Mexique-Etats-Unis, sur la route de la frontière
" Avez-vous l'intention de tuer le président ? "
Le lendemain matin, nous déposons un Coca bien frais à Jorge, croisons Oscar au supermarché, pas étonné de nous revoir et décidons de repasser la frontière dans l'autre sens, histoire d'aller discuter un peu avec les garde-frontières américains. Mauvais choix : les douaniers zélés, en état d'alerte orange, nous retiennent plus d'une heure. Fouille totale de la voiture jusque dans les moindres recoins de nos portefeuilles, interrogatoires complaisants, ces braves gens ne semblent pas apprécier le nom tunisien de Sarah, la page arabe de son permis international (qui, comme son nom l'indique, est écrit dans toutes les langues), les tampons tunisiens et marocains de nos passeports, peut-être notre nonchalance française et, qui sait, l'autocollant " No blood for oil " à l'arrière de notre voiture électrique. Ils prennent nos pommes en otage, et nous accessoirement un peu trop longtemps, puis nous laissent filer. À regret ? Côté américain, un court entretien avec l'attachée de presse de la Border Patrol, décroché à l'arraché, nous laisse sceptiques. Si nous ne nions pas que l'essentiel de ses troupes fait bien son boulot, de son côté, elle dément formellement ce dont les journaux font leurs choux gras dans les colonnes des faits divers : certains rancheros américains tirent les Mexicains comme des poulets, tout fiers qu'ils sont de tenir la frontière la mieux gardée du monde. Quoi qu'il en soit, cette femme, Alicia, pense que ce n'est pas une bonne idée que des gens apportent de l'eau aux clandestins perdus dans le désert, car ils pourraient aussi bien accepter un liquide empoisonné et mourir… Diable ! Je lâche l'argumentaire à ce moment précis.
Texte : Juliette Serfati
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