup de dirhams. Qu’importe, la région est belle et nous décidons d’avancer en direction de la frontière algérienne a 20km de là. Alors que la nuit tombe, il nous reste encore 5km et décidons de faire demi tour pour aller dormir dans un bivouac que nous avions vu le matin et qui est fermé en cette saison et où nous comptons bien y passer la nuit. Cependant, se diriger dans le désert de nuit ne s’avère pas être une mince affaire et il nous a fallu plus de deux heures à longer les dunes pour enfin retrouver le bivouac de touristes où nous espérons retrouver notre trace vers notre lit promis.
Alors que nous cherchons notre chemin, une voiture s’approche dans la nuit. Il s’agit de Mustapha et de ses amis qui tiennent le bivouac voisin. Ayant vu la frontale, ils sont venus à notre rencontre pour nous proposer l’hébergement pour notre plus grand plaisir après plus de douze heures de marche synonyme de muscles meurtries. Nous passons la soirée avec eux et nous écroulons de fatigue dans des couvertures bien chaudes, heureux d’éviter le froid glaciale des dunes qui rythment les nuits du désert.
Le lendemain, nous aidons nos hôtes à préparer le camp pour la venue des clients puis nous repartons en direction de la ville. Je me remets en route vers Agadir et bat mon record de kilomètres en une journée de stop avec… 94 kilomètres parcourus. Un bien faible ratio mais qui s’explique par la fête de Laid et le peu de trafic, pour ne pas dire inexistant sur les routes. Heureusement, les jours se suivent mais ne se ressemblent pas et je parvins à faire les 650 kilomètres restant le lendemain, en grande partie grâce à Malek et Lou avec leur camion à bord duquel j’assiste impuissant a une scène de corruption avec la police et rejoins Agadir à temps avant le départ prévu 12 heures plus tard pour Las Palmas et les Canaries.
Une chose est certaine, je ne pourrais oublier l’accueil marocain et spécialement les berbères et je rêve d’un monde où malgré les différences apparentes, nous nous faisons confiance avec la même facilité que j’ai pu expérimenter dans ces contrées aussi belles que la chaleur de ses habitants.
Jour 47, 58 chauffeurs, 4028km, 1 voilier, 600 miles nautiques.
“Travel the world on the cheap”